Pour citer cet article : Samama C-M et al., Gestion péri-opératoire des nouveaux anticoagulants oraux, Presse Med (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2013.11.025. en ligne sur / on line on www.em-consulte.com/revue/lpm www.sciencedirect.com

Hématologie/Anesthésie-réanimation

Mise au point

Presse Med. 2014; //: /// ß 2014 Publié par Elsevier Masson SAS.

Gestion péri-opératoire des nouveaux anticoagulants oraux Charles-Marc Samama1, Gilles Pernod2, Pierre Albaladejo3, Pierre Sie4, Groupe d’intérêt en hémostase péri-opératoire (GIHP)

1. Groupe hospitalier Cochin-Broca-Hôtel-Dieu, service d’anesthésie-réanimation, 75014 Paris, France 2. CHU de Grenoble, médecine vasculaire, 38043 Grenoble cedex 9, France 3. CHU de Grenoble, pôle d’anesthésie-réanimation, 38043 Grenoble cedex 9, France 4. CHU de Toulouse, laboratoire d’hématologie, 31059 Toulouse cedex, France

Correspondance : Charles-Marc Samama, Groupe hospitalier Cochin-Broca-Hôtel-Dieu, service d’anesthésie-réanimation, 27 rue du Faubourg Saint-Jacques, 75014 Paris, France. [email protected], [email protected]

Key points Perioperative management of new oral anticoagulants New oral anticoagulants do represent a major step forward as compared to low molecular weight heparins and vitamin K antagonists. Several issues deserve attention regarding their perioperative management. Three (and very soon four or five) active molecules are available on the market, adding to the major intra- and inter-individual variability, to the high number of drug-drug interactions, and to the interferences of renal function and many other parameters. New tests are available including the diluted thrombin time for dabigatran and a specific anti-Xa test for rivaroxaban and apixaban. No antidote is approved yet. Scheduled surgery: the safest suggestion is to mimic the perioperative management of vitamin K antagonist, with a 5-day interruption and low molecular weight heparin bridging whenever necessary.

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Points essentiels Les nouveaux anticoagulants oraux représentent un progrès indiscutable comparativement aux anticoagulants injectables et aux classiques anti-vitamines K (AVK). Un certain nombre d’éléments en complique la gestion quotidienne péri-opératoire. Outre la diversité des molécules déjà ou bientôt disponibles et la variabilité intra- et interindividuelle importante de la réponse, il faut tenir compte des nombreuses interactions médicamenteuses, des variations dans le temps de la fonction rénale et de nombreux autres paramètres. La biologie est disponible avec le temps de thrombine dilué pour le dabigatran et l’anti-Xa spécifique pour le rivaroxaban et l’apixaban. Aucun antidote n’est autorisé en 2014. Pour la chirurgie réglée, une prise en charge calquée sur la gestion péri-opératoire des AVK a été proposée. Elle repose sur une conduite globalisée, quel que soit le produit. Pour l’urgence, ou la survenue d’une hémorragie, des suggestions du Groupe d’intérêt en hémostase péri-opératoire sont proposées.

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Disponible sur internet le :

LPM-2423

Pour citer cet article : Samama C-M et al., Gestion péri-opératoire des nouveaux anticoagulants oraux, Presse Med (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2013.11.025.

C-M Samama, G Pernod, P Albaladejo, P Sie

L’

