L’Encéphale (2014) 40, 447—456

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

ScienceDirect journal homepage: www.em-consulte.com/produit/ENCEP

MÉTHODOLOGIE

Évaluation des états mentaux à risque de transition psychotique : validation de la ¸aise de la CAARMS version franc Assessment of mental states at risk of psychotic transition: Validation of the French version of the CAARMS M.-O. Krebs a,∗,b, E. Magaud a,b, D. Willard a,b, C. Elkhazen a,b, F. Chauchot a, A. Gut a, Y. Morvan a,b, M.-C. Bourdel b, M. Kazes a,b a

Service hospitalo-universitaire S14, faculté de médecine Paris-Descartes, université Paris-Descartes, centre hospitalier Sainte-Anne, 75014 Paris, France b Inserm, laboratoire de physiopathologie de maladies psychiatriques, université Paris-Descartes, PRES Paris-Sorbonne-Cité, centre de psychiatrie et neurosciences, UMR894, GDR 3557 psychiatrie, 75014 Paris, France Rec ¸u le 20 septembre 2013 ; accepté le 5 d´ ecembre 2013 Disponible sur Internet le 12 aoˆ ut 2014

MOTS CLÉS Psychose ; Schizophrénie ; Diagnostic précoce ; Accès aux soins ; Prodromes



Résumé L’objectif de cet article est de présenter le travail de validation de la version franc ¸aise de l’entretien semi-structuré Comprehensive Assessment of at risk mental state (CAARMS), outil permettant le repérage de symptômes psychotiques atténués et définissant les critères d’état mental à risque (AR) ou de psychose (P). Une population de 40 jeunes sujets (15 désignés comme étant « prodromiques » et 10 désignés comme étant déjà psychotiques par un psychiatre expert du centre d’évaluation du jeunes adultes et adolescents, SHU, Paris et 15 témoins sains appariés) a été interviewée en utilisant la version de la CAARMS traduite en franc ¸ais. Les avis établis après entretien CAARMS étaient concordants à 90 % avec celles du clinicien-expert. Les scores obtenus à la CAARMS (score total et à la sous-échelle positive) chez les sujets « prodromiques » étaient intermédiaires par rapport à ceux des sujets psychotiques et des témoins et sont corrélés à ceux de la BPRS24-EA. La fidélité inter-cotateur est excellente, en particulier pour le total et la sous-échelle positive. La CAARMS version franc ¸aise a de bonnes validités discriminative, de construction et concurrente ainsi qu’une bonne fidélité inter-cotateur. Elle est aujourd’hui disponible pour poursuivre des études et faciliter l’implantation de programmes de détection précoce en pays francophones. © L’Encéphale, Paris, 2014.

Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (M.-O. Krebs).

0013-7006/$ — see front matter © L’Encéphale, Paris, 2014. http://dx.doi.org/10.1016/j.encep.2013.12.003

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KEYWORDS Psychosis; Schizophrenia; Early diagnosis; Access to care; Prodromes

M.-O. Krebs et al. Summary This article aims to present the validation study of the French version of the Comprehensive Assessment of at risk mental states (CAARMS), an interview that seeks to determine whether young adults criteria for at-risk (AR) mental states, or psychosis. We assessed 40 young subjects, 15 were considered as ‘‘prodromal’’ (Prd) and 10 as experiencing a first episode of psychosis (PEP) by our expert clinician at the center — centre d’évaluation des jeunes adultes et adolescents, University Hospital Centre, Paris — and 15 were healthy controls matched for age and sex. When assessed with the CAARMS, 73% (n = 11) of the prodromal subjects reached the criteria for AR mental state, four subjects did not reach the criteria for AR, nor psychosis (P) and 100% of the PEP reached the criteria for P. The three groups were significantly different on CAARMS total score (P < 0.001) and subscores ; Prd subjects had intermediate scores between PEP (P < 0.001) and controls (P < 0.001) scores, PEP showing the highest scores. Posthoc analysis showed that Prd significantly differed from Controls on each subscale (P < 0.001) and that Prd differed from PEP on the ‘‘positive symptoms’’ subscale (P < 0.001), as well as on ‘‘behavioural change’’ (P = 0.021), owing to difference on the item ‘‘impaired role function’’. We used the brief psychiatric rating scale 24 items with anchor (BPRS24-EA) in addition to with the CAARMS, the AR group showed intermediate scores between controls and P subjects. Total scores of both scales were correlated (r = 0.408 ; P = 0.043) and the BPRS24-EA ‘‘positive symptoms’’ score was correlated with CAARMS’ scores on the ‘‘Positive symptoms’’ subscale (r = 0.456, P = 0.022), ‘‘emotional disturbance’’ (r = 0.506, P = 0.01), and ‘‘behavioural change’’ (r = 0.666 P = 0.001). We found no correlation between BPRS negative and depression subscales and any of the CAARMS’ subscales. When looking at its reliability, reliability coefficients (Cronbach’s alpha) showed excellent reliability for ‘‘positive symptoms’’, ‘‘emotional disturbance’’, ‘‘behavioural change’’ and ‘‘general psychopathology’’ (respectively r = 0.82, 0.75, 0.78, 0.84, 0.83) and moderate reliability for ‘‘cognitive change’’, ‘‘negative symptoms’’ and ‘‘motor/physical change’’ (respectively r = 0.39, 0.59, 0.43). Overall, analysis of the results of construct validity, concurrent validity and reliability of the CAARMS indicates that the French version is valid and reliable. It is now available to develop and implement early detection programs in French speaking countries. © L’Encéphale, Paris, 2014.

