Rec¸u le : 30 mars 2014 Accepte´ le : 24 aouˆt 2014 Disponible en ligne 5 octobre 2014

Disponible en ligne sur

ScienceDirect www.sciencedirect.com



Me´moire original

Formation par la simulation : e´tude-pilote sur l’accueil des parents par une e´quipe de re´animation pe´diatrique§ Simulation training: A pilot-study on reception of parents in a pediatric intensive care unit J. Hureauxa,b,c,*,d,e, F. Herbreteaua,b,f, I. Cartier-Chatrona,b,c, J. Bertona,b,f, T. Urbana,c,d,e, J.-C. Granrya,b,f a

Universite´ Nantes Angers Le Mans (LUNAM), 49000 Angers, France Angers plateforme hospitalo-universitaire de simulation en sante´, CHU d’Angers, 4, rue Larrey, 49000 Angers, France c Poˆle des spe´cialite´s me´dicales et chirurgicales Inte´gre´es, oncologie et allergologie, CHU d’Angers, 4, rue Larrey, 49000 Angers, France d Inserm UMR_S 1066 micro- et nanome´decines biomime´tiques, 4, rue Larrey, 49000 Angers, France e´ Equipe Pyver, universite´ d’Angers, 4, rue Larrey, 49000 Angers, France f Service de re´animation polyvalente de l’enfant, poˆle me´decine d’urgence-sante´-socie´te´-anesthe´sie-re´animation, CHU d’Angers, 4, rue Larrey, 49000 Angers, France b

Summary Background. Simulation training is gradually being integrated into the curriculum for caregivers in intensive care units. There are few training programs on communication with families. Goal. This pilot-study evaluated the impact of a training protocol on professional practices including a protocol for the reception of the parents of a child admitted to a pediatric intensive care unit. Materials and methods. The training program lasted 3 months and included three parts: a theoretical contribution, a simulation session with debriefing, and a focus group. During the simulation session, a multi-professional team of three healthcare providers (physician, nurse, assistant nurse) must apply a protocol for the reception of the parents of a child who had just been admitted. The protocol lasted 35 min and included three sequences: reception and dressing by the assistant nurse, medical meeting conducted by the physician and the nurse, support of the parents in the room by the nurse and the assistant nurse. The child was simulated by a manikin (SimBabyTM, Laerdal) and the parents were prepared actors. The main objective of the pilot-study was to measure the rate of change in professional practices 1 year after the end of training.

Re´sume´ Contexte. Les formations par la simulation sont progressivement inte´gre´es dans les cursus de formation des soignants en re´animation. Il existe peu de formations a` la communication avec les familles. But. Cette e´tude-pilote a e´value´ l’impact d’une formation incluant un protocole d’accueil des parents d’un enfant admis en re´animation pe´diatrique (PAPER) sur les pratiques professionnelles. Mate´riels et me´thodes. La formation durait 3 mois et comprenait 3 parties : des apports the´oriques, une se´ance de simulation et un focus group. Lors de la session de simulation, une e´quipe pluri-professionnelle de 3 soignants (me´decin, infirmie`re, aide-soignante) devait appliquer un PAPER compose´ de 3 se´quences : accueil et habillage par l’aide-soignante, entretien me´dical en binoˆme me´decin/infirmie`re, accompagnement dans la chambre en binoˆme infirmie`re/aidesoignante. L’enfant e´tait simule´ par un mannequin (SimBabyTM, Laerdal) et les parents par des acteurs. L’objectif principal de cette e´tude-pilote e´tait de mesurer le taux de changement des pratiques professionnelles un an apre`s la fin de la formation. Re´sultats. Un an plus tard, tous les soignants (n = 15) reconnaissaient avoir change´ leurs pratiques professionnelles et estimaient

§ Les re´sultats pre´liminaires de ce travail ont e´te´ pre´sente´s sous forme d’un poster et d’une communication orale lors du 3e Colloque francophone de simulation en sante´, 6 et 7 fe´vrier 2014, Angers. * Auteur correspondant. e-mail : [email protected], [email protected] (J. Hureaux).

http://dx.doi.org/10.1016/j.arcped.2014.08.030 Archives de Pe´diatrie 2014;21:1316-1321 0929-693X/ß 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.

