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JFO-1163; No. of Pages 8

Journal français d’ophtalmologie (2015) xxx, xxx—xxx

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ScienceDirect www.sciencedirect.com

ARTICLE ORIGINAL

Perforations cornéennes non traumatiques : modalités thérapeutiques夽 Non-traumatic corneal perforations: Therapeutic modalities M. Bouazza a,∗, A. Amine Bensemlali a, M. Elbelhadji a, L. Benhmidoune a, H. El Kabli b, N. El M’daghri c, M. Soussi Abdallaoui d, K. Zaghloul e, A. Amraoui a a

Service d’ophtalmologie adulte, hôpital 20-Août-1953, quartier des hôpitaux, Casablanca, Maroc b Service de médecine interne, CHU Ibn Rochd, quartier des hôpitaux, 1, rue des Hôpitaux, Casablanca, Maroc c Service de microbiologie, CHU Ibn Rochd, quartier des hôpitaux, 1, rue des Hôpitaux, Casablanca, Maroc d Service de parasitologie et de mycologie, CHU Ibn Rochd, quartier des hôpitaux, 1, rue des Hôpitaux, Casablanca, Maroc e Service d’ophtalmologie pédiatrique, hôpital 20-Août-1953, quartier des hôpitaux, Casablanca, Maroc Rec ¸u le 15 juillet 2014 ; accepté le 13 novembre 2014

MOTS CLÉS Perforation cornéenne ; Non traumatique ; Abcès de cornée ; Recouvrement conjonctival ; Patch cornéen autologue

夽 ∗

Résumé Introduction. — Le traitement des perforations non traumatiques de la cornée constitue un véritable challenge aussi bien pour le choix de la technique chirurgicale que pour la gestion de la pathologie causale. Le but de notre travail est de déterminer les résultats anatomiques et fonctionnels de la prise en charge des perforations non traumatiques de la cornée en l’absence d’un accès urgent à la greffe de cornée. Patients et méthodes. — Étude rétrospective d’une série monocentrique de 23 cas consécutifs traités entre janvier 2011 et janvier 2013. Nous avons inclus 23 yeux présentant une perforation cornéenne non traumatique. Différentes techniques chirurgicales ont été utilisées en fonction de la taille et de la localisation de la perforation cornéenne. Résultats. — L’étiologie dominante des perforations cornéennes dans notre série était l’abcès de cornée retrouvé dans 30,4 % des cas (7 yeux). Le recouvrement conjonctival a été réalisé

Le présent travail a été présenté au congrès de la Société franc ¸aise d’ophtalmologie en mai 2014 et a rec ¸u le prix de la francophonie. Auteur correspondant. 18, rue Massa, lot Fatma, Hay Essalam, (ex CIL), Casablanca, Maroc. Adresse e-mail : [email protected] (M. Bouazza).

http://dx.doi.org/10.1016/j.jfo.2014.11.012 0181-5512/© 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Pour citer cet article : Bouazza M, et al. Perforations cornéennes non traumatiques : modalités thérapeutiques. J Fr Ophtalmol (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.jfo.2014.11.012

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M. Bouazza et al. dans 43,5 % des cas (10 yeux) suivi de la tarsorraphie dans 21,7 % des cas (5 yeux), puis du patch cornéen autologue dans 17,4 % des cas (4 yeux) puis de la membrane amniotique dans 13 % des cas (3 yeux) et finalement la colle de cyanoacrylate dans un seul cas. Le recul moyen était de 12,4 ± 2,1 mois. La fermeture anatomique de la perforation a été obtenue dans 91,3 % des cas (21 yeux), tandis que l’acuité visuelle finale n’a pas été améliorée à cause des opacités séquellaires. Discussion. — Le choix de la technique chirurgicale dépend de la taille de la perforation cornéenne, de son siège, de son étiologie et des moyens disponibles aux urgences. Le recouvrement conjonctival est une technique facile et efficace qui constitue une bonne alternative pour fermer les perforations cornéennes de moins de 3 mm lorsque la membrane amniotique et la greffe de cornée sont indisponibles. Il permet d’obtenir une surface oculaire de bonne qualité et de préparer une kératoplastie transfixiante. Conclusion. — Le recouvrement conjonctival est une technique qui reste toujours d’actualité en l’absence de greffon cornéen ou de membrane amniotique. Le taux de succès anatomique est très satisfaisant, mais parfois plusieurs interventions sont nécessaires pour améliorer le pronostic visuel. © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