Introduction La fréquence de la schizophrénie ainsi que la sévérité des conséquences humaines et sociales qu’elle entraîne justifient de poursuivre les efforts pour améliorer son diagnostic et sa prise en charge précoce. Dans la première publication franc ¸aise du domaine en 2003, nous avions fait la synthèse des données de la littérature soulignant l’intérêt du repérage des symptômes prodromiques [1]. Les premiers signes spécifiques à la maladie, généralement entre 15 et 25 ans, sont précédés par une période, dite « prodromique » pouvant durer d’un à cinq ans, qui s’étend de la période prémorbide jusqu’au développement des troubles psychotiques francs [2,3]. Au cours de cette période, les patients peuvent présenter à la fois des difficultés cognitives (pour revue Fusar-Poli et al. [4]) tels que des problèmes de concentration menant à un fléchissement scolaire ou professionnel [5,6] ; ou encore des symptômes, dits « non spécifiques » comme l’anxiété, l’agitation, la dépression. Ces manifestations précoces tendent à s’exprimer tôt, deux à six ans avant la première hospitalisation (en moyenne 4,6 ans), alors que les symptômes positifs atténués apparaissent plus tardivement (en moyenne deux ans avant l’admission) [7,8] ; les auteurs parlent de progression de symptômes [8] qui irait des symptômes non spécifiques aux symptômes positifs en passant par des symptômes positifs de faible intensité ou fréquence [7,10]. Il apparaît important de faciliter une détection et une intervention précoces durant la phase prodomique pour améliorer le pronostic fonctionnel des patients. D’une part, la période prodromique s’accompagne

souvent de prises de risques (abus de substance), de mises en danger (tentatives de suicide), d’un repli, voire d’une désinsertion sociale (également appelée « toxicité » sociale) [11] impactant lourdement le pronostic fonctionnel. D’autre part, le repérage précoce permet de traiter rapidement après l’émergence du premier épisode psychotique, réduisant ainsi la durée de psychose non traitée (DPNT) qui influence la qualité de la réponse au traitement [3,12,13], possiblement par le biais d’altérations cérébrales accompagnant la transition psychotique et devenant irréversibles [14]. Les études prospectives menées majoritairement en Australie (PACE clinic [15,16]) et en Amérique du Nord (NAPLS [17]) ont démontré que, en moyenne, 22 % des sujets présentant des « prodromes » développeront un trouble psychotique au cours de l’année qui suit (pour revue, Fusar-Poli [18]). Compte-tenu du taux de sujets qui ne développent pas la maladie parmi les personnes repérées, la notion d’« état mental à risque » (AR) ou encore de sujets à « ultra haut risque » (UHR) ou sujets à « haut risque clinique » de développer une psychose a été suggérée. Ces termes sont plus pertinents et désormais préférés au terme « prodromes » qui désigne rétrospectivement les symptômes précurseurs de la maladie chez un sujet déjà atteint de la maladie [9,10,19,20]. Plusieurs outils permettant la détection des signes précoces ont été développés suivant deux approches conceptuelles [1,21] :

États mentaux à risque de transition psychotique • l’approche dite des symptômes « de base » de Huber [22] fait référence a des perturbations neuropsychologiques subtiles et subjectives touchant la pensée, la parole, la mémoire, la perception et l’action (par ex. interférence de la pensée, perturbation de la compréhension du langage, expériences de déréalisation, perturbations perceptuelles). Cette approche a donné lieu à l’élaboration d’un entretien semi-structuré, la Bonn Scale Assessment for Basic Symptoms (BSABS [23]), dont est issue the schizophrenia proneness instrument, adult-version (SPI-A [24]). Ces symptômes de base correspondent à des prodromes « précoces » ; • l’approche dite des « symptômes psychotiques atténués » prend en compte l’existence d’idées délirantes, hallucinations ou désorganisation conceptuelle de faible intensité ou fréquence, et permet de déterminer si un jeune sujet répond aux critères d’état mental à risque tel que décrit principalement dans deux outils : la scale of prodromal symptoms (SOPS), remplie à la suite d’un entretien semi-structuré, le SIPS — structured interview for prodromal syndromes [25,26]) et la Comprehensive Assessment of at risk mental state — évaluation détaillée des états mentaux à risque (CAARMS) [9,10,27]. Il s’agit ici de repérer les sujets présentant des symptômes « tardifs », associés à un risque de transition psychotique dans l’année qui suit d’environ 30 %. La CAARMS a été construite à partir de l’étude rétrospective de patients vus au cours de leur premier épisode psychotique et sur la valeur prédictive des items « contenu inhabituel de la pensée », « suspicion », « désorganisation conceptuelle », « hallucination » de la BPRS et « conviction délirante » du Comprehensive Assessment of symptoms and history (CASH [28]) dans la transition psychotique [20]. Ce nouvel outil avait pour objectif d’évaluer plus finement, et de fac ¸on plus spécifique, la présence des symptômes atténués en fréquence, durée et intensité. Cet outil a deux objectifs principaux : • évaluer les éléments de psychopathologie possiblement annonciateurs d’un premier épisode psychotique en proposant un entretien semi-structuré avec des amorces pour repérer des manifestations subtiles ; • déterminer si un individu remplit les critères d’état mental à risque (AR) de psychose ou si sa symptomatologie a déjà franchi le seuil de psychose (P). La forme actuelle de la CAARMS évalue la sémiologie en 28 items organisés en sept catégories (Tableau 1). La notion d’état mental AR regroupe trois catégories de sujets : • ceux présentant des symptômes schizotypiques ou étant apparentés au premier degré à une personne souffrant de psychose ; ils sont dits « vulnérables » (V) ; • ceux présentant une « psychose atténuée » (PA) ; • ceux ayant expérimenté un épisode psychotique franc, dont les symptômes ont disparu spontanément dans un délai inférieur à une semaine (BLIPS — brief and limited intermittent psychotic syndrome).