1316

Simulation de l’accueil en re´animation

Results. One year later, all healthcare providers (n = 15) declared they had changed their professional practices and felt that half of these changes were due to the pilot-study. New practices such as receiving parents in pairs in a dedicated room or managing a short interview with the parents before supporting the child were applied ‘‘always’’ or ‘‘if possible’’. Conclusion. The pilot-study showed that the training program induced half of the changes of professional practices for welcoming the parents of a child admitted to pediatric intensive care unit 1 year later. ß 2014 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

que ces changements e´taient attribuables pour moitie´ a` la formation suivie. De nouvelles pratiques comme l’accueil en binoˆme dans une salle de´die´e ou une courte entrevue avec les parents avant de prendre en charge l’enfant e´taient applique´es « toujours » ou « si possible ». Conclusion. Cette e´tude-pilote a montre´ que la formation avait permis de modifier a` un an la moitie´ des pratiques professionnelles d’accueil des parents d’un enfant admis en re´animation pe´diatrique. ß 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.

1. Introduction

compose´e d’un me´decin, d’une infirmie`re diploˆme´e d’E´tat (IDE) et d’une aide-soignante (AS). L’e´quipe devait appliquer un PAPER en 3 se´quences, de´fini par les formateurs et limite´ a` 35 minutes. Le PAPER commenc¸ait par un temps d’accueil parame´dical de 5 minutes durant lequel l’AS accueillait seule les parents en salle d’attente, les habillait et les conduisait dans un bureau, ou` le me´decin et l’IDE les attendaient pour un entretien me´dical en binoˆme limite´ a` 15 minutes. Pendant ce temps, l’AS devait re´aliser seule des soins de nursing a` l’enfant. Lorsque l’entretien me´dical e´tait clos, l’IDE conduisait les parents dans la chambre pour un temps d’accompagnement parame´dical de 15 minutes en pre´sence de l’AS. Le me´decin observait ce dernier temps avec les formateurs. Les soignants de´couvraient le protocole juste avant la mise en situation. Le sce´nario illustrait l’histoire d’un enfant de 10 mois intube´ et ventile´ sous se´dation, en e´tat stable, admis pour prise en charge d’une me´ningo-ence´phalite a` pneumocoque. L’enfant e´tait simule´ par un mannequin (SimBabyTM, Laerdal) sous monitoring dans une chambre. Ses parents e´taient arrive´s durant l’installation de l’enfant et attendaient a` l’entre´e du service depuis environ 30 minutes. Ils e´taient joue´s par des acteurs amateurs pre´pare´s par les formateurs. Le jeu des parents e´tait reproduit lors de chaque session pour exposer les soignants a` deux me´canismes de de´fense psychologiques : maıˆtrise chez la me`re (cherchant a` comprendre la situation par une analyse rationnelle lui permettant de mieux la controˆler) et de´placement chez le pe`re (de´placement de son e´motion sur un autre proble`me non lie´ a` la situation pre´sente et moins angoissant). Un de´briefing en 3 temps (expression des e´motions, analyse, synthe`se) concluait chaque se´ance de simulation. Les acteurs participaient au de´briefing. La communication de l’e´quipe avec les acteurs et des membres de l’e´quipe entre eux e´tait analyse´e. Les me´canismes de de´fense joue´s par les acteurs et ceux observe´s chez les soignants e´taient discute´s. Un mois plus tard, un focus group (groupe de discussion dirige´e visant a` de´terminer la position du groupe vis-a`-vis d’une question pre´cise) e´tait mene´ par les formateurs et permettait aux soignants d’e´changer entre eux sur la