KEYWORDS Corneal perforation; Non-traumatic; Corneal abscess; Conjunctival flap; Autologous corneal patch

Summary Introduction. — The treatment of non-traumatic perforations of the cornea is a real challenge for the choice of surgical technique as well as for management of the causal pathology. The goal of our study is to determine the anatomical and functional results of the management of non-traumatic perforation of the cornea in the absence of ready access to a corneal graft. Materials and methods. — This is a retrospective, non-comparative monocentric study of 23 consecutive cases diagnosed and treated between January 2011 and January 2013. We included 23 eyes with non-traumatic corneal perforation. Various surgical techniques were used depending on the size and location of the corneal perforation. Results. — The predominant etiology of the corneal perforations in our series was corneal abscess, found in 30.4% of cases (7 eyes). A conjunctival flap was performed in 43.5% of cases (10 eyes) followed by tarsorrhaphy in 21.7% of cases (5 eyes), autologous corneal patch in 17.4% of cases (4 eyes), amniotic membrane in 13% of cases (3 eyes) and finally cyanoacrylate glue in one case. Mean follow-up was 12.4 ± 2.1 months. Anatomical closure of the corneal perforation was achieved in 91.3% of cases (21 eyes), while the final visual acuity was not improved due to secondary opacities. Discussion. — The choice of surgical technique depends on the size of the corneal perforation, its location, its etiology and the resources available for emergencies. When amniotic membrane and corneal donor tissue are unavailable, conjunctival flap is an easy and effective technique, which is a good alternative to close corneal perforations less than 3 mm. It improves ocular surface quality and prepares the eye for later penetrating keratoplasty. Conclusion. — Conjunctival flap is a good technique that is still relevant today, especially in the absence of corneal donor tissue or amniotic membrane. The anatomical success rate is very satisfactory, but sometimes several interventions are needed to improve the visual prognosis. © 2015 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Introduction Les perforations cornéennes représentent une cause importante de morbidité oculaire et de cécité [1,2]. Elles constituent l’étape terminale de l’évolution des processus infectieux et des pathologies immunitaires [3]. Elles nécessitent un traitement chirurgical en urgence pour rétablir l’étanchéité du globe oculaire et prévenir l’endophtalmie. Plusieurs techniques chirurgicales peuvent être utilisées. Certaines sont temporaires, d’autres sont définitives comme

la kératoplastie transfixiante [4]. Le choix de la technique appropriée est guidé par la taille, le siège, l’étiologie de la perforation ainsi que les moyens disponibles aux urgences. Les objectifs de cette étude sont de rapporter et de décrire une série de cas de perforations cornéennes non traumatiques, d’en définir les causes et les modalités de prise en charge dans un centre où l’accès en urgence à des greffes de membrane amniotique et à des greffons cornéens est limité et enfin, de rapporter les résultats anatomiques et fonctionnels des interventions réalisées.

Pour citer cet article : Bouazza M, et al. Perforations cornéennes non traumatiques : modalités thérapeutiques. J Fr Ophtalmol (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.jfo.2014.11.012

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Perforations cornéennes non traumatiques : modalités thérapeutiques

Patients et méthodes Nous avons réalisé une étude rétrospective non comparative d’une série de 23 cas consécutifs pris en charge dans notre service entre janvier 2011 et janvier 2013. Nous avons inclus uniquement les perforations cornéennes non traumatiques. Au total, 23 yeux (23 patients, 13 hommes et 10 femmes) ont été colligés dans cette étude. La moyenne d’âge était de 56,2 ans avec des extrêmes variant entre 17 ans et 75 ans. Pour chaque patient nous avons recensé, l’âge, le sexe, l’acuité visuelle préopératoire, les caractéristiques de la perforation, son étiologie, la technique chirurgicale utilisée ainsi que l’évolution anatomique et fonctionnelle. La durée moyenne du suivi était de 12,4 ± 2,1 mois. Pour la mesure des acuités visuelles inférieures à 1/20e (0,05), une échelle d’équivalence décimale a été utilisée. PL− = 0, PL+ = 0,0001, VBLM = 0,001, CLD à 30 cm = 0,01 et CLD à 1 m = 0,02. La taille de la perforation a été mesurée par la règle millimétrique de la lampe à fente. Concernant la localisation de la perforation, la surface cornéenne a été scindée en 4 zones : une zone centrale de 4 mm, une zone paracentrale entre 4 et 7 mm, une zone périphérique entre 7 et 11 mm et une zone limbique. Tous nos patients ont été opérés en urgence pour fermer la perforation cornéenne. Ensuite, un traitement médical symptomatique (agents mouillants et cicatrisants) et étiologique (antibiotique, antiviral, corticoïdes, antiinflammatoires non stéroïdiens) a été adapté pour chaque patient.