449 Seule la section relative aux symptômes positifs (souséchelles 1,1 à 1,4) est prise en compte afin de déterminer si un sujet est AR de psychose. Pour ces trois conditions, les symptômes doivent être associés à une baisse significative de fonctionnement et les symptômes présents dans l’année précédente. À ce jour, la CAARMS a été traduite en Allemand [29], Japonais [30], Italien [31] et plus récemment en Arabe [32] et en Polonais [33]. Le domaine est resté peu développé en France, notamment du fait du manque d’outils accessibles validés en langue franc ¸aise. L’objectif de ce travail était de valider la traduction en franc ¸ais de la CAARMS dans le contexte d’un programme pilote de repérage précoce des sujets AR. Après traduction de l’entretien, nous avons analysé sa valeur discriminante, sa validité de construction, sa validité concurrente et la fidélité intercotateurs.

Matériels et méthodes Contexte clinique Cette étude a été initiée dans le cadre de la mise en place d’un programme pilote de clinique et de recherche appelé « programme d’évaluation et de prévention des psychoses » (PrEPP), visant à évaluer l’acceptabilité et la faisabilité de l’adaptation des programmes de détection précoces initiés au niveau international au système de soins franc ¸ais. Ce programme a été mis en place au sein du centre d’évaluation pour jeunes adultes et adolescents (C’JAAD) installé au centre médico-psychologique du secteur 14 et à la consultation du service hospitalo-universitaire du centre hospitalier Sainte-Anne, Paris, France. Les évaluations cliniques ont été réalisées par des psychiatres et psychologues (CEK, EM, MK) au sein du centre d’évaluation et de recherche clinique (CERC) en insu de la catégorisation faite par les cliniciens experts (AG, FC) ainsi que celles des témoins recrutés par voie d’annonce.

Participants Trois groupes d’adolescents et adultes jeunes, entre 16 et 35 ans, des deux sexes, adressés au C’JAAD ont été constitués : • sujets cliniquement considérés comme étant « prodromiques » (Prd, n = 15) par un psychiatre expert du centre ; • patients présentant un « premier épisode » psychotique (PEP, n = 10) ; • un groupe de témoins sains (Tem, n = 15) constituant le groupe contrôle, appariés pour l’âge au groupe « premier épisode ». Les critères de non-inclusion des sujets contrôles étaient : consommation de psychotropes depuis plus de cinq ans ou abus de substance, antécédents psychiatriques personnels et familiaux au 2◦ degré. Ces critères étaient vérifiés lors d’un entretien standardisé structuré (diagnostic interview for genetic studies — DIGS [34]). Pour tous les sujets, les critères de non-inclusion étaient :

450

M.-O. Krebs et al.

Tableau 1

La CAARMS, ses sept sous-échelles et 28 items.

1. Symptômes positifs (pris en compte dans le critère d’état mental à risque) 1.1 Troubles du contenu de la pensée 1.2 Idées non bizarres 1.3 Anomalies de la perception 1.4 Discours désorganisé 2. Changement cognitif : attention/concentration 2.1 Changements cognitifs subjectifsa 2.2 Changements cognitifs objectifs 3. Perturbation émotionnelle 3.1 Perturbation émotionnelle subjective 3.2 Émoussement de l’affect observé 3.3 Affect inapproprié observé 4. Symptomes négatifs 4.1 Alogie 4.2 Avolition/apathiea 4.3 Anhédonie 5. Modification du comportement 5.1 Isolement social 5.2 Altération du comportement 5.3 Comportements désorganisés, bizarres, stigmatisant 5.4 Comportement agressif/dangereux 6. Changements physiques/moteurs 6.1 Plaintes subjectives d’altération du fonctionnement moteura 6.2 Changements dans le fonctionnement moteur observé 6.3 Plaintes subjectives d’altération des sensations corporellesa 6.4 Plaintes subjectives d’altération des fonctions végétativesa 7. Psychopathologie générale 7.1 Manie 7.2 Dépression 7.3 Intention suicidaire et automutilation 7.4 Labilité de l’humeur 7.5 Anxiété 7.6 Troubles obsessionnels et compulsifs (toc) 7.7 Symptômes dissociatifs 7.8 Diminution de la tolérance au stress habituela 8. Critères d’inclusion 9. Seuil de psychose 10. Exclusion de l’étude a

