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PUROL-1264; No. of Pages 7 Progrès en urologie (2014) xxx, xxx—xxx

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ARTICLE ORIGINAL

Impact pronostique de l’envahissement du parenchyme rénal dans la population des tumeurs de la voie excrétrice urinaire supérieure de stade pT3 Pronostic value of parenchyma renal invasion of pT3 upper tract urinary carcinoma M. Bruzzi a,1, C. Le Goux a,∗,1, G. Pignot a, D. Amsellem-Ouazana b, A. Vieillefond c, J.-J. Patard a, M. Zerbib b a

Service d’urologie, hôpital Bicêtre, université Paris-Sud Paris XI, 94270 Le Kremlin-Bicêtre, France b Service d’urologie, hôpital Cochin, université Paris Descartes Paris V, 75014 Paris, France c Service d’anatomopathologie, hôpital Cochin, 75014 Paris, France Rec ¸u le 11 aoˆ ut 2013 ; accepté le 18 d´ ecembre 2013

MOTS CLÉS Tumeur de la voie excrétrice urinaire supérieure ; Récidive ; Survie ; Facteur pronostique

∗ 1

Résumé Introduction. — Les tumeurs des voies excrétrices supérieures (TVEUS) de stade pT3 correspondent à une entité hétérogène regroupant les tumeurs infiltrant le parenchyme rénal, la graisse péri-pyélique et/ou la graisse péri-urétérale. L’objectif de cette étude était d’évaluer l’impact pronostique du type d’infiltration tumorale au sein du groupe des tumeurs de stade pT3. Patients et méthodes. — Il s’agit d’une étude rétrospective, bicentrique, à partir de 205 patients pris en charge pour une TVEUS entre 1998 et 2012. Cinquante-deux patients étaient de stade tumoral pT3, répartis en 3 sous-groupes : envahissement de la graisse péri-urétérale (pT3U, n = 16), envahissement de la graisse péri-pyélique (pT3G, n = 21), ou infiltration du parenchyme rénal (pT3P, n = 15). L’impact du type d’infiltration tumorale sur les survies sans récidive et spécifique a été étudié.

Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (C. Le Goux). Égale contribution.

1166-7087/$ — see front matter © 2014 Publi´ e par Elsevier Masson SAS. http://dx.doi.org/10.1016/j.purol.2013.12.005

Pour citer cet article : Bruzzi M, et al. Impact pronostique de l’envahissement du parenchyme rénal dans la population des tumeurs de la voie excrétrice urinaire supérieure de stade pT3. Prog Urol (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.purol.2013.12.005

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M. Bruzzi et al. Résultats. — La médiane de suivi était de 18,9 mois [6—133,4]. L’analyse univariée comparant le groupe pT3P aux tumeurs pT3U + pT3G mettait en évidence une différence significative en termes de survie sans récidive (p = 0,031) et de survie spécifique (p = 0,026) à la faveur du groupe pT3P qui apparaît alors de meilleur pronostic. En analyse multivariée, le sous-groupe pT3 était un facteur prédictif indépendant en termes de survie sans récidive et de survie spécifique (p = 0,02). Conclusion. — Les tumeurs pT3 de siège pyélo-caliciel envahissant le parenchyme rénal adjacent à la tumeur étaient de meilleur pronostic par rapport à celles envahissant la graisse péri-hilaire ou péri-urétérale. Cette hétérogénéité du groupe pT3 pourrait être prise en considération afin d’améliorer la prise en charge des patients. Niveau de preuve. — 5 © 2014 Publi´ e par Elsevier Masson SAS.