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Le diagnostic étiologique a été réalisé en collaboration avec le service de médecine interne, le service de microbiologie et de parasitologie-mycologie. Les techniques chirurgicales utilisées en urgence sont : le recouvrement conjonctival partiel, la tarsorraphie totale, la greffe lamellaire tectonique ou greffe bouchon à l’aide d’un patch cornéen autologue, la membrane amniotique et la colle de cyanoacrylate. Le recouvrement conjonctival partiel nécessite la dissection minutieuse de la conjonctive à partir du limbe. La capsule de tenon est respectée au maximum. La conjonctive est bien libérée pour pouvoir la glisser sur la perforation cornéenne sans tension. Ensuite, elle est suturée à la cornée et à la sclère par des points séparés au monofilament 10/0 (Fig. 1 et 2). Concernant le patch cornéen, le prélèvement du greffon lamellaire autologue est réalisé à la périphérie de la cornée du même œil, en zone saine, à l’aide d’un couteau creschent. Ses dimensions doivent être équivalentes à celles de la perforation. Les sutures sont réalisées au monofilament 10/0 (Fig. 3). La colle de cyanoacrylate a été utilisée dans les perforations centrales d’un diamètre ≤ 1 mm. On dépose la colle à l’aide d’une canule 27 G avant de placer une lentille thérapeutique. Une bulle d’air permet de former la chambre antérieure (Fig. 4). La greffe de membrane amniotique multicouche. Nous avons utilisé une membrane amniotique sèche coupée en fonction de la taille de la perforation. Elle a été suturée à la cornée par du monofilament 10/0 et la perforation a été

Figure 1. Recouvrement conjonctival. Patiente suivie pour polyarthrite rhumatoïde : a : perforation cornéenne périphérique : leucome adhérent, athalamie, plis de la membrane de Descemet (flèche) ; b et c : après recouvrement conjonctival partiel (lambeau de glissement) ; d : chambre antérieure reformée.

Pour citer cet article : Bouazza M, et al. Perforations cornéennes non traumatiques : modalités thérapeutiques. J Fr Ophtalmol (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.jfo.2014.11.012

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M. Bouazza et al.

Figure 3. Patch cornéen autologue. Entropion cicatriciel sur trachome compliqué de perforation. Sutures en étoile au monofilament 10/0.

comblée par un autre fragment plié en plusieurs couches, finalement la greffe est recouverte par une lentille thérapeutique. La greffe de cornée transfixiante a été réalisée secondairement après la fermeture de la perforation lorsque l’état local le permettait. Le nombre de patients ainsi que l’évolution des greffes transfixiantes secondaires ont été évalués au cours de notre suivi.

Figure 2. Recouvrement conjonctival. Perforation cornéenne centrale sur abcès de cornée : a : perforation cornéenne centrale, issue de vitré ; b : lambeau conjonctival de glissement.

Résultats L’étiologie la plus fréquente de la perforation cornéenne dans notre série est l’abcès de cornée, il a été retrouvé dans 30,4 % des cas (7 yeux), suivie des ulcères immunitaires dans 26,1 % des cas (6 yeux), du syndrome sec dans 21,7 % des cas (5 yeux), des kératites neurotrophiques dans 13,1 %

Figure 4. Perforation cornéenne centrale de 1,5 mm de diamètre chez une femme enceinte (abcès de corné) ; a : utilisation de la colle de cyanoacrylate ; b : chambre antérieure reformée.