Symptôme de base de Huber.

retard mental (QI < 70), difficultés de compréhension et d’expression en langue franc ¸aise, une lésion cérébrale/trouble neurologique ou toute pathologie somatique sévère non équilibrée, une dépendance aux substances. Tous les sujets ont signé un consentement écrit après avoir rec ¸u une information complète sur l’étude. Le relevé des caractéristiques sociodémographiques, de la consommation de substances, des antécédents psychiatriques familiaux et l’évaluation de la schizotypie ont été effectués avec les sections correspondantes de la DIGS. Le niveau de fonctionnement général a été évalué par l’échelle de fonctionnement social et professionnel (EFSP [35]). La symptomatologie du mois passé a été évaluée à l’aide de la brief psychiatric rating scale version 24 items et ancrage pour la cotation des items — BPRS 24EA [35,36].

Caractéristique des groupes cliniques Les trois groupes définis par les cliniciens — sujets prodromiques (Prd), premier épisode psychotique (PEP) et témoins (Tem) — étaient similaires pour le sexe ratio (respectivement 66,7 % d’homme, 80 et 60 %), en revanche l’âge moyen (20,2 ± 3, 23,7 ± 5 et 23,3 ± 5, respectivement) et le niveau d’étude (11 ± 2,2, 13,7 ± 5, 14,9 ± 2) est inférieur pour le groupe Prd comparés aux deux autres groupes. Les trois groupes diffèrent quant à leur consommation de tabac, les témoins fumant moins (25 %) que les groupes Prd (86 %) et PEP (70 %), mais ne diffèrent pas quant à leur consommation d’alcool régulière (en moyenne 25 %), leur expérimentation du cannabis (77,5 %) ou autres substances (32,5 %). Les sujets Prd et PEP étaient similaires en termes de fréquence des antécédents psychiatriques familiaux au 1er degré (60 %), de

États mentaux à risque de transition psychotique Tableau 2

451

Critères d’état mental à risque et psychose selon la CAARMS.

Groupe

Intensité des symptômes psychotiquesa

Fréquence des symptômes psychotiquesa

Durée

Fonctionnement

AR groupe I : vulnérabilitéb

Aucun ou en dessous du seuil (si groupe I seulement) Schizotypie ou histoire familiale de psychose

Aucun ou en dessous du seuil (si groupe I seulement) Si schizotypie : marqueurs traits continus

Si schizotypie : marqueurs traits mais altération significative du fonctionnement (cf. fonctionnement)

AR groupe IIa : psychose atténuée (a) intensité infraliminaire

Présent mais en dessous du seuil : sévérité de 3 à 5 pour items 1.1 & 1.2 ou 3—4 pour item 1.3 ou 4—5 pour item 1.4

Seuil atteint fréquence de 3 à 6c (au moins un item 1.1 à 1.4) pendant une semaine ou fréquence 2 au moins 2 fois (4 fois minimum en tout)

Présents durant les 12 derniers mois

AR groupe IIb : psychose atténuée (b) fréquence infraliminaire

Seuil atteint : sévérité = 6 pour item 1.1-2 et 4 ; ≥ 5 pour item 1.3

Présent mais en dessous du seuil Fréquence = 3 ou moins

Présents durant les 12 derniers mois

AR groupe III : BLIPS Psychose limitée intermittente brève

Seuil atteint sévérité = 6 pour item 1.1-2 et 4 ; ≥ 5 pour item 1.3

Seuil atteint fréquence de 4 à 6c

Moins d’une semaine + disparition spontanée + présents durant les 12 derniers mois

Chute d’au moins 30 % du score de la Sofas par rapport au niveau prémorbide ou score ≤ 50 durant les 12 derniers mois Chute d’au moins 30 % du score de la Sofas par rapport au niveau prémorbide ou score ≤ 50 durant les 12 derniers mois Chute d’au moins 30 % du score de la Sofas par rapport au niveau prémorbide ou score ≤ 50 durant les 12 derniers mois Chute d’au moins 30 % du score de la Sofas par rapport au niveau prémorbide ou score ≤ 50 durant les 12 derniers mois

Psychose

Seuil atteint sévérité = 6 pour item 1.1-2 et 4 ; ≥ 5 pour item 1.3

Seuil atteint fréquence de 4 à 6c

Plus d’une semaine

a Seuls les symptômes psychotiques positifs sont pris en compte pour les critères de psychose atténuée et de BLIPS item de la souséchelle positive : 1.1 : troubles du contenu de la pensée ; 1.2 : idées non bizarres ; 1.3 : anomalies de la perception ; 1.4 : discours désorganisé. b Peut être associé aux autres groupes. En cas de cotation unique, on priorisera le groupe le plus sévère : III > II > I. c Fréquence 2 : une fois par mois jusqu’à deux fois par semaine pendant moins d’une heure à chaque occasion, fréquence 3 = plus d’une fois par mois mais moins de deux fois par semaine si durée des symptômes de plus d’une heure ou trois à six fois par semaine si durée de moins d’une heure ; fréquence 4 : trois à six fois par semaine si durée de plus d’une heure ou quotidiennement si moins d’une heure ; fréquence 5 : quotidiennement plus d’une heure ou plusieurs fois par jour ; fréquence 6 : continuellement.