KEYWORDS Upper urinary tract; Urothelial carcinoma; Recurrence; Survival; Prognostic factor

Summary Introduction. — Upper tract urinary carcinoma (UTUC) pT3 tumors are a heterogeneous entity including tumors invading the renal parenchyma, tumors with peripelvic fat invasion or periureteral fat invasion. The aim of this study was to evaluate the prognostic significance of these three different groups of pT3 tumors. Patients and methods. — Between 1998 and 2012, 205 patients with UTUC were operated in two centers, including 52 patients with pT3 tumor stage. pT3 tumors were divided into three groups: peri-ureteral fat invasion (pT3U, n = 16), peripelvic fat invasion (pT3G, n = 21), and renal parenchyma invasion (pT3P, n = 15). The prognostic significance of the type of tumor infiltration was evaluated on specific and disease-free survival. Results. — Median follow-up was 18.9 months [6—133.4]. In univariate analysis, renal parenchyma invasion was associated with a better prognostic in both specific (P = 0.026) and disease-free survival (P = 0.031) compared with peripelvic or peri-ureteral fat invasion. Mutivariate analysis retained the pT3 subgroup as an independant prognostic factor in both specific and disease-free survival (P = 0.02). Conclusion. — pT3 tumors with renal parenchyma invasion had a better prognosis than those with peripelvic or peri-ureteral fat invasion. The heterogeneity of the pT3 group should be taken into account to improve the care of patients. © 2014 Published by Elsevier Masson SAS.

Introduction Les tumeurs de la voie excrétrice urinaire supérieure (TVEUS) sont des tumeurs rares avec une incidence de 1 nouveau cas pour 100 000 habitants par an en France. Elles représentent environ 5 % de l’ensemble des tumeurs urothéliales et peuvent siéger au niveau pyélo-caliciel ou urétéral [1,2]. Parmi les facteurs pronostiques les plus importants, le stade tumoral est défini par le niveau de pénétration de la tumeur dans la paroi [3,4]. De fac ¸on singulière, le stade pT3 correspond à un groupe hétérogène de tumeurs regroupant plusieurs entités distinctes : il peut en effet s’agir de tumeurs de siège pyélo-caliciel envahissant la graisse hilaire péri-pyélique ou le parenchyme rénal, ou de tumeurs de siège urétéral avec infiltration de la graisse péri-urétérale. Cependant la classification TNM actuelle ne différencie pas de sous-groupes au sein de cette population de tumeurs pT3, et les données concernant le pronostic de celles-ci sont peu nombreuses. Il a récemment été évoqué des différences de pronostic entre les différentes sous-populations de tumeurs pT3 selon leur localisation et leur niveau d’invasion (envahissement de la graisse péri-pyélique, envahissement du parenchyme

rénal ou envahissement de la graisse péri-urétérale), mais ces données sont controversées [5—7]. Dans cette étude, nous avons cherché à étudier l’impact pronostique du type d’infiltration tumorale au sein d’une population de patients pris en charge pour une TVEUS de stade pT3.

Patients et méthodes Il s’agit d’une étude rétrospective, bicentrique, portant sur une série de 205 patients pris en charge pour une TVEUS tous stades confondus de localisation urétérale et/ou pyélocalicielle dans les services d’urologie de l’hôpital Cochin et de l’hôpital de Bicêtre entre janvier 1998 et juin 2012. Parmi ces 205 patients, 52 patients (25,4 %) étaient classés en stade tumoral pT3 au terme de l’analyse anatomopathologique définitive. Les dossiers ont été revus rétrospectivement et les données de suivi ont été actualisées. Lorsque la dernière consultation datait de plus de 6 mois, le médecin généraliste et/ou les patients étaient contactés par téléphone. Pour les patients pris en charge avant 2004, une relecture anatomopathologique a été réalisée afin d’uniformiser les

Pour citer cet article : Bruzzi M, et al. Impact pronostique de l’envahissement du parenchyme rénal dans la population des tumeurs de la voie excrétrice urinaire supérieure de stade pT3. Prog Urol (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.purol.2013.12.005

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Impact pronostique de l’envahissement du parenchyme rénal données selon les classifications TNM et de grade en vigueur [8,9]. Concernant l’analyse statistique, les données ont été collectées dans une base de données de type Excel® 2004 version 11.3.6. L’analyse statistique a été réalisée à l’aide du logiciel SEM. Des corrélations cliniques et anatomopathologiques ont été testées. Un intervalle de confiance de 95 % (p < 0,05) était requis pour définir le seuil de significativité statistique. Pour les variables continues (quantitatives), le test t de Student a été utilisé. Pour les variables qualitatives, le test de Chi2 a été utilisé. Une analyse univariée de l’impact du type d’infiltration tumorale sur les survies sans récidive et spécifique a été réalisée selon la méthode de Kaplan-Meier. Les résultats ont été exprimés sous forme de courbes actuarielles de survie. La différence statistique a été testée par le test du Log Rank. Une analyse multivariée selon un modèle multivarié de Cox a été réalisée secondairement en incluant au maximum 3 facteurs prédictifs significatifs en univarié.

