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A.-S. Gassmanna, A. Kocha,*, E. Boudiera, G. Averousb, N. Sananesa, I. Nisanda, F. Schneiderc, B. Langera a De´partement de gyne´cologie-obste´trique, hoˆpital de Hautepierre, hoˆpitaux universitaires de Strasbourg, 67100 Strasbourg, France b De´partement d’anatomie et de cytologie pathologiques, hoˆpitaux universitaires de Strasbourg, 67100 Strasbourg, France c Service d’anesthe´sie re´animation me´dicale, hoˆpital de Hautepierre, hoˆpitaux universitaires de Strasbourg, 67100 Strasbourg, France *Corresponding author. E-mail addresses: [email protected] (A.-S. Gassmann), [email protected] (A. Koch), [email protected] (E. Boudier), [email protected] (G. Averous), [email protected] (N. Sananes), [email protected] (I. Nisand), [email protected] (F. Schneider), [email protected] (B. Langer). Received 9 September 2014 Available online 21 April 2015 http://dx.doi.org/10.1016/j.gyobfe.2015.03.025

La ce´sarienne vaginale doit-elle toujours se pratiquer ? Shall vaginal caesarean section still be practiced? La ce´sarienne vaginale ou ope´ration de Du¨hrssen est une technique obste´tricale tre`s peu utilise´e. Bien que re´pute´e simple a` re´aliser, elle effraie de nombreux gyne´co-obste´triciens. D’ailleurs, la transmission de la connaissance aux plus jeunes n’est quasiment plus assure´e. On la retrouve pourtant cite´e, voir de´crite, dans la plupart des livres traitant de l’obste´trique et de ses techniques. Sa paternite´ est attribue´e a` Du¨hrssen en 1895 [1]. Nous essayerons a` travers un report de cas de montrer que la ce´sarienne vaginale garde une place inte´ressante dans certaines indications. 1. Observation Madame D., 31 ans, deuxie`me geste primipare, a consulte´ a` 22+3 semaines d’ame´norrhe´es (SA) aux urgences pour douleurs