L’accueil d’un enfant admis en re´animation pe´diatrique implique la rencontre des soignants avec ses parents. Cette rencontre cristallise des enjeux e´motionnels et psychologiques majeurs pour les protagonistes car il s’agit d’une situation de crise psychologique [1]. Les formations par la simulation a` des gestes techniques et au travail d’e´quipe en situation d’urgence vitale sont progressivement inte´gre´es aux cursus de formation des soignants en re´animation pe´diatrique [2] et en pe´diatrie [3]. La ne´cessite´ d’une meilleure formation a` la communication en re´animation en ge´ne´ral est connue [4] et en particulier celle d’une meilleure formation des me´decins a` la communication avec les parents [5]. Bien que peu de formations existent, elles semblent appre´cie´es par les soignants [6]. En l’absence de consensus sur un protocole d’accueil des parents d’un enfant admis en re´animation pe´diatrique (PAPER), nous avons mis en place une e´tude-pilote pour e´valuer une formation testant un PAPER au sein de Angers plateforme hospitalo-universitaire de simulation en sante´.

2. Mate´riels et me´thodes Ce travail a e´te´ re´alise´ avec l’accord du comite´ d’e´thique du centre hospitalier universitaire (CHU) d’Angers. Les formateurs e´taient un me´decin forme´ a` l’annonce de mauvaise nouvelle en oncologie et un cadre de sante´ travaillant en re´animation pe´diatrique en collaboration avec une psychologue clinicienne. La formation a dure´ 3 mois et a e´te´ compose´e de trois parties incluant des apports the´oriques collectifs de 2 heures, une se´ance de simulation de 3 heures et un focus group de 2 heures. Les apports the´oriques ont aborde´ la communication me´decin-patient, l’annonce de mauvaise nouvelle en cance´rologie puis une revue de la litte´rature sur l’inte´reˆt de la communication avec le patient et sa famille en re´animation [7,8]. Les me´canismes psychologiques de de´fense ont e´te´ pre´sente´s. Un livret pe´dagogique contenant tous les apports the´oriques pre´sente´s a e´te´ remis a` chaque participant. La se´ance de simulation s’est de´roule´e 15 jours plus tard en e´quipe pluri-professionnelle

1317

Archives de Pe´diatrie 2014;21:1316-1321

J. Hureaux et al.

formation, de proposer des e´volutions dans leurs pratiques professionnelles, inscrivant ce travail dans une rechercheaction. Le questionnaire State-Trait Anxiety Inventory for adults (STAI) form Y1 (annexe 1) qui e´value le stress aigu [9,10] e´tait comple´te´ a` trois reprises par les soignants : avant la formation, apre`s les apports the´oriques et au moins une semaine apre`s la se´ance de simulation. Avant de comple´ter le questionnaire, les participants devaient s’imaginer prendre en charge un enfant de 10 mois ayant une maladie grave avec un risque de de´ce`s estime´ a` 50 %. L’e´tude-pilote a consiste´ a` e´valuer la formation au moyen de questionnaires utilisant des e´chelles de Likert gradue´es de 0 a` 10 de un en un (0 signifie « pas du tout » et 10 signifie « totalement »). Les e´valuations ont e´te´ re´alise´es par les soignants apre`s chaque partie et un an apre`s la fin de la formation. Les acteurs ont e´galement e´value´ leur ve´cu et la performance globale des soignants au moyen de la meˆme e´chelle apre`s la se´ance de simulation. L’objectif principal de cette e´tude e´tait d’e´valuer l’impact de la formation sur les pratiques professionnelles. Le crite`re de jugement principal e´tait le taux de soignants ayant modifie´ leurs pratiques professionnelles lors de l’accueil des parents un an apre`s la fin de la formation. Les objectifs secondaires e´taient :  de de ´ crire les changements des pratiques professionnelles ;  d’analyser chacune des 3 e ´ tapes de la formation au moyen des auto-e´valuations mises au point par les formateurs ;  d’e ´ tudier le stress aigu des soignants au moyen du questionnaire STAI form Y1. Les variables qualitatives sont de´crites par les effectifs et pourcentages correspondants. Les re´sultats quantitatifs ont e´te´ exprime´s en me´diane  distance interquartile et compare´s au moyen du test de Kruskal-Wallis, puis par un test U si une diffe´rence e´tait de´tecte´e. Le seuil de significativite´ p < 0,05 a e´te´ choisi. Les calculs ont e´te´ effectue´s avec le logiciel IBM SPSS Statistics 19.