Résultats Population Parmi les 205 patients pris en charge pour une TVEUS dans nos deux centres, 52 (25,4 %) étaient de stade tumoral pT3, de haut grade dans tous les cas, avec la répartition suivante : • 16 (30,7 %) avaient une localisation urétérale avec envahissement de la graisse péri-urétérale (groupe pT3U) ; • 21 (40,4 %) avaient une localisation pyélo-calicielle avec envahissement de la graisse péri-pyélique (groupe pT3G) ; • 15 (28,8 %) avaient une localisation pyélo-calicielle avec envahissement du parenchyme rénal isolé (groupe pT3P). Les caractéristiques cliniques et anatomopathologiques de ces 3 sous-groupes sont détaillées dans le Tableau 1. Les 3 groupes étaient comparables en termes d’âge, de sexe, d’antécédents de tumeur de vessie ou de tumeur de vessie synchrone, de multifocalité, de statut N et M, de l’existence de nécrose ou d’emboles vasculaires. À l’inverse, il y avait significativement plus de marges chirurgicales positives (R+, p = 0,0001), plus de carcinome in situ associé (Cis, p = 0,038) et plus de tumeur de type sessile (p = 0,01) dans le groupe pT3U par rapport aux deux autres groupes (Tableau 1).

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Figure 1. Survie sans récidive des tumeurs de la voie excrétrice supérieure pT3g (1), pT3u (2) et pT3p (3), p = 0,074.

et pT3G étant proche, une nouvelle analyse statistique a été réalisée, comparant le groupe pT3P aux tumeurs pT3U + pT3G. Il existait alors une différence significative en termes de survie sans récidive (p = 0,031 ; Fig. 3) et de survie spécifique (p = 0,026 ; Fig. 4) à la faveur du groupe pT3P qui apparaît alors de meilleur pronostic. En analyse univariée, les deux autres facteurs pronostiques significatifs en termes de survie sans récidive et de survie spécifique étaient : la multifocalité tumorale (p = 0,0024 et p = 0,049 respectivement), la base d’implantation sessile de la tumeur (p = 0,018 et p = 0,047 respectivement) et l’existence de marges chirurgicales positives (p < 0,0001 et p = 0,0001).

Analyse multivariée L’analyse multivariée a inclus les facteurs pronostiques retrouvés significatifs en analyse univariée, à savoir les marges chirurgicales positives, la base d’implantation sessile de la tumeur, la multifocalité tumorale et la sousclassification pT3 (pT3U + G versus pT3P). Cette analyse

Données de survie Six patients (11,5 %) ont été perdus de vue au cours du suivi et ont donc été exclus de l’analyse de survie. Les données de suivi et l’analyse de survie ont donc concerné 46 patients. La médiane de suivi était de 18,85 mois [6—133,43]. Au terme du suivi, 21 patients ont eu une récidive (locale [n = 4, 6,5 %] ou métastatique [n = 19, 38,8 %]) et 22 patients sont décédés, dont 21 décès en rapport avec la maladie urothéliale. L’analyse univariée comparant les 3 sous-groupes de fac ¸on séparée ne mettait en évidence aucune différence en termes de survie sans récidive (p = 0,074 ; Fig. 1) ou de survie spécifique (p = 0,082 ; Fig. 2) malgré une dissociation franche des courbes de survie notamment pour le sous-groupe pT3P. Le profil de survie des groupes pT3U

Figure 2. Survie globale des tumeurs de la voie excrétrice supérieure pT3g (1), pT3u (2) et pT3p (3), p = 0,082.