pourcentage de personnalité schizotypique (86,7 et 60 %), de niveau de fonctionnement global prémorbide (74 ± 8,5 et 75,2 ± 5,6). Le fonctionnement actuel est inférieur chez patients PEP (51,6 ± 7) par rapport aux sujets Prd (38,7 ± 8).

Traduction de la CAARMS La CAARMS est un entretien structuré (60—90 min) organisé en sept sous-échelles. Pour chaque item sont cotées la sévérité, la durée, fréquence et la relation avec une prise de substance ou non, ainsi que la date d’apparition et de fin

des symptômes [27]. En 2006, les auteurs ont individualisé les idées délirantes « bizarres » des idées « non bizarres » et substitué l’échelle globale de fonctionnement par l’échelle de fonctionnement social et professionnel [35] pour évaluer le niveau de fonctionnement. À l’issue de l’entretien, l’investigateur doit remplir les « critères d’inclusion ou d’exclusion » afin de déterminer le statut du sujet selon les critères de cotation de la CAARMS (Tableau 2) : « à risque » (AR) ; « non à risque » (NAR) ; ou « psychotique » (P). À noter, le critère psychose répond à des exigences différentes de la définition du

452 Tableau 3

M.-O. Krebs et al. Scores aux échelles de la CAARMS des groupes cliniques. Tem (n = 15)

Symptômes positifs Changement cognitif Perturbation émotionnelle Symptômes négatifs Changement comportemental Changements physiques/moteurs Psychopathologie générale Score total

2,00 0,67 0,27 2,07 2,20 1,00 6,07 14,27

± ± ± ± ± ± ± ±

Prd (n = 15) 1,60 0,72 0,59 1,87 1,78 1,07 3,61 7,68

7,53 5,00 5,47 8,60 12,20 4,47 16,40 59,67

± ± ± ± ± ± ± ±

PEP (n = 10) 2,42 2,10 2,20 2,64 2,60 2,70 4,72 10,06

13,60 5,90 6,60 10,70 14,70 6,40 19,40 77,30

± ± ± ± ± ± ± ±

1,84 1,45 3,98 3,77 3,02 2,80 6,55 9,63

Tem vs Prd (p)

Prd vs PEP (p)

< 10−3 < 10−3 < 10−3 < 10−3 < 10−3 < 10−3 < 10−3 < 10−3

< 10−3 0,196 0,254 0,077 0,017 0,108 0,120 0,001

Les valeurs sont les moyennes et écart-type. Les valeurs de p sont celles des comparaisons post-hoc (test de Mann Whitney) avec correction de Bonferroni.

DSM-IV-TR : le seuil de psychose est atteint lorsque les symptômes psychotiques sont présents durant plus d’une semaine [19]. La version originale de l’entretien en anglais nous a été transmise par les auteurs. La traduction a été initiée par M.J. Marois (Canada) et P. Conus (Suisse), puis poursuivie par DW et MOK, puis relue par les autres co-auteurs. La rétrotraduction a été faite indépendamment par CE et MK puis soumise aux auteurs. Quelques corrections mineures ont été suggérées et incluses dans la version finale. La version traduite comporte les modifications introduites en 2006 dans la version anglaise. Les investigateurs ont bénéficié d’une formation organisée par les auteurs de la version originale (MK, MOK, EM), y compris pour la mise à jour de 2006 (MK), et d’un support à la cotation par des contacts avec les auteurs. CE a effectué un stage dans un des centres utilisateurs de la version anglaise (OASIS, P. McGuire) Des contacts réguliers ont été établis avec d’autres groupes utilisant la CAARMS dans sa version originale (A. Malla et R. Joober, PEPP, Montréal ; P. Conus, Lausanne).

Analyses statistiques Des tests non paramétriques ont été utilisés pour toutes les comparaisons entre les groupes de sujets ; test du Chi2 pour les variables qualitatives, test de Test de Mann Whitney ou de Kruskal-Wallis pour les variables quantitatives. Le test de Kruskal-Wallis a été suivi de comparaisons des groupes deux à deux avec application de la correction de Bonferroni. Les corrélations ont été réalisées avec coefficient de corrélation de Spearman. La validité discriminante a été étudiée, d’une part, en comparant la classification des sujets issue de la CAARMS à celle faite initialement cliniquement par les cliniciens du centre expert, d’autre part, en comparant le score total et les scores des sous-dimensions de la CAARMS entre les trois groupes tels que définis par l’expert. Nous avons étudié la validité de construction de la CAARMS et de ses dimensions en comparant les scores des groupes issus de la CAARMS (P, AR) obtenus avec une échelle déjà validée, la BPRS 24 E(A) dans ses différentes sous-échelles. Nous avons testé la validité concurrente en examinant les corrélations entre les sous-scores de la CAARMS et les dimensions de la BPRS 24 E(A). Le coefficient de corrélation intra-classes a été utilisé pour mesurer la fidélité inter-cotateurs après

double cotation indépendante par deux évaluateurs entraînés préalablement à la passation de l’entretien.