Pour citer cet article : Bouazza M, et al. Perforations cornéennes non traumatiques : modalités thérapeutiques. J Fr Ophtalmol (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.jfo.2014.11.012

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Perforations cornéennes non traumatiques : modalités thérapeutiques Tableau 1 Distribution des étiologies des perforations cornéennes. Étiologie

Nombre

%

Abcès de cornée Bactérien Mycosique Germe non retrouvé

7 4 1 2

30,4 17,4 4,3 8,7

Ulcère immunitaire Ulcère de Mooren Polyarthrite rhumatoïde

6 4 2

26,1 17,4 8,7

Syndrome sec Gougerot-Sjögren Rosacée oculaire

5 3 2

21,7 13 8,7

Kératite neurotrophique

3

13,1

Kératite d’exposition Paralysie faciale sévère

2 2

8,7 8,7

des cas (3 yeux) puis des kératites d’exposition dans 8,7 % des cas (2 yeux) (Tableau 1). L’acuité visuelle préopératoire était comprise entre perception lumineuse positive et 2/10. La moyenne était de 0,28 et l’écart-type de 0,53 (Fig. 5). Le siège de la perforation était central dans 47,8 % des cas, paracentral dans 17,4 % des cas, périphérique dans 8,7 % des cas et limbique dans 26 % des cas. La taille moyenne de la perforation était de 2,61 ± 0,77 mm. Dans notre série, le recouvrement conjonctival partiel, technique la plus utilisée, a été réalisé chez 10 patients, soit 43,5 % des cas, il a été indiqué surtout dans les perforations périphériques. La tarsorraphie totale a été réalisée chez 5 patients (21,7 % des cas), tous présentaient une suppuration stromale active ne permettant pas la réalisation de sutures cornéennes. Le patch cornéen autologue a été réalisé chez 4 patients (17,4 % des cas) sur des perforations périphériques de 2 mm à 3 mm. La membrane amniotique a été utilisée chez 3 patients (13 % des cas) dont la perforation cornéenne était inférieure à 2 mm sur un ulcère d’origine inflammatoire. La colle de cyanoacrylate a été utilisée chez un seul patient (4 % des cas), ce dernier présentait une perforation centrale de 1 mm de diamètre.

60

52,1% 50

Pourcentage de paents

43,4% 40 34,8%

30,4%

AV préopératoire

30 21,8%

17,4%

20

AV postopératoire

10

0

AV < CLD

CLD ≤ AV < 1/10

≥ 1/10

Acuité visuelle

Figure 5.

Acuité visuelle préopératoire et postopératoire.

5

En postopératoire immédiat, la fermeture de la perforation a été obtenue dans 91,3 % des cas (21 yeux) et nous avons noté 2 cas d’échec de la fermeture de la perforation à j1 postopératoire. Le premier patient traité par colle de cyanoacrylate a nécessité une réapplication de la colle. Le deuxième patient traité par recouvrement conjonctival a présenté un lâchage des sutures de monofilament 10/0 et a nécessité la reprise des sutures. La fermeture de la perforation a été obtenue dans les deux cas retraités. La moyenne de l’AV finale au terme du suivi était de 0,24 avec un écart-type de 0,41. La comparaison des AV initiales et finales retrouve une différence non significative (p = 0,329) et par conséquent l’AV n’a pas été améliorée malgré la fermeture de la perforation à cause des opacités cornéennes cicatricielles centrales qui ont persisté (Fig. 5). Dans notre série, 4 patients ont bénéficié d’une kératoplastie transfixiante programmée dans un deuxième temps opératoire. Le délai moyen entre la chirurgie initiale et la kératoplastie transfixiante était de 12,5 ± 3,5 mois. Le siège de la perforation cornéenne était central dans les 4 cas et la greffe de cornée transfixiante a fait suite à un recouvrement conjonctival initial dans 3 cas et à l’application initiale de la colle de cyanoacrylate dans un cas.

