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REVMED-4937; No. of Pages 3

La Revue de médecine interne xxx (2015) xxx–xxx

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Des lésions du visage Facial cutaneous lesions L. Elmachbouh a,∗ , F. Hali a , F. Marnissi b , H. Benchikhi a , S. Chiheb a a b

Service de dermatologie vénéréologie, CHU Ibn Rochd, Casablanca, Maroc Service d’anatomopathologie, CHU Ibn Rochd, Casablanca, Maroc

i n f o

a r t i c l e

Historique de l’article : Disponible sur Internet le xxx Mots clés : Amylose cutanée Chaînes légères Myélome multiple Thalidomide Keywords: Cutaneous amyloidosis Light chains Myeloma Thalidomid

1. L’histoire Un homme, âgé de 62 ans, sans antécédents pathologiques particuliers avait depuis 2 ans un érythème palpébral bilatéral avec des lésions purpuriques diffuses au niveau du corps. Il rapportait un épisode d’hémoptysie et de rectorragie de faible abondance avec des paresthésies des extrémités. L’examen clinique retrouvait un purpura périorbitaire bilatéral symétrique avec des lésions purpuriques non infiltrées punctiformes du visage (Fig. 1) et des lésions pétéchiales et ecchymotiques au niveau du tronc (Fig. 2), des plis inguinaux et du scrotum associés à une fragilité cutanée en regard des lésions purpuriques. L’examen des muqueuses retrouvait des macules ecchymotiques au niveau de la muqueuse jugale et des lésions pseudocondylomateuses en périanal. L’examen des ongles retrouvait des ongles striés, une onycholyse latérale et des hémorragies sous-unguéales filiformes. Le reste de l’examen clinique était sans particularité.

Fig. 1. Purpura périorbitaire avec des lésions purpuriques punctiformes du visage.

2. Le diagnostic ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (L. Elmachbouh).

Une amylose AL.

http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2015.04.005 0248-8663/© 2015 Société nationale française de médecine interne (SNFMI). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Pour citer cet article : Elmachbouh L, et al. Des lésions du visage. Rev Med Interne (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2015.04.005

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Fig. 2. Purpura pétéchial et ecchymotique au niveau du tronc.

3. Les commentaires L’amylose à chaîne légère (AL) est une complication rare et grave des dyscrasies plasmocytaires [1]. Elle peut être en rapport avec une prolifération plasmocytaire occulte ou associée à un myélome multiple [1,2]. Les signes cutanés sont retrouvés dans 20 à 30 % des amyloses AL [2,3]. La biopsie cutanée d’une lésion purpurique objectivait des dépôts éosinophiles hyalins en intradermique prenant une couleur rouge brique après coloration rouge Congo avec une biréfringence en lumière polarisée. Ces éléments histologiques étaient en faveur d’une amylose cutanée. Biologiquement, on retrouvait une hypogammaglobulinémie à l’électrophorèse des protéines avec une diminution du taux d’IgA, M, G et des chaînes légères kappa avec élévation des chaînes légères lambda à l’immuno-électrophorèse des protéines. La protéinurie était à 7,49 g/24 h avec une protéinurie de Bence-Jones positive. Les radiographies du squelette étaient normales excepté la radiographie du crâne qui montrait une image lacunaire à l’emporte-pièce au niveau de l’os pariétal. Le myélogramme retrouvait 39 % de plasmocytes dystrophiques et des hématies en rouleaux. Le bilan d’extension de l’amylose (hépatique, cardiaque, thyroïdien, rénal et surrénalien) était négatif. Seul l’électromyogramme retrouvait un syndrome du canal carpien bilatéral. L’ensemble de ces éléments cliniques, biologiques, histologiques et radiologiques avait permis de retenir le diagnostic d’un myélome multiple avec une amylose cutanée à chaîne légère lambda. Le patient était traité par 4 cycles de chimiothérapie selon le protocole CDT (cyclophosphamide, thalidomide, dexaméthasone) avec un traitement antalgique du syndrome canalaire. Les lésions cutanées étaient stables et la protéinurie de 24 h de contrôle à 0,24 g/24 h avec un recul de 8 mois. L’amylose systémique regroupe un ensemble d’affections hétérogènes dont la caractéristique commune est le dépôt extracellulaire d’une substance amyloïde caractérisée par des protéines fibrillaires insolubles dans les tissus et les organes [1]. L’amylose AL est liée au dépôt extracellulaire de chaînes légères libres d’immunoglobulines monoclonales produites par une population monoclonale de cellules B, le plus souvent plasmocytaire avec