abdominopelviennes et me´trorragies. Elle n’avait aucun ante´ce´dent me´dico-chirurgical. Elle a accouche´ par voie basse spontane´e a` terme d’un garc¸on en bonne sante´ de 3310 grammes, quatre ans auparavant. La grossesse ne posait aucun proble`me particulier. Elle est de groupe sanguin O+. La patiente ne prenait aucun traitement ni toxique. Les constantes cliniques e´taient normales (TA = 120/70, pouls = 80 battements par minute), la bandelette urinaire ne re´ve´lait pas de prote´inurie. La hauteur ute´rine e´tait conforme, mais l’ute´rus e´tait « tendu », les me´trorragies e´taient en quantite´ mode´re´e, de sang rouge fonce´. Le toucher vaginal objectivait un col mi-long, en position interme´diaire, ferme´. L’examen au spe´culum confirmait l’origine ute´rine des pertes sanguines. L’e´chographie retrouvait un fœtus sans activite´ cardiaque, eutrophe (poids fœtal estime´ a` 577 g) en pre´sentation ce´phalique, une quantite´ de liquide amniotique normale, le placenta e´tait poste´rieur non bas inse´re´ avec une image he´te´roge`ne de 80 mm sur 75 mm fortement e´vocatrice d’un he´matome re´troplacentaire. Le bilan biologique re´alise´ objectivait une ane´mie normocytaire mode´re´e (Hb = 9,8 g/dL), une hyperleucocytose, une thrombope´nie mode´re´e (plaquettes = 90 G/L), un TCA allonge´ avec un ratio a` 3,16, une fibrinolyse majeure avec un fibrinoge`ne indosable, un TP infe´rieur a` 10 %, un facteur V a` 12 %. Devant le diagnostic de coagulation intravasculaire disse´mine´e (CIVD) se´ve`re, les premie`res mesures de re´animation me´dicale ont e´te´ de´bute´es (transfusion de deux culots de plasma frais congele´ (PFC), d’un concentre´ plaquettaire et d’un flacon de fibrinoge`ne humain). Face a` l’instabilite´ he´modynamique maternelle rapidement croissante (TA = 80/50, pouls = 120 battements par minute), l’e´vacuation chirurgicale de la grossesse a e´te´ de´cide´e : une ce´sarienne par voie abdominale exposant a` un risque he´morragique important du fait de la se´ve´rite´ de la CIVD, une ce´sarienne vaginale pour sauvetage maternel a e´te´ pre´fe´re´e. La ce´sarienne vaginale fut re´alise´e sous anesthe´sie ge´ne´rale, selon la technique de Du¨hrssen modifie´e par Schauta (technique re´sume´e dans le Tableau 1). La de´livrance artificielle a retrouve´ un volumineux he´matome confirmant le diagnostic d’he´matome re´troplacentaire. Une re´vision ute´rine a e´te´ re´alise´e. Le temps de re´fection n’a pose´ aucun proble`me. En fin d’intervention, le globe ute´rin e´tait tonique et l’he´mostase satisfaisante. La patiente a ensuite e´te´ mute´e dans le service de re´animation. Au total, la patiente a rec¸u 5 PFC, 6 concentre´s globulaires, 2 flacons de fibrinoge`ne humain et 1 concentre´ plaquettaire. Les suites post-ope´ratoires ont e´te´ simples au niveau clinique et biologique. La patiente est sortie a` j4 avec un traitement pre´ventif par he´parine de bas poids mole´culaire (HBPM) et la poursuite d’une antibioprophylaxie pendant 7 jours. Le compte-rendu anatomo-pathologique du placenta confirmait l’existence d’un he´matome re´troplacentaire. Tableau 1 Principaux temps ope´ratoires de la ce´sarienne vaginale selon la technique de Du¨hrssen modifie´e par Schauta. Principaux temps ope´ratoires Incision sagittale me´diane du col et du vagin De´collement ve´sico-ute´rin Exposition du segment infe´rieur Hyste´rotomie/incision du segment infe´rieur* (doit eˆtre strictement verticale pour eˆtre peu he´morragique et remonter jusqu’au cul-de-sac pe´ritone´al, sans l’inciser) Extraction fœtale, de´livrance et re´vision ute´rine Suture du segment infe´rieur Suture du vagin ante´rieur Nous de´crivons ici la technique classique au 3e trimestre de la grossesse lorsque le segment infe´rieur est forme´. *La technique reste re´alisable a` des termes plus pre´coces comme dans notre cas, l’incision est alors isthmo-corpore´ale. L’hyste´rotomie de´pend du terme auquel on ope`re : courte au 2e trimestre (4–5 cm), elle est beaucoup plus e´tendue au 3e trimestre (9–10 cm) (segment infe´rieur forme´).

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A` huit mois de l’intervention, la patiente a be´ne´ficie´ d’une hyste´rosalpingographie et d’une hyste´roscopie diagnostique qui n’ont pas montre´es de complication (absence de be´ance cervicoisthmique et de syne´chie ute´rine). Le bilan he´matologique re´alise´ a mis en e´vidence une thrombophilie conge´nitale par mutation du facteur V Leiden he´te´rozygote et la pre´sence mode´re´e d’anticorps anti-phospholipides (titre : 40 unite´s). Une troisie`me grossesse sous acide ace´tylsalicylique 160 mg/j s’est solde´e par une fausse couche spontane´e pre´coce a` 10+3 SA. Elle a de´marre´ une quatrie`me grossesse sous acide ace´tylsalicylique 160 mg/j et HBPM a` dose curative. Une ce´sarienne prophylactique a` 38 SA pour pre´sentation du sie`ge a abouti a` la naissance d’un garc¸on de 2940 grammes en parfaite sante´.