3. Re´sultats Six me´decins, 6 IDE et 6 AS du service de re´animation polyvalente de l’enfant du CHU d’Angers ont participe´ volontairement a` la

formation. Ces 18 personnes repre´sentaient respectivement 62,5 %, 35,3 % et 46,1 % de l’effectif des me´decins, des IDE et des AS du service. Un an apre`s la formation, 100 % des soignants (n = 15, 2 soignants e´taient en arreˆt-maladie et un ne travaillait plus dans le service au moment de l’e´valuation a` 1 an) ont re´pondu que leurs pratiques professionnelles d’accueil des parents d’un enfant admis en re´animation pe´diatrique avaient e´volue´. Ils ont estime´ que ces changements e´taient attribuables a` la formation suivie a` 50  30 %. Les changements observe´s sont pre´sente´s dans le tableau I. Les apports the´oriques re´alise´s avant la session ont e´te´ conside´re´s utiles a` 70  23 % par les soignants (75  38 %, 65  33 %, 75  23 %, respectivement pour les me´decins, IDE et AS ; p = 0,50). Le livret pe´dagogique, qui contenait tous les apports the´oriques pre´sente´s oralement, avait e´te´ lu par 88 % des participants. Six e´quipes pluri-professionnelles constitue´es ale´atoirement avaient participe´ a` la se´ance de simulation (incluant pre´sentation, mise en situation, et de´briefing) de 3 heures. Onze soignants avaient de´ja` participe´ a` une formation par simulation. Dix ont affirme´ avoir eu des craintes « d’eˆtre e´value´ par un pair », « de ne pas re´ussir la se´ance » ou « d’eˆtre filme´ » avant de venir participer a` la se´ance de simulation. La se´ance de simulation a e´te´ juge´e re´aliste a` 90  23 % par les soignants (90  20 %, 75  25 %, 90  23 %, respectivement pour les me´decins, IDE et AS ; p = 0,28). Le de´briefing avait permis un temps d’e´change interprofessionnel. L’entretien me´dical avait duˆ eˆtre interrompu par les formateurs lors de toutes les sessions et a e´te´ conside´re´ comme pas assez long par l’ensemble des me´decins, ce qui n’e´tait pas le cas pour les IDE ni pour les acteurs (65  45 %, 80  20 %, 80  19 %, respectivement pour les me´decins, IDE et les acteurs ; p = 0,66). Les me´decins avaient une strate´gie pour mener l’entretien a` 80  20 % et ont estime´ l’avoir applique´e a` 75  43 %. Ils ont dit s’eˆtre sentis aide´s a` 90  25 % par la pre´sence de l’IDE. Les IDE ont conside´re´ a` 90  13 % qu’il e´tait important qu’elles soient pre´sentes lors de l’entretien afin de mieux accompagner les parents dans la reformulation, mais elles ont exprime´ des difficulte´s a` prendre une place lors de l’entretien me´dical, sauf lorsque le me´decin offrait explicitement la parole. Cinquante pour cent des AS

Tableau I Pratiques professionnelles ayant e´volue´ un an apre`s la formation. Pratique professionnelle

Pourcentage de soignants concerne´s

Conditions d’application

Accueil en binoˆme

60

« Toujours » ou « si possible »

Premie`re rencontre dans une salle de´die´e

60

« Toujours » ou « si possible »

Courte entrevue avec les parents avant de prendre en charge l’enfant

60

« Toujours » ou « si possible »

Courte entrevue avec les parents dans la chambre avant l’entretien me´dical

53

« Toujours » ou « si possible »

1318

Simulation de l’accueil en re´animation

Tableau II Re´sultats des questionnaires State-Trait Anxiety Inventory for adults form Y1. Avant la formation