une infiltration médullaire faible, en moyenne de 7 % [3,4], mais environ 40 % des patients ont plus de 10 % de plasmocytes sur le myélogramme. L’évolution vers un myélome symptomatique est rare [5]. L’hémopathie sous-jacente peut également être une maladie de Waldenström ou un lymphome non hodgkinien B. L’isotype de l’immunoglobuline monoclonale étant alors souvent une IgM [5]. Cliniquement, l’amylose AL se manifeste par des ecchymoses et des lésions purpuriques siégeant aux niveaux des paupières, visage, cou, aisselles et de la racine des cuisses. La localisation périorbitaire est pathognomonique. Elles sont le plus souvent secondaires à l’infiltration de la paroi des vaisseaux dermiques par des dépôts de substances amyloïdes [1,6,7]. Des nodules ou des papules jaunâtres peuvent parfois s’observer et confluer pour prendre un aspect pseudosclérodermiforme. Les lésions bulleuses cutanées sont extrêmement rares [1,6,7]. Une alopécie diffuse ou localisée liée à une infiltration du cuir chevelu peut être présente [1]. L’atteinte unguéale est rarement observée dans l’amylose systémique [1,2,6]. Elle peut précéder de plusieurs années les autres signes dermatologiques et être confondue avec une onychomycose ou un lichen [1]. On peut retrouver des atrophies unguéales, une fragilité unguéale, des hémorragies filiformes sous-unguéales, des striations longitudinales, une onycholyse, une anonychie partielle ou complète ou encore des paronychies chroniques [1]. L’atteinte muqueuse intéresse la langue avec la macroglossie [1]. À l’exception du cerveau, tous les organes peuvent être atteints au cours de l’amylose AL systémique et les atteintes cardiaque et rénale conditionnent le pronostic [6]. Dans les amyloses, l’atteinte du système nerveux périphérique et du système neurovégétatif est présente chez environ 20 % des patients [5]. Elle se manifeste le plus souvent par une polyneuropathie sensitive avec des paresthésies à prédominance distale parfois très douloureuses ; l’atteinte du système nerveux autonome est parfois sévère avec une hypotension orthostatique et une gastroparésie. Les neuropathies motrices sont exceptionnelles [6]. Le diagnostic de l’amylose est histologique par la biopsie d’un organe accessible (peau, glande salivaire, rectum) avec la mise en évidence de dépôt éosinophile hyalin prenant une couleur rouge brique après coloration de rouge Congo (biréfringence caractéristique en lumière polarisée). L’étude immunohistochimique sur un fragment congelé permet d’isoler la protéine précurseur en utilisant des anticorps anti-chaînes légères kappa et lambda marqués par un fluorochrome [8]. Le traitement de l’amylose AL associé au myélome est celui du myélome [9]. De récentes avancées thérapeutiques ont permis de transformer le pronostic de la maladie. Le thalidomide, le bortézomib et le lénalidomide pourraient permettre d’augmenter la survie des patients [9]. De nouveaux traitements, agissant directement sur les dépôts d’amylose, devraient permettre une meilleure prise en charge de l’ensemble des amyloses [8]. Le pronostic de l’amylose systémique AL dépend de la présence d’une atteinte viscérale notamment cardiaque et rénale [8,9], et non la prolifération plasmocytaire sous-jacente qui conditionne le pronostic, même si un taux de plasmocytes médullaires supérieur à 10 % semble associé à une moins bonne survie [10]. Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Références [1] Modiani P. Amyloses cutanées. Ann Dermatol Venereol 2005;132:62–70. [2] Wong CK. Mucocutaneous manifestations in systemic amyloidosis. Clin Dermatol 1990;8:7–12. [3] Perfetti V, Palladini G, Merlini G. Immune mechanisms of AL amyloidosis. Drug Discov Today 2004;1:365–73.

Pour citer cet article : Elmachbouh L, et al. Des lésions du visage. Rev Med Interne (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2015.04.005

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Pour citer cet article : Elmachbouh L, et al. Des lésions du visage. Rev Med Interne (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2015.04.005

[Facial cutaneous lesions].

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