Pour citer cet article : Bruzzi M, et al. Impact pronostique de l’envahissement du parenchyme rénal dans la population des tumeurs de la voie excrétrice urinaire supérieure de stade pT3. Prog Urol (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.purol.2013.12.005

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M. Bruzzi et al. Tableau 1 Caractéristiques clinico-pathologiques des 52 patients pris en charge TVEUS selon la localisation tumorale : pT3 avec envahissement de la graisse péri-hilaire (pT3G), pT3 avec envahissement du parenchyme rénal (pT3P), et pT3 avec envahissement de la graisse péri-urétérale (pT3U). Variables

pT3G graisse péri-hilaire (n = 21)

pT3P parenchyme (n = 15)

pT3U urétère (n = 16)

p

Âge (années) : médiane [écart-type]

70,85 [56,94—85,59]

60,45 [45,82—85,02]

70,65 [45,88—83,33]

0,16a

Sexe Homme Femme

12 (57) 9 (42)

9 (60) 6 (40)

10 (62) 6 (37)

0,95b

Antécédent de cancer de vessie Oui Non

4 (19) 17 (81)

5 (33) 10 (66)

5 (31) 11 (68)

0,57b

Taille de la tumeur : médiane [écart-type] (cm)

5 [1,5—12]

4,25 [2—10]

1,5 [1—3]

0,004a

Multifocalité Unifocale Multifocale

18 (85) 3 (14)

9 (60) 6 (40)

9 (56) 7 (43)

0,10b

Statut N N0 N+

14 (66) 7 (33)

14 (93,3 %) 1 (6,7 %)

9 (56,2 %) 7 (43,8 %)

0,06b

Statut M M0 M+

18 (85) 3 (14)

15 (100 %) 0 (0 %)

13 (81,2 %) 3 (18,8 %)

0,23b

Marges chirurgicales R0 R+

21 (100 %) 0 (0 %)

15 (100 %) 0 (0 %)

9 (56) 7 (43)

0,0001b

Aspect papillaire ou sessile Papillaire Sessile

15 (71) 6 (28)

12 (80) 3 (20)

5 (31) 11 (68)

0,01b

Emboles vasculaires Oui Non

13 (61) 8 (38)

6 (40) 9 (60)

8 (50) 8 (50)

0,42b

Nécrose Oui Non

4 (19) 17 (81)

1 (6) 14 (93)

1 (6) 15 (93)

0,38b

Carcinome in situ (Cis) associé Oui Non

1 (4) 20 (95)

0 (0 %) 15 (100 %)

4 (25) 12 (75)

0,038b

Tumeur de vessie synchrone Oui Non

2 (9) 19 (90)

3 (20) 12 (80)

1 (6) 15 (93)

0,45b

a b

Analyse de variance Anova (avec test d’homogénéité de variance de Bartlett). Test Chi2 .

multivariée a permis de confirmer que les marges chirurgicales positives et le sous-groupe pT3 étaient les seuls facteurs pronostiques indépendants en termes de survie sans récidive et de survie spécifique (p = 0,01 et p = 0,01 respectivement pour les marges, et p = 0,02 et p = 0,03 respectivement pour le sous-groupe pT3 ; Tableau 2).

Discussion Les études concernant les TVEUS sont rendues difficiles par la faible incidence de celles-ci, et les facteurs pronostiques sont mal connus. Le stade tumoral est incontestablement le facteur pronostique le plus fréquemment reporté dans la littérature. Plusieurs études antérieures ont souligné

Pour citer cet article : Bruzzi M, et al. Impact pronostique de l’envahissement du parenchyme rénal dans la population des tumeurs de la voie excrétrice urinaire supérieure de stade pT3. Prog Urol (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.purol.2013.12.005

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Impact pronostique de l’envahissement du parenchyme rénal

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Tableau 2 Analyse multivariée de la survie sans récidive et spécifique des tumeurs de la voie excrétrice supérieure de stade pT3. Variables

Marges positives pT3U + G (versus pT3P) Aspect sessile Multifocalité a

Survie sans récidive

Survie spécifique

Risque relatif

Écart-type

Valeur de pa

Risque relatif

Écart-type

Valeur de pa

3,6 1,86 1,54 0,08

1,23 2,69 0,80 0,15

0,01 0,02 0,04 0,88

3,2 1,94 1,74 0,08

1,41 2,51 1,94 0,12

0,01 0,03 0,06 0,90

Modèle de Cox.