arrivée de nouveaux anticoagulants oraux (NACO) bouleverse une pratique médicale qui s’appuyait depuis plus de 50 ans sur les anti-vitamines K (AVK), et depuis au moins 25 ans sur les héparines de bas poids moléculaire (HBPM). En 2014, trois de ces nouveaux agents oraux ont globalement terminé leur phase de développement, et ils commencent à être utilisés à large, voire très large échelle. L’arrivée sur le marché du dabigatran (PradaxaW), du rivaroxaban (XareltoW) et de l’apixaban (EliquisW) est sans aucun doute un véritable progrès pour les patients. Le comprimé remplace l’injection post-opératoire d’HBPM en chirurgie de la prothèse de hanche et de genou. Chez les patients traités pour une fibrillation atriale, l’efficacité antithrombotique des NACO est au moins comparable à celle des AVK. Ils sont surtout mieux tolérés (diminution des hémorragies majeures intracrâniennes pour l’ensemble des NACO, et intracrâniennes pour l’apixaban et le dabigatran 110 mg). Seul le dabigatran 150 mg a montré une supériorité sur la warfarine pour les AVC ischémiques sous réserve des limitations méthodologiques (essai en ouvert). Enfin, on peut maintenant traiter une thrombose veineuse et/ou une embolie pulmonaire dès le diagnostic avec une double prise orale de rivaroxaban. . . Beaucoup d’enthousiasme émerge de la part des utilisateurs, et notamment des équipes de cardiologie et de neurologie, qui envisagent le remplacement progressif des AVK et de leur cortège d’effets indésirables. . . Pourtant, ces avantages sont contrebalancés par un certain nombre d’inconvénients pour la pratique quotidienne. Des complications pourraient survenir rapidement si l’on ne définit pas mieux la gestion périprocédurale de ces nouveaux agents. Déjà, des accidents hémorragiques ont été rapportés [1–3].

Propositions pour une procédure programmée L’analyse rétrospective par Healey et al. des données de l’étude RE-LY (dabigatran versus warfarine chez des patients porteurs d’une arythmie complète par fibrillation atriale) montre que durant les deux ans de suivi, environ 25 % d’entre eux ont bénéficié d’une procédure invasive, allant de la pose de pacemaker à la chirurgie majeure en passant par l’endoscopie digestive [4]. C’est une proportion importante de patients traités par des doses thérapeutiques de NACO qui est concernée. Il est donc essentiel de prévoir cet afflux de patients (par projection, d’ores et déjà 25 000 par an en France) et de définir une conduite à tenir. Que faire devant une dose thérapeutique de ces médicaments chez un patient traité pour une fibrillation atriale, une thrombose veineuse profonde ou une embolie pulmonaire ?

Argumentaire

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Les excellents résultats obtenus avec le dabigatran (étude RE-LY) [5], le rivaroxaban (étude ROCKET-AF) [6] et l’apixaban

(étude ARISTOTLE) [7] comparés aux AVK dans l’arythmie complète par fibrillation atriale, et ceux du rivaroxaban pour le traitement des thromboses veineuses et de l’embolie pulmonaire (études EINSTEIN-DVT et EINSTEIN-PE) [8,9], suivis de l’obtention d’autorisations de mise sur le marché, vont très certainement conduire à une augmentation très conséquente du volume de prescription des NACO. Une réflexion s’est établie au sein du Groupe d’intérêt en hémostase péri-opératoire (GIHP), à l’initiative de Pierre Sie et Pierre Albaladejo [10,11]. Un certain nombre d’idées sont résumées ci-dessous. Variabilité inter- et intra-individuelle Il est très difficile de prévoir la demi-vie des NACO car il existe une énorme variabilité inter- et intra-individuelle dans l’effet pharmacodynamique mesurable de ces médicaments. Par ailleurs, leur métabolisme passe par une protéine, la PgP et le cytochrome 3A4. De nombreux médicaments, notamment à visée cardio-vasculaire, interfèrent avec cette protéine et ce cytochrome, induisant ainsi des modifications d’absorption, de métabolisme et de demi-vie. L’âge, la fonction rénale et le poids sont aussi des facteurs confondants. Il est, dès lors, extrêmement compliqué d’essayer de construire un modèle prédictif. En conséquence, décider d’appliquer la même règle pour tout le monde, avec une interruption d’une durée de deux demi-vies, n’est pas réaliste pour les doses thérapeutiques. Antidote Aujourd’hui, il n’existe pas de produits disponibles permettant d’antagoniser l’effet de ces médicaments. Si les concentrés de complexe prothrombinique et les concentrés activés du même complexe (Factor Eight Inhibitor Bypassing Activity - FEIBAW) ont déjà été utilisés chez l’animal [12] et le volontaire sain [13– 15] avec une efficacité sur les tests biologiques, notamment pour les anti-Xa, les données sont contradictoires sur le saignement chez l’animal [16–18] et les données cliniques chez le patient traité sont anecdotiques [19]. Un anticorps spécifique du dabigatran est en cours de développement [20], mais il lui faudra passer par toutes les étapes obligatoires pour obtenir l’AMM. On ne connaît pas son efficacité en cas d’hémorragie, même si les premiers résultats pré-cliniques sont prometteurs. De plus, son coût risque d’être très élevé. Pour les anti-Xa, un facteur Xa modifié est également en cours d’étude avec une vraie efficacité sur l’antagonisation [21], mais, là aussi, plusieurs années d’attente vont être nécessaires avant de disposer de toutes les autorisations. Dialyse La dialyse est possible et partiellement efficace, mais seulement pour le dabigatran [22,23]. Elle nécessite des débits machine assez élevés et va permettre une baisse de 50 à 60 % des concentrations du médicament, avec toutefois une ré-augmentation de l’ordre de 16 % à l’arrêt. Elle ne fonctionne