Résultats Validité discriminante de la CAARMS Les sujets ont été interviewés par les investigateurs qui sont restés en aveugle par rapport à la catégorisation par l’expert clinicien. Dans un premier temps, nous avons examiné la concordance entre les catégories issues de la CAARMS et les catégories telles que déterminées par l’expert clinicien : parmi les 15 sujets identifiés comme étant Prd par l’expert clinicien, 73 % (n = 11) remplissent les critères de sujet « à risque » de la CAARMS (1 vulnérable (V), 10 psychose atténuée (PA), 0 BLIPS), quatre sujets ne remplissent aucun critère ni les critères du « seuil de psychose » (P). Par ailleurs, 100 % des PEP remplissent les critères du « seuil de psychose » et aucun des 15 témoins ne remplit les critères des groupes AR, ni P. Au total, la concordance entre catégories issues de la CAARMS et la catégorisation par l’expert clinicien est de 90 %. Nous avons ensuite examiné si les scores et sous-scores de la CAARMS étaient significativement différents entre les trois groupes cliniques de l’expert. Le détail des scores et sous-scores sont indiqués dans la Tableau 3. Le score total de la CAARMS est significativement différent entre les trois groupes (p < 0,001) : les sujets Prd ont des scores intermédiaires, avec un score significativement moins élevé que les sujets PEP (p < 0,001) et significativement plus élevé que les témoins (p < 0,001). Les trois groupes cliniques diffèrent également pour les sept sous-échelles de la CAARMS. Les analyses post-hoc montrent que les sujets Prd sont significativement différents des Tem pour chaque sous-échelle (p < 0,001). Les Prd se distinguent aussi des sujets PEP, logiquement, sur le score de la sous-échelle 1 « symptômes positifs » (sous-échelle utilisée pour le seuil de psychose, p < 0,001). Les groupes Prd et PEP se distinguent aussi au score de la sous-échelle 5 « changement comportemental » (p = 0,021), du fait d’une différence à l’item « altération du fonctionnement » mais pas aux autres sous-échelles (respectivement, sous-échelle 2 « changement cognitif » : p = 0,13 ; sous-échelle 3, « perturbation émotionnelle » : p = 0,17 ; sous-échelle 4 « symptômes négatifs » : p = 0,052 ;

États mentaux à risque de transition psychotique sous-échelle 6 « changements physiques » : p = 0,07 ; souséchelle 7 « psychopathologie générale » : p = 0,08).

Validité de construction La validité de construction et de ses dimensions a été étudiée en comparant les deux groupes issus de la CAARMS (AR et P) pour les scores et sous-scores obtenus à la BPRS 24 E(A). Le groupe AR a des scores significativement inférieurs (64,45 ± 8,66 vs 75,60 ± 15,95) à ceux du groupe P pour le score total de la BPRS24 E(A) (p = 0,003), pour les items dépression (p = 0,015), euphorie (p = 0,004), mégalomanie (p = 0,001), hallucinations (p = 0,002), désorientation (p = 0,048), excitation (p = 0,01) et hyperactivité locomotrice (p = 0,029) de la BPRS24 E(A). La différence n’atteint pas le seuil de significativité pour les scores aux facteurs positifs et négatifs (respectivement p = 0,11, p = 0,15). Le score au facteur dépressif est similaire entre ces deux groupes (p = 0,71).

Validité concurrente Nous avons examiné la validité concurrente en étudiant la corrélation des scores et sous scores de la BPRS et de la CAARMS. Le score total de la CAARMS est significativement corrélé au score total de la BPRS (r = 0,408 ; p = 0,043). Le score à la sous-échelle « symptômes positifs » de la CAARMS, mais aussi les scores de « perturbation émotionnelle » et « de changement comportemental », sont significativement corrélés au score au facteur « positif » de la BPRS (r = 0,456, p = 0,022 ; r = 0,506, p = 0,01 ; r = 0,666 p = 0,001). Aucune corrélation n’est retrouvée avec le facteur « négatif » ni « dépressif » de la BPRS.

Fidélité inter-cotateur La classification des sujets était 100 % concordante entre les deux investigateurs, remplissant l’échelle de fac ¸on indépendante après avoir interviewé les sujets. Les coefficients de corrélation intra-classe du total de la CAARMS et des souséchelles de symptômes positifs, perturbation émotionnelle, changement comportemental et psychopathologie générale montrent une excellente fidélité (respectivement r = 0,82, 0,75, 0,78, 0,84, 0,83). La corrélation est plus modérée pour les sous-échelles de changement cognitifs, symptômes négatifs et changement physique (respectivement r = 0,39, 0,59, 0,43).