Discussion Les perforations cornéennes non traumatiques sont des situations rares et graves qui engagent le pronostic anatomique et fonctionnel de l’œil. Elles résultent d’un processus de dégradation tissulaire d’origine inflammatoire ou infectieuse [5]. Dans notre série, nous avons rapporté 23 cas de perforation cornéenne non traumatique en 2 ans, cette faible incidence est retrouvée dans les études de Lekskul et al. (40 cas en 8 ans) [6], de Vasseinex et al. (56 cas en 8 ans) [4] et de Lixin et al. (365 cas en 10 ans) [7]. La moyenne d’âge de nos patients était de 56,2 ans ce qui concorde avec les données de la littérature [4,6,7]. Les étiologies dominantes des perforations cornéennes non traumatiques sont variables en fonction des études (Tableau 2). Dans notre série, l’origine infectieuse, étiologie dominante, était retrouvée dans 30,4 % des perforations, alors que dans la série de Lixin et al. [7] elle était retrouvée dans 80,5 % des cas. Dans la série de Lekskul et al. [6], la kératoconjonctivite sèche était l’étiologie dominante dans 30 % des cas, tandis que dans la série de Vasseinex et al. [4], les ulcères trophiques ont été rapportés dans 42 % des cas. Dans notre série, la fréquence de l’origine infectieuse des perforations pourrait être expliquée par le retard de la prise en charge des abcès de cornée et par la virulence des germes incriminés. Le but du traitement des perforations cornéennes non traumatiques est d’assurer l’étanchéité du globe oculaire. Dans notre série, cet objectif a été atteint dans 91,3 % des cas. Ce bon résultat a été retrouvé dans plusieurs études avec près de 90 % de succès anatomique (Tableau 2) [4,6,8]. Il existe différentes techniques chirurgicales pour refermer les perforations cornéennes non traumatiques. Les indications vont dépendre de la taille et de la localisation de la perforation [3].

Pour citer cet article : Bouazza M, et al. Perforations cornéennes non traumatiques : modalités thérapeutiques. J Fr Ophtalmol (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.jfo.2014.11.012

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Étiologies des perforations cornéennes et techniques chirurgicales utilisées. Lixin et al. [4] (Chine)

Lekskul et al. [2] (États-Unis)

Marcus et al. [5] (Malaisie)

Sharma et al. [18] (Inde)

Solomon et al. [1] (États-Unis)

Vasseinex et al. [3] (France)

Nombre de cas (durée)

23 (2 ans)

341 (10 ans)

40 (6 ans)

296 (20 ans)

41 (1 an)

56 (8 ans)

Moyenne d’âge Étiologie la plus fréquente Technique chirurgicale la plus utilisée

56,8 Infection (30,4 %) Recouvrement conjonctival

— Infection (80,5 %) Kératoplastie transfixiante Kératoplastie lamellaire Greffon hétérologue

65,4 Kératoconjonctivite sèche (30 %) Colle cyanoacrylate

— Infection (53,7 %) Colle cyanoacrylate

69 Ulcère trophique (42 %) Membrane amniotique

Succès anatomique

91,3 %



92 %

51,5 Inflammatoire (23 %) Kératoplastie transfixiante Kératoplastie lamellaire Greffe bouchon Greffon hétérologue —

33 (8,1 ± 5,7 mois) — Inflammatoire (69,7 %) Membrane amniotique

86 %

82,3 %

91 %

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Notre série (Maroc)

M. Bouazza et al.

Pour citer cet article : Bouazza M, et al. Perforations cornéennes non traumatiques : modalités thérapeutiques. J Fr Ophtalmol (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.jfo.2014.11.012