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Pour citer cet article : Samama C-M et al., Gestion péri-opératoire des nouveaux anticoagulants oraux, Presse Med (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2013.11.025. Gestion péri-opératoire des nouveaux anticoagulants oraux

probablement pas avec les anti-Xa, très liés aux protéines, mais elle n’a pas été testée. Dosage spécifique En ce qui concerne le monitorage, le temps de thrombine dilué (HaemoclotW) pour le dabigatran [24] et l’activité anti-Xa spécifique pour le rivaroxaban [25] et l’apixaban sont réalisables à présent dans la majorité des laboratoires, mais l’interprétation des résultats n’est pas facile. En d’autres termes, les valeurs rendues par le laboratoire ne permettent pas toujours au clinicien de gérer ces médicaments en péri-opératoire. Par ailleurs, si les tests classiques d’hémostase peuvent être modifiés par ces nouveaux produits, ils ne doivent être proposés qu’en l’absence de disponibilité du temps de thrombine dilué pour le dabigatran et de l’activité anti-Xa spécifique pour le rivaroxaban. Par ailleurs, en l’absence d’anti-Xa spécifique pour l’apixaban, le clinicien sera confronté à une situation difficile car le TP et le TCA sont très peu sensibles à l’apixaban.

Propositions Il semble donc qu’il faille globaliser l’ensemble des nouveaux anticoagulants oraux (dabigatran, rivaroxaban, apixaban et bientôt edoxaban), pour simplifier leur gestion péri-opératoire et adopter une seule politique commune.

Avant l’intervention En chirurgie réglée, une interruption des traitements 5 jours avant la procédure semble suffisante au vu de la pharmacocinétique de ces produits. Le dabigatran, dont l’élimination est essentiellement rénale et la demi-vie de 17 heures, n’est (le plus souvent. . .) plus présent dans la circulation plasmatique au-delà des 4 jours. Pour le rivaroxaban, dont la demi-vie varie entre 7 et 13 heures selon l’âge et le statut clinique, le délai est un peu plus court. L’apixaban a, quant à lui, une demi-vie de 10 à 15 heures [26]. Cinq jours d’interruption paraissent donc un délai de sécurité suffisant, sauf peut-être chez les patients insuffisants rénaux modérés (clairance de la créatinine entre 30 et 50 mL/min) traités par dabigatran. Les patients pourraient être gérés en adoptant une stratégie mimant les recommandations de la Haute Autorité de santé française sur les AVK [27]. La même stratification pourrait être proposée mettant d’un côté des patients à risque thrombotique élevé qui vont bénéficier d’un relais par HBPM (deux injections sous-cutanées par jour. . .) et les autres. Il s’agit des patients en arythmie complète avec un score de CHADS  2 ou des patients traités récemment pour un événement thrombo-embolique veineux. Les patients porteurs d’une valve mécanique sont exclus de cette approche car les NACO ne sont pas autorisés ici.

Mise au point

Hématologie/Anesthésie-réanimation

[(Figure_1)TD$IG]

Figure 1 Gestion péri-opératoire des nouveaux anticoagulants oraux (NACO) en chirurgie réglée HBPM : héparine de bas poids moléculaire ; HNF : héparine non fractionnée ; ITV : intervention ; MTEV : maladie thrombo-embolique veineuse.

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D’après [11].