Discussion Le but de cette étude était de valider la version franc ¸aise de l’entretien CAARMS auprès d’une population de jeunes demandeurs d’aide présentant une psychopathologie débutante. La CAARMS est un entretien semi-structuré dédié à l’évaluation des symptômes émergents de la psychose organisée en sept dimensions comprenant 28 items à coter en termes de sévérité, durée, fréquence. À l’issue de l’entretien, les scores obtenus aux items explorant les symptômes positifs (troubles du contenu de la pensée, idées non bizarres, anomalies de la perception, discours désorganisé)

453 permettent de déterminer si le sujet évalué présente une symptomatologie qui atteint le seuil de psychose (P), ou d’état mental « à risque » (AR). Après avoir traduit l’entretien CAARMS de l’anglais au franc ¸ais et validé la traduction auprès des auteurs originaux, nous avons étudié la validité discriminante, la validité de construction et la validité concurrente ainsi que la fidélité inter-cotateur. La traduction n’a pas engendré de difficulté particulière ; les items, en dehors des symptômes de base de Huber, sont relativement similaires à des items présents dans d’autres échelles telles que la BPRS, la PANSS, la MADRS ou l’échelle YMRS. Nous avons également pu nous aider de l’entretien de la BPRS ou de la PANSS en ce qui concerne les définitions et les amorces. La cotation en termes de sévérité et de fréquence apportant une finesse supplémentaire dans la cotation, on peut assimiler l’entretien CAARMS à un entretien BPRS permettant de « zoomer » sur les niveaux les plus faibles de la cotation. Certains items (2.1 troubles cognitifs) sont cotés en fonction de l’appréciation du sujet, d’autres en fonction de l’observation par l’investigateur ou l’entourage (6.2 troubles moteurs). Dans ce cas, la cotation peut varier en fonction de la présence ou non d’un aidant. La classification en termes d’état mental AR ou psychose à l’issue de la CAARMS a été effectuée en insu de l’avis initial de l’expert clinicien. Cette classification était conforme à l’avis de l’expert clinicien dans 90 % des cas, avec une parfaite catégorisation des sujets premier épisode psychotique (100 %) identifiés par la CAARMS comme ayant franchi le seuil de psychose et des témoins dont aucun n’atteint le seuil de sujet à risque. Ce score est globalement excellent. Il est attendu qu’il soit un peu inférieur dans le cadre des patients jugés cliniquement comme étant « prodromiques », l’intérêt de l’utilisation de la CAARMS étant précisément de permettre d’affiner le repérage des sujets à risque. Les patients pour lesquels la classification divergeait étaient de jeunes patients dont la symptomatologie n’atteignait pas les critères AR, bien que présentant quelques symptômes psychotiques négatifs. Aucun ne franchissait le seuil de psychose. Les groupes cliniques définis par l’expert étaient différents pour leurs scores et sous-scores à la CAARMS. Le score total de la CAARMS des sujets Prd est intermédiaire entre Tem et PEP. Les scores de chacune des sept souséchelles sont significativement plus élevés chez les sujets Prd que chez les Tem. En revanche, les sujets Prd et PEP ne se différentient que sur deux sous-échelles : symptômes positifs et changement comportemental (baisse de fonctionnement). Ce résultat confirme la proximité des populations cliniques explorées tout en confirmant la sensibilité de la CAARMS à différentier les catégories cliniques de l’expert sur la sous-échelle positive. Les groupes AR et P, à l’issue de la CAARMS, se différentient significativement pour le score total de la BPRS, ainsi que pour les items positifs de cette échelle, confirmant la validité de construction. La non-significativité des différences aux sous-scores positifs et négatifs est vraisemblablement liée à la taille de l’échantillon. À ce jour, il n’existe pas d’autre échelle de référence disponible en Franc ¸ais permettant le repérage fin des symptômes psychotiques atténués. Nous avons donc fait le choix d’étudier la validité concurrente avec l’échelle