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dystocies cervicales (re´fection cervicale de´ficiente), pe´ritonites (a priori en rapport avec l’ouverture de la cavite´ pe´ritone´ale, fre´quente dans la variante de´crite par Brindeau [trache´lotomie poste´rieure]), et enfin les dyspareunies (exceptionnelles) [4]. La ce´sarienne vaginale est une technique se´duisante a` bien des e´gards et nous pensons qu’elle est trop peu utilise´e. Les indications sont, certes, assez exceptionnelles. De nos jours, l’indication princeps est l’extraction d’un fœtus mort in utero ge´ne´ralement pour sauvetage maternel et cela, en absence de dilatation cervicale ou lors de l’apparition d’un syndrome he´morragique grave. Il s’agit ˆ re, rapide, aux suites post-ope´ratoires simples, d’une technique su dans la mesure ou` les conditions anatomiques sont favorables. Son caracte`re exceptionnel empeˆche malheureusement l’enseignement aux plus jeunes.

2. Discussion De´claration d’inte´reˆts La bibliographie sur le sujet est rare et la majorite´ des articles sont anciens. Il s’agit d’une technique peu utilise´e et donc peu enseigne´e aux plus jeunes [2,3]. A` partir de 1987, cette technique retrouve un certain essor dans la pratique obste´tricale du CHU de Grenoble sous l’impulsion du Professeur Racinet : dans sa the`se de me´decine de 1992, Muet rapporte pour le service une fre´quence de 0,9% accouchements [4]. Dans son re´pertoire de chirurgie gyne´cologique par voie vaginale, Dargent rapporte 4 observations recueillies en l’espace de 14 ans ! (1970 a` 1984) [5]. Tous les auteurs s’accordent pour dire que les indications restent exceptionnelles. L’indication ide´ale e´tant l’e´chec de de´clenchement pour interruption me´dicale de grossesse et l’absence d’e´vacuation fœtale en cas de mort fœtale in utero (MFIU), notamment devant l’apparition ou l’aggravation d’un syndrome he´morragique grave avec troubles de l’he´mostase [6,7]. Cette technique pre´sente bien des avantages qui justifieraient son enseignement. Elle est peu he´morragique compare´e a` une ce´sarienne abdominale. [7]. Elle garde donc un inte´reˆt certain dans les cas ou` existent des troubles se´ve`res de l’he´mostase rendant une extraction fœtale ne´cessaire [8] comme dans notre cas. Il s’agit d’une technique sure, rapide aux suites ope´ratoires simples, comparables a` celles d’un accouchement simple par les voies naturelles [2,3,8]. Par ailleurs, le pronostic obste´trical ulte´rieur n’est pas entrave´, les patientes peuvent, en dehors des contre-indications habituelles, accoucher par voie basse [9]. Enfin, elle ne laisse pas de cicatrice « visible ». Aujourd’hui, la place de la ce´sarienne vaginale dans le cadre d’un enfant vivant n’est plus admise [8,10]. Bien que l’intervention ait e´te´ re´alise´e avec succe`s sur des enfants vivants (meˆme a` terme) [7,8], la mortalite´ ne´onatale retrouve´e dans certaines se´ries anciennes e´tait e´leve´e (de 24 a` 33 %) [9]. Des crite`res d’acceptabilite´, qui restent discutables, ont ne´anmoins e´te´ de´finis sur des fœtus morts : terme infe´rieur a` 32 SA, BIP infe´rieur a` 80 mm, estimation du poids fœtal (EPF) infe´rieure a` 2500 grammes [10]. La disproportion fœto-pelvienne repre´sente une contre-indication absolue car l’extraction fœtale doit se faire par manœuvres manuelles ou instrumentales par les voies naturelles. Les complications imme´diates classiquement de´crites sont les plaies ve´sicales et le risque he´morragique. Les plaies ve´sicales seraient dues a` une incision insuffisante du segment infe´rieur. Leur fre´quence serait de 2 a` 5 %. Le risque he´morragique serait conse´cutif a` une plaie des pe´dicules cervico-vaginaux par une incision late´ralise´e s’e´cartant de la zone avasculaire ou par dilace´ration du segment infe´rieur lors de l’extraction fœtale. La fre´quence est estime´e entre 2 et 8 % [8]. Ne´anmoins, si cette technique est simple, l’ope´rateur doit avoir l’expe´rience de la chirurgie vaginale. La complication a` distance la plus classiquement de´crite est la be´ance cervico-isthmique [9]. Il est d’usage de faire re´aliser a` la patiente une hyste´rosalpingographie au moins 6 mois apre`s l’intervention. D’autres complications ont e´te´ de´crites : les

Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article. Re´fe´rences [1] Malinas Y, Harris A. Les indications de la ce´sarienne vaginale. Rev Fr Gynecol Obstet 1957;52(11–12):401–10. [2] Riethmuller D, Schaal JP, Racinet C. Techniques de la ce´sarienne. In: Schaal JP, Riethmuller D, Maillet R, Uzan M, editors. Me´canique et techniques obste´tricales. Sauramps me´dical; 2007. p. 733–46. [3] Lansac J, Pierre F. La ce´sarienne. In: Lansac J, Marret H, Oury JF, editors. Pratique de l’Accouchement. Masson; 2006. p. 449–74. [4] Muet F, Racinet C. La ce´sarienne vaginale : casuistique de l’hoˆpital Sud de Grenoble de 1975 a` 1992. Grenoble: universite´ Joseph Fourier; 1992 [the`se]. [5] Dargent D. Re´pertoire de chirurgie gyne´cologique par voie vaginale. Lyon: Ediprim; 1986. p. 649–57. [6] Judlin P, Muhlstein J, Lamy C, Morel O. Les sutures lors de la ce´sarienne. In: Colle`ge national des gyne´cologues et obste´triciens franc¸ais : mise a` jour en gyne´cologie et obste´trique tome XXXIV. Vigot; 2010. p. 413–20. [7] Le Thai N, Darbois Y, Lefebvre G, Soudre G, Vauthier-Brouzes D, Fitoussi A, Clough K. La ce´sarienne vaginale, une ne´cessaire re´habilitation. J Gynecol Obstet Biol Reprod 1993;22(2):197–201. [8] Ploteau S, Esbelin J, Philippe HJ. Ce´sariennes atypiques. In: Colle`ge national des gyne´cologues et obste´triciens franc¸ais : mise a` jour en gyne´cologie et obste´trique tome XXXII. Vigot; 2008. p. 379–98. [9] Salvat J, Malinas Y. Ce´sariennes vaginales. Rev Fr Gynecol Obstet 1988;83(6): 423–6. [10] Dumont A, De Bernis L, Wade F, Uzan S, Darbois Y. La ce´sarienne vaginale dans les morts fœtales in utero. J Gynecol Obstet Biol Reprod 1996;25(6):623–8.

E. Noblot, T. Raia-Barjat De´partement d’obste´trique et gyne´cologie, hoˆpital Nord, CHU Saint-E´tienne, avenue Albert-Raimond, 42270 Saint-Priest-en-Jarez, France (E. Noblot) G. Noblot Service de grossesse pathologique, hopital Femme-Me`re-Enfant, 59, boulevard Pinel, 69677 Bron, France C. Chauleur* De´partement d’obste´trique et gyne´cologie, hoˆpital Nord, CHU Saint-E´tienne, avenue Albert-Raimond, 42270 Saint-Priest-en-Jarez, France EA 3065, groupe de recherche sur la thrombose, universite´ Jean-Monnet, 42100 Saint-E´tienne, France correspondant. De´partement d’obste´trique et gyne´cologie, hoˆpital Nord, CHU Saint-E´tienne, avenue Albert-Raimond, 42270 Saint-Priest-en-Jarez, France Adresse e-mail : [email protected]

*Auteur

Rec¸u le 28 mars 2014 Disponible sur Internet le 17 avril 2015 http://dx.doi.org/10.1016/j.gyobfe.2015.03.019

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