Pour citer cet article : Samama C-M et al., Gestion péri-opératoire des nouveaux anticoagulants oraux, Presse Med (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2013.11.025.

C-M Samama, G Pernod, P Albaladejo, P Sie

[(Figure_2)TD$IG]

Figure 2 W

Chirurgie urgente et dabigatran (Pradaxa ) (dans le cas d’un établissement disposant d’un dosage spécifique de dabigatran) Proposition du Groupe d’intérêt en hémostase péri-opératoire. En cas d’insuffisance rénale sévère, la demi-vie du dabigatran est nettement augmentée. * Il n’est pas possible de déterminer avec précision le délai d’obtention d’un seuil de 30 ng/mL, d’où la mention « jusqu’à 12 h ». ** Ce deuxième dosage peut permettre d’estimer le temps nécessaire à l’obtention du seuil de 30 ng/mL. *** Cette proposition s’applique essentiellement aux situations d’urgence où l’on ne peut pas attendre : (a) CCP = 25–50 UI/kg ou FEIBA = 30–50 UI/kg en fonction de la disponibilité ; (b) pas de données disponibles sur le risque thrombotique de fortes doses de CCP ou de FEIBA, chez ces patients ; (c) l’antagonisation par CCP ou FEIBA ne corrige pas complètement les anomalies biologiques de l’hémostase ; (d) le rFVIIa n’est pas envisagé en première intention.

Pour les autres patients, traités pour un risque thrombotique moins important, l’arrêt simple du traitement anticoagulant oral pendant 5 jours semble suffisant, sans relais par HBPM (figure 1). Enfin, un certain nombre de procédures actuellement réalisées sans interruption des AVK, comme la chirurgie buccodentaire ou la plupart des endoscopies digestives, doivent très probablement pouvoir aussi être réalisées sous NACO, ou après une interruption de 24 heures.

(FEIBA) ont également été testés chez l’animal et chez le volontaire sain avec des résultats variables [15]. Le facteur VII activé recombinant ne semble pas efficace dans ce cadre. Le GIHP a fait des propositions fin novembre 2012 pour la prise en charge des hémorragies graves et de la chirurgie urgente pour des patients bénéficiant d’un traitement par dabigatran ou rivaroxaban dans un schéma curatif (hors prévention en chirurgie orthopédique majeure) [28]. L’absence de données dans

Reprise post-opératoire des NACO Le GIHP propose la reprise à dose prophylactique le soir suivant l’intervention uniquement pour la prothèse totale de hanche et de genou (AMM). Dans les autres cas, une HBPM sera utilisée à dose préventive, jusqu’à ce que l’hémostase chirurgicale soit stabilisée et/ou que le cathéter d’anesthésie locorégionale soit enlevé. Puis, le traitement par NACO à dose curative est ensuite repris, le plus souvent à la 72e heure.

Propositions pour une procédure en urgence ou pour la gestion d’une hémorragie

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De nombreuses questions demeurent, dont celle de l’arrivée en urgence d’un patient traité à dose efficace (dose thérapeutique) avec un nouvel anticoagulant oral. Le dabigatran est dialysable ; ce n’est pas le cas du rivaroxaban et pour l’instant aucun antidote n’est disponible. Les concentrés de complexe prothrombinique pourraient avoir une utilité, surtout pour les anti-Xa (rivaroxaban, apixaban), mais sans preuve formelle. Les concentrés activés du même complexe

Encadré 1 Chirurgie urgente : prise en charge des hémorragies et NACO Proposition du Groupe d’intérêt en hémostase péri-opératoire. Dans tous les cas : Noter : âge, poids, nom du médicament, dose, nombre de prises par jour, heure de la dernière prise, indication. Prélever : 

créatininémie (calculer une clairance selon Cockcroft) ;



dosage spécifique : – temps de thrombine modifié pour dabigatran,

– activité anti-Xa spécifique pour le rivaroxaban. Contacter le laboratoire d’hémostase pour informer du niveau d’urgence et discuter des examens et prélèvements à effectuer. Interrompre le traitement. Une co-médication par de l’aspirine ne change rien au raisonnement, la surveillance postopératoire doit être prolongée