454 BPRS, échelle très largement validée abordant l’essentiel de la symptomatologie psychiatrique. Sa version à 24 items, enrichie en items évaluant les symptômes psychotiques, comporte un entretien et des ancrages pour la cotation, plus proche du mode de cotation de la CAARMS. Le score total de la CAARMS est significativement corrélé à celui de la BPRS 24, de même le score à la souséchelle positive est significativement corrélé au facteur positif de la BPRS. L’absence de corrélation avec le facteur négatif n’est pas réellement surprenante car les symptômes négatifs sont très difficiles à identifier lorsqu’ils sont discrets et l’échelle de la BPRS 24 est peu adaptée à cela. Enfin, nous avons étudié la fidélité entre deux cotateurs ayant interviewé les sujets indépendamment et coté l’échelle en insu l’un de l’autre. La classification des sujets était 100 % concordante entre les deux investigateurs. Le coefficient intra-classe est très fortement corrélé pour quatre des sous-échelles de la CAARMS (dont l’échelle positive) et bien corrélé pour les souséchelles cognitives, négative et changement physique, les symptômes correspondant étant plus difficiles à repérer. Au total, la fidélité inter-cotateur est de très bonne à excellente. Une des principales limites de cette étude est le nombre de sujets recrutés. La méthodologie particulière de cette étude de validation (intervention d’un expert clinicien et de plusieurs interviewers maintenus en insu de) et le choix d’une population suffisamment homogène pour que l’aveugle soit maintenu le plus possible, ont rendu un peu plus difficile le recrutement dans le cours de la pratique clinique. Cependant, les études de validation en langue étrangère ont été réalisées sur des populations similaires et les résultats confirment bien la validation de l’échelle. Aujourd’hui, nous avons utilisé cette échelle sur des échantillons nettement supérieurs en taille (plus de 300 patients) [37,38] et avons pu confirmer la facilité d’utilisation en pratique clinique et sa bonne fidélité inter-cotateur, sous réserve d’une formation spécifique mais brève. En conclusion, nos résultats mettent en évidence l’efficacité de l’outil CAARMS qui est doté d’un bonne validité discriminante et permet de détecter une population présentant une symptomatologie positive atténuée au milieu d’un groupe de sujets composé de sujets sains et d’une population présentant un trouble psychotique débutant. La CAARMS a une bonne validité de construction et concurrente et a une bonne validité inter-cotateur. Notre étude de validation est superposable avec celles menant à la validation des traductions italienne, japonaise et en arabe [28—30]. La CAARMS s’avère être un excellent outil dans le domaine de la recherche, permettant d’envisager des études dans des domaines variés allant de l’étude de l’accès aux soins, des thérapeutiques médicamenteuses ou non, à la recherche des marqueurs prédictifs de transition psychotique. La CAARMS est également un outil utile et pertinent en clinique quotidienne, permettant de guider le clinicien dans sa démarche de prise en charge et facilitant le repérage de symptômes atténués. À l’instar des outils répandus comme la BPRS (notre outil de comparaison) ou encore la PANSS, l’entretien CAARMS permet de faire un réel focus sur la sémiologie fine des symptômes

M.-O. Krebs et al. psychotiques, en particulier mais pas seulement, puisque l’échelle dans sa globalité aborde les différents champs de la psychopathologie (dépression, anxiété, troubles cognitifs, moteurs, etc.). Les scores psychopathologiques relativement élevés des sujets AR, comparables à ceux du groupe « psychose », à la BPRS nous alertent sur le fait que ces jeunes s’adressant à un centre de soins, bien qu’ils ne soient qu’« à risque » de développer une psychose, sont déjà en difficulté et nécessitent une prise en charge adaptée de leurs troubles. Les méta-analyses récentes permettent de clarifier l’adaptation des stratégies thérapeutiques à la situation clinique, notamment en introduisant la notion de « staging » [39,40]. Si à ce jour, le choix des thérapeutiques pour les « états mentaux à risque » n’est pas totalement codifié et reste un domaine de recherche, les expériences dans les études internationales souligne l’importance que la stratégie soit personnalisée en fonction des symptômes et plaintes du sujet, de son environnement mais surtout en fonction du stade de la maladie [39]. La consigne « traitez ce que vous voyez » est la règle, ainsi qu’une grande réserve limitant l’introduction d’antipsychotiques aux situations d’urgence lorsque l’agitation, l’hostilité font courir un risque auto- ou hétéro-agressif. La simple présence de symptômes psychotiques positifs infraliminaires ne suffisent pas en soi à justifier la prescription d’antipsychotique, qui deviennent bien sûr indispensables lorsque ces symptômes deviennent cliniques, patents (en sévérité, fréquence et durée), ou encore lorsque le seuil de psychose de la CAARMS est atteint [39,40]. En revanche, le suivi de type « case management », certains programmes de thérapie comportementale spécifiques ou le traitement de la dépression, lorsqu’elle est cliniquement présente, sont préconisés. L’espoir est de développer des thérapeutiques à visée neuroprotectrice dans l’espoir d’enrayer l’évolution vers la psychose [39,40]. La validation en franc ¸ais et la mise à disposition de cet outil facilitant le repérage de ces symptômes précoces constituent un enjeu majeur afin de pouvoir mettre en place et développer des programmes sur le modèle de ceux développés au niveau international dans les pays francophones dans un champ clinique et de recherche sous tendus par des enjeux majeurs : celui de la détection et l’intervention précoce dans l’espoir d’atténuer voire empêcher la progression des troubles psychotiques.

Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

Remerciements Ce travail a été possible grâce au soutien financier de la fondation MGEN, la fondation Deniker, le réseau RCSSP Inserm « Transition », la Fondation pour la recherche médicale et le PHRC AOM 07 118 « ICAAR ». Nous remercions les Drs A. Yung et P. Mc Gorry de nous avoir confié la traduction de la CAARMS et M.J. Marois, Ph Conus, A. Yung, Ph Mc Guire pour leur soutien et leur participation à la traduction. Nous remercions les patients, leur famille pour leur participation et l’équipe de Prépsy (Dr G. Gozlan) et celle du centre

États mentaux à risque de transition psychotique d’évaluation et de recherche clinique, SHU, CH Sainte-Anne pour leur aide dans l’organisation des rendez-vous.

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[Assessment of mental states at risk of psychotic transition: validation of the French version of the CAARMS].

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