Tableau 2

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Perforations cornéennes non traumatiques : modalités thérapeutiques Dans notre série, le recouvrement conjonctival était la technique la plus utilisée. Cette technique reste toujours d’actualité car elle est efficace, facile à réaliser et permet d’obtenir une surface oculaire de bonne qualité malgré les altérations parfois très importantes de la cornée [9—11]. Cependant, cette technique n’est pas très appropriée dans les perforations cornéennes compliquant les abcès de cornée actifs puisque la suppuration persiste sous le volet conjonctival [12]. Dans les processus infectieux ou inflammatoires, le recouvrement conjonctival est parfois le seul traitement qui permet de diminuer l’inflammation en apportant des cellules anti-inflammatoires [10,11,13] et des substances anti-collagénolytiques [13—15]. Cette technique nécessite le recours à une kératoplastie dans un deuxième temps pour rétablir la transparence cornéenne [16—18]. La colle de cyanoacrylate est indiquée dans les perforations de petite taille [19,20]. Selon Sharma et al. [20], le taux de succès est de 100 % lorsque la taille de la perforation cornéenne est inférieure à 2 mm. Les études de Saini et al. [21] et de Kenyon et al. [22] ont rapporté un taux de succès de 92,5 % et 96 % respectivement. La greffe de membrane amniotique a démontré son efficacité dans la réparation des perforations cornéennes dans plusieurs études [23,24]. Rodriguez-Ares et al. [23] ont rapporté un taux de succès de la greffe de membrane amniotique multicouche dans 73 % des cas pour les perforations de moins de 1,5 mm de diamètre. La greffe de membrane amniotique peut être combinée à la colle biologique avec un taux de succès de 80 % selon Hick et al. [24]. L’effet thérapeutique de la membrane amniotique est dû à sa double action synergique en supprimant, d’une part, les médiateurs de l’inflammation et en favorisant, d’autre part, une épithélialisation rapide de la surface cornéenne avec une bonne récupération fonctionnelle et anatomique permettant ainsi de préparer une kératoplastie ultérieure si nécessaire [5]. Dans notre contexte, nous ne disposons pas de la membrane amniotique dans la banque des yeux de notre pays. Dans notre série, nous avons utilisé des membranes amniotiques sèches importées de l’étranger. Le patch cornéen autologue est utilisé dans les perforations périphériques de moins de 3 mm de diamètre lorsque les autres techniques s’avèrent impossibles à réaliser. Cependant, lorsque l’origine de la perforation est immunologique, le risque d’échec est important [25,26]. Il est donc contre-indiqué en cas de kératite immunitaire de recourir au patch cornéen autologue en raison du fort risque d’induire une nécrose cornéenne du greffon. Dans notre série, les résultats anatomiques des patchs cornéens autologues étaient très satisfaisants et aucune complication n’a été observée. D’autres nouvelles techniques sont en cours d’évaluation. Turner et al. [27] ont rapporté l’utilisation d’un patch scléral autologue chez 9 patients pour fermer des perforations cornéennes périphériques avec un taux de succès de 75 %. Hurtado-Sarrio et al. [28] ont rapporté l’utilisation du Tachosil® (NYCOMED, France) (collagen sponge combined with human fibrin) dans les perforations non traumatiques de la cornée de moins de 3 mm de diamètre. Il s’agit d’une éponge de collagène associée à du fibrinogène humain (5,5 mg) et à de la thrombine humaine (2 UI) que l’on applique sur la perforation cornéenne, sous anesthésie

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topique, directement à la lampe à fente. Au contact de la cornée, les composants du tachosil se dissolvent et forment un revêtement stable et étanche. Cette technique est en cours d’évaluation.

Conclusion Les perforations cornéennes sont dues à plusieurs pathologies infectieuses et inflammatoires. Elles nécessitent la fermeture urgente de la perte de substance cornéenne et le contrôle de la pathologie causale. Le choix de la technique chirurgicale dépend de la taille, de la localisation et de l’étiologie de la perforation ainsi que des moyens à disposition. Les petites perforations répondent bien à la colle de cyanoacrylate, les perforations périphériques peuvent être fermées par un recouvrement conjonctival partiel ou un patch cornéen autologue. Les larges perforations ainsi que les récidives peuvent nécessiter une greffe de cornée transfixiante de première intention. Parfois plusieurs interventions sont nécessaires pour obtenir un succès anatomique et améliorer le pronostic fonctionnel, surtout pour les perforations d’origine immunologique.

Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflit d’intérêt en relation avec cet article.

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Pour citer cet article : Bouazza M, et al. Perforations cornéennes non traumatiques : modalités thérapeutiques. J Fr Ophtalmol (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.jfo.2014.11.012

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Pour citer cet article : Bouazza M, et al. Perforations cornéennes non traumatiques : modalités thérapeutiques. J Fr Ophtalmol (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.jfo.2014.11.012

[Non-traumatic corneal perforations: Therapeutic modalities].

The treatment of non-traumatic perforations of the cornea is a real challenge for the choice of surgical technique as well as for management of the ca...
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