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Pour citer cet article : Samama C-M et al., Gestion péri-opératoire des nouveaux anticoagulants oraux, Presse Med (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2013.11.025. Gestion péri-opératoire des nouveaux anticoagulants oraux

Hématologie/Anesthésie-réanimation

Mise au point

[(Figure_3)TD$IG]

Figure 3 W

Chirurgie urgente et rivaroxaban (Xarelto ) (dans le cas d’un établissement disposant d’un dosage spécifique de rivaroxaban) Proposition du Groupe d’intérêt en hémostase péri-opératoire. * Il n’est pas possible de déterminer avec précision le délai d’obtention d’un seuil de 30 ng/mL, d’où la mention « jusqu’à 12 h ». ** Ce deuxième dosage peut permettre d’estimer le temps nécessaire à l’obtention du seuil de 30 ng/mL. *** Cette proposition s’applique essentiellement dans les situations d’urgence où l’on ne peut pas attendre : (a) CCP = 25–50 UI/kg ou FEIBA = 30–50 UI/kg en fonction de la disponibilité ; (b) pas de données disponibles sur le risque thrombotique de fortes doses de CCP ou de FEIBA ; (c) l’antagonisation par CCP ou FEIBA ne corrige pas complètement les anomalies biologiques de l’hémostase ; (d) le rFVIIa n’est pas envisagé en première intention.

ces situations ne permet pas d’émettre des recommandations, mais seulement des suggestions pour la meilleure gestion possible. Une validation de ces protocoles sera nécessaire. Il est suggéré de doser la concentration plasmatique des médicaments avec le temps de thrombine dilué (HaemoclotW)

pour le dabigatran et l’anti-Xa spécifique pour le rivaroxaban. En l’absence de disponibilité locale de ces tests, il est proposé de définir les conduites à tenir sur la base de tests classiques (TP/TCA). Il s’agit d’une solution dégradée, les tests classiques ne permettant pas d’évaluer réellement les concentrations

[(Figure_4)TD$IG]

Figure 4 W

Chirurgie urgente et dabigatran (Pradaxa )

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Proposition du Groupe d’intérêt en hémostase péri-opératoire. En cas d’insuffisance rénale sévère, la demi-vie du dabigatran est nettement augmentée. Le TQ dénomme le temps de Quick, duquel est dérivé le TP. * Il n’est pas possible de déterminer avec précision le délai d’obtention d’un seuil TCA  1,2 et ratio TQ  1,2 (TP  70–80 %), d’où la mention « jusqu’à 12 h ». ** Cette proposition s’applique essentiellement dans les situations d’urgence où l’on ne peut pas attendre : (a) CCP = 25–50 UI/kg ou FEIBA = 30–50 UI/kg en fonction de la disponibilité ; (b) pas de données disponibles sur le risque thrombotique de fortes doses de CCP ou de FEIBA, chez ces patients ; (c) l’antagonisation par CCP ou FEIBA ne corrige pas complètement les anomalies biologiques de l’hémostase ; (d) le rFVIIa n’est pas envisagé en première intention. Remarque : les TP-TCA peuvent être perturbés pour d’autres raisons que l’anticoagulant. On pourra recourir, dans un second temps, à l’analyse du temps de thrombine (TT), si disponible, qui s’il est normal, permet d’exclure la présence de dabigatran.

Pour citer cet article : Samama C-M et al., Gestion péri-opératoire des nouveaux anticoagulants oraux, Presse Med (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2013.11.025.

C-M Samama, G Pernod, P Albaladejo, P Sie

[(Figure_5)TD$IG]

Figure 5 W

Chirurgie urgente et rivaroxaban (Xarelto ) Proposition du Groupe d’intérêt en hémostase péri-opératoire. Le TQ dénomme le temps de Quick, duquel est dérivé le TP. * Il n’est pas possible de déterminer avec précision le délai d’obtention d’un seuil TCA  1,2 et TP  70–80 %, d’où la mention « jusqu’à 12 h ». ** Cette proposition s’applique essentiellement dans les situations d’urgence où l’on ne peut pas attendre : (a) CCP = 25–50 UI/kg ou FEIBA = 30–50 UI/kg en fonction de la disponibilité ; (b) pas de données disponibles sur le risque thrombotique de fortes doses de CCP ou de FEIBA, chez ces patients ; (c) la réversion par PPSB ou FEIBA ne corrige pas complètement les anomalies biologiques de l’hémostase ; (d) le rFVIIa est une option en dernier recours. Remarque : les TP-TCA peuvent être perturbés pour d’autres raisons que l’anticoagulant. On pourra recourir, dans un second temps, à l’analyse de l’activité anti-Xa, si disponible, qui si elle est normale, permet d’envisager une concentration de rivaroxaban < 30 ng/mL.