Figure 3. Survie sans récidive des tumeurs de la voie excrétrice supérieure pT3p (1) versus autres (2 = pT3u + pT3g), p = 0,031.

l’hétérogénéité du groupe des tumeurs pT3 qui correspond probablement à plusieurs entités anatomopathologiques distinctes [6,7,10]. Le groupe des tumeurs pT3U est probablement le plus soumis à controverse. En effet, la localisation urétérale peut avoir à elle-seule un impact pronostique indépendamment du stade. Si Mazeman ne mettait en évidence aucune

Figure 4. Survie globale des tumeurs de la voie excrétrice supérieure pT3p (1) versus autres (2, pT3u + pt3g), p = 0,026.

différence de survie en fonction de la localisation tumorale [11], les études plus récentes semblent indiquer que les tumeurs urétérales ont une évolution plus défavorable que les tumeurs pyélo-calicielles [10,12]. Ceci pourrait être en rapport avec la faible épaisseur de la paroi urétérale sans couche musculaire macroscopiquement identifiable à ce niveau, favorisant une dissémination cellulaire plus rapide et de survenue plus précoce au cours de l’histoire naturelle de la maladie urothéliale [10,13]. Cependant, aux regards des données fournies par nos courbes de survie, si l’atteinte de la graisse péri-urétérale est sans doute plus précoce, elle ne semble pas impacter de fac ¸on significative sur le pronostic final par rapport à un envahissement de la graisse péri-hilaire à partir d’une tumeur de siège pyélo-caliciel. En effet, il n’y avait pas de différence significative en termes de survie sans récidive et de survie spécifique entre les groupes pT3G et pT3U dans notre étude. À l’inverse, pour les tumeurs de siège pyélo-caliciel, l’envahissement du parenchyme rénal adjacent à la tumeur apparaît comme un facteur de bon pronostic par rapport à un envahissement de la graisse péri-hilaire ou péri-urétérale. Ces résultats sont conformes à ceux des précédentes études qui suggèrent également un meilleur pronostic des tumeurs pT3P, plus particulièrement en cas d’envahissement superficiel [5—7]. Yoshimura et al. ont divisé les tumeurs pT3P en 2 groupes selon le degré d’invasion parenchymateux. L’infiltration tumorale était considérée comme superficielle si elle ne dépassait pas 5 mm à partir de la membrane basale. Elle devenait alors extensive au-delà de cette limite. Les auteurs ont rapporté un pronostic significativement meilleur du groupe avec infiltration parenchymateuse superficielle [7]. Wu et al. ont également rapporté en 2007 que les patients atteints de TVEUS de stade pT3 avec infiltration superficielle du parenchyme rénal, avaient un meilleur pronostic. En effet, ce groupe de patients avait une survie spécifique et une survie sans récidive significativement plus élevées que le groupe avec infiltration extensive du parenchyme, le groupe pT3U et le groupe pT3G. L’existence d’une invasion vasculaire microscopique était par contre un élément de mauvais pronostic au sein de cette sous-population, avec un risque métastatique majoré [6]. Plus récemment, Roscigno et al. ont confirmé que le degré d’infiltration du parenchyme rénal était un facteur pronostique majeur [14]. Le bon pronostic des tumeurs pT3P peut s’expliquer par cette théorie de la « barrière protectrice » du parenchyme rénal, qui agirait comme une palissade contre la

Pour citer cet article : Bruzzi M, et al. Impact pronostique de l’envahissement du parenchyme rénal dans la population des tumeurs de la voie excrétrice urinaire supérieure de stade pT3. Prog Urol (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.purol.2013.12.005

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M. Bruzzi et al.

dissémination de la maladie urothéliale [5]. Les tumeurs infiltrant le parenchyme ne sont en effet pas en contact direct avec les voies de dissémination hématogène et lymphogène. À l’inverse, on peut facilement comprendre que les tumeurs infiltrant la graisse péri-hilaire ou périurétérale soient plus agressives du fait d’une dissémination vasculaire et lymphatique immédiate. De ce fait, il a été proposé par plusieurs auteurs [6,7] que les tumeurs de stade pT3P (avec envahissement parenchymateux superficiel tout au moins) puissent être reclassées dans un stade tumoral inférieur et devraient plutôt être considérées comme des tumeurs de stade pT2 notamment dans la prise en charge postopératoire. À l’inverse, les tumeurs pT3 les plus agressives (à savoir les tumeurs avec infiltration de la graisse péri-hilaire ou péri-urétérale) pourraient justifier d’un traitement adjuvant, après discussion en réunion de concertation pluri-disciplinaire, en tenant compte de leur risque accru de récidive et de leur impact avéré sur la survie spécifique. Il n’existe cependant pas de preuve actuelle d’un éventuel bénéfice de la chimiothérapie adjuvante dans cette indication, en l’absence d’essai clinique prospectif de phase III. Plusieurs études rétrospectives laissent cependant suggérer un bénéfice en termes de survie pour les tumeurs localement avancées [15—17]. Czito et al. ont rapporté le bénéfice de la radio-chimiothérapie concomitante (chimiothérapie à base de cisplatine) sur la survie à 5 ans des patients avec TVEUS localement avancées et opérées (T ≥ 3 et/ou N + ) [18]. Il existe bien sûr une toxicité globale à prendre en considération. Le niveau de preuve est faible et cette conduite ne peut être recommandée pour l’instant en pratique courante. Le fait de classer les tumeurs pT3G en pT3a et les tumeurs pT3U en pT3b repose d’avantage sur des études récentes dans lesquelles le pronostic défavorable de la localisation urétérale par rapport à la localisation pyélo-calicielle avait été démontré [19]. L’une des principales limites de notre étude est le faible effectif ; en effet, malgré le caractère bicentrique de cette série, nous n’avons pu rassembler que 52 patients de stade pT3. De ce fait, il n’a pas été possible de faire ressortir des résultats significatifs lorsque l’analyse statistique incluait les 3 groupes de fac ¸on séparée, probablement du fait d’un manque de puissance. De même, nous n’avons pas pu analyser plus précisément le groupe des tumeurs pT3P en tenant compte de la profondeur d’invasion du parenchyme rénal, comme cela a pu être réalisé par les équipes de Wu et Yoshimura [6,7] car ces données anatomopathologiques n’étaient pas disponibles. Le caractère rétrospectif est également une limite et il serait sans doute judicieux d’envisager une étude multicentrique à large effectif à partir d’un recueil prospectif pour confirmer ces données.

Conclusion Le groupe des tumeurs de stade pT3 correspond à une entité hétérogène. L’existence d’une infiltration du parenchyme rénal semblait être associée à un meilleur pronostic, ce d’autant qu’il s’agissait d’un envahissement superficiel. La prise en charge thérapeutique des pT3 doit également tenir compte de ces constatations.

Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

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Pour citer cet article : Bruzzi M, et al. Impact pronostique de l’envahissement du parenchyme rénal dans la population des tumeurs de la voie excrétrice urinaire supérieure de stade pT3. Prog Urol (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.purol.2013.12.005

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Impact pronostique de l’envahissement du parenchyme rénal [18] Czito B, Zietman A, Kaufman D, Skowronski U, Shipley W. Adjuvant radiotherapy with and without concurrent chemotherapy for locally advanced transitional cell carcinoma of the renal pelvis and ureter. J Urol 2004;172:1271—5.

7 [19] Le Goux C, Pignot G, Amsellem-Ouazana D, Viellefond A, Peyromaure M, Flam T, et al. Impact pronostique de la localisation urétérale dans les tumeurs de la voie excrétrices supérieures. Prog Urol 2013;23:399—404.

Pour citer cet article : Bruzzi M, et al. Impact pronostique de l’envahissement du parenchyme rénal dans la population des tumeurs de la voie excrétrice urinaire supérieure de stade pT3. Prog Urol (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.purol.2013.12.005

[Pronostic value of parenchyma renal invasion of pT3 upper tract urinary carcinoma].

Upper tract urinary carcinoma (UTUC) pT3 tumors are a heterogeneous entity including tumors invading the renal parenchyma, tumors with peripelvic fat ...
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