[(Figure_6)TD$IG]

Figure 6 W

W

Hémorragie et dabigatran (Pradaxa ) ou rivaroxaban (Xarelto ) (dans le cas d’un établissement disposant d’un dosage spécifique de dabigatran ou rivaroxaban)

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Proposition du Groupe d’intérêt en hémostase péri-opératoire. * Fonction de la disponibilité. Pas de données disponibles sur le risque thrombotique des fortes doses de CCP ou de FEIBA, chez ces patients. ** [ ] signifie concentration. *** CCP = 25–50 UI/kg ou FEIBA = 30–50 UI/kg. Le rFVIIa n’est pas envisagé en première intention.

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Pour citer cet article : Samama C-M et al., Gestion péri-opératoire des nouveaux anticoagulants oraux, Presse Med (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2013.11.025. Gestion péri-opératoire des nouveaux anticoagulants oraux

Hématologie/Anesthésie-réanimation

Mise au point

[(Figure_7)TD$IG]

Figure 7 W

W

Hémorragie et dabigatran (Pradaxa ) ou rivaroxaban (Xarelto ) Proposition du Groupe d’intérêt en hémostase péri-opératoire. * Fonction de la disponibilité. Pas de données disponibles sur le risque thrombotique des fortes doses de CCP ou de FEIBA, chez ces patients. ** CCP = 25–50 UI/kg ou FEIBA = 30–50 UI/kg. Le rFVIIa n’est pas envisagé en première intention.

précises d’anticoagulant. La détermination des seuils hémostatiques est empirique. Ces propositions ne s’appliquent pas à l’apixaban. L’ensemble de la démarche est résumée dans l’encadre´ 1 et les figures 2–7. En fonction de nouvelles données cliniques, ces propositions sont susceptibles d’évoluer. Elles seront mises à jour sur le site du GIHP : http://eurekapro.fr/accueil.

Conclusion Seule l’approche multidisciplinaire peut permettre d’avancer dans ce domaine compliqué. Le progrès indiscutable apporté par les NACO ne doit pas être terni par une mauvaise utilisation au quotidien. Des solutions raisonnables sont proposées ici pour les procédures réglées. Pour l’urgence, les propositions sont beaucoup plus empiriques et peu validées jusqu’à présent. Elles

seront révisables en fonction de l’évolution des connaissances. Du temps va être nécessaire. Un registre national (GIHP-NACO) répertorie actuellement les situations à risque et aidera à la réflexion et à la rationalisation des conduites pratiques. L’effort pédagogique est urgent et immense. Il doit maintenant être délivré par les académiques car, jusqu’à présent et on peut le regretter, les industriels se sont contentés de mettre sur le marché des produits sans en assurer le service après-vente. Déclaration d’intérêts : Charles-Marc Samama : Bayer, BoehringerIngelheim, BMS, Pfizer, Daichii Sankyo, Sanofi, LFB, CSL-Behring, Octapharma, NovoNordisk. Gilles Pernod : Boerhinger-Ingelheim, Bayer, BMS Pfizer, Daichii Sankyo, Baxter, LFB. Pierre Albaladejo : Bayer, Boehringer-Ingelheim, BMS, Pfizer, Sanofi, LFB CSLBehring. Pierre Sié : Sanofi, BMS-Pfizzer, Octapharma, LFB, Boehringer-Inghelheim, Bayer, Daichi-Sanko, Lilly.

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[Perioperative management of new oral anticoagulants].

New oral anticoagulants do represent a major step forward as compared to low molecular weight heparins and vitamin K antagonists. Several issues deser...
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