Apre`s la simulation

Apre`s les apports the´oriques

p

Me´decins

49  18

48  25

47  22

0,79

Infirmie`res

53  19

45  14

48  9

0,33

Aides-soignantes

50  11

50  12

49  10

0,75

Interpre´tation du test selon le score : 35 ou moins, pas d’anxie´te´ ; 36 a` 45, niveau d’anxie´te´ faible ; 46 a` 55, niveau d’anxie´te´ mode´re´ ; 56 a` 65, niveau d’anxie´te´ e´leve´ ; 66 ou plus, niveau d’anxie´te´ tre`s e´leve´.

ont exprime´ leur regret de n’avoir pu y assister et leur difficulte´ a` accompagner la famille sans connaıˆtre la teneur de l’entretien me´dical. Durant l’accompagnement au lit de l’enfant, les IDE avaient une strate´gie pour mener l’entretien a` 70  63 %, qu’elles ont estime´ avoir applique´e a` 80  48 %. La dure´e du premier entretien au lit de l’enfant avait e´te´ suffisamment longue a` 80  20 %, 90  5 % et 80  10 %, respectivement pour les AS, la maman et le papa (p = 0,09). Les formateurs ont observe´ que la parole passait naturellement d’un parame´dical a` l’autre lorsqu’une rupture de la communication avec les parents e´tait ressentie. Les soignants ont estime´ que les informations donne´es aux parents lors de l’entretien au lit de l’enfant avaient e´te´ fide`les aux informations donne´es par le me´decin a` 90  18 % (95  10 %, 85  13 %, respectivement pour les me´decins et IDE). Les acteurs avaient e´te´ satisfaits de l’accueil et de la relation e´tablis avec eux a` 80  10 %. Il apparaıˆt cependant que les acteurs ont estime´ avoir rec¸u des informations contradictoires plus fre´quemment au cours de l’entretien me´dical (75  85 %) qu’au lit du malade (15  80 %). Globalement ils ont e´value´ la performance des e´quipes a` 80  10 % (85  10 % et 80  13 %, respectivement pour la maman et le papa). Les soignants avaient re´ussi a` repe´rer les me´canismes de de´fense joue´s par les acteurs et commence´ a` identifier les leurs. Lors du focus group de 2 heures re´alise´ un mois apre`s la se´ance de simulation, 80  13 % des soignants ont estime´ que la formation allait permettre une e´volution de leurs pratiques professionnelles. Les propositions de changements ayant e´merge´ sont de´crites dans le tableau I. Les soignants e´taient satisfaits a` 90  13 % a` l’issu de la formation. Les re´sultats du questionnaire STAI form Y1 sont pre´sente´s dans le tableau II. Le niveau de stress aigu e´tait similaire pour chaque groupe de professionnels au de´but de la formation. Bien qu’il n’y ait pas de modification statistiquement significative, les IDE semblaient ressentir moins de stress aigu au de´cours de la formation.

4. Discussion Un an apre`s la formation, tous les soignants ont de´crit des modifications de leurs pratiques professionnelles, 50 % e´tant attribuables a` cette formation. Ce taux est e´leve´ et montre un impact important de la formation propose´e. L’autre moitie´

des changements de´crits pourrait re´sulter d’autres formations, d’e´changes interprofessionnels ou de lectures. Les changements, verbalise´s lors du focus group, portaient sur l’accueil en binoˆme, la premie`re rencontre dans une salle de´die´e, une courte entrevue avec les parents avant la prise en charge de l’enfant. La formation a e´te´ juge´e satisfaisante a` 90  13 % par les soignants. Le travail en binoˆme me´decin-IDE est apparu aidant pour le me´decin et pour l’IDE. Le niveau de stress aigu dans la situation e´tudie´e n’e´tait pas modifie´ a` l’issu de la formation. Notre travail s’inte`gre dans une re´flexion globale d’e´quipe prenant en compte l’organisation, la pratique re´flexive et la dimension relationnelle des soins en re´animation pe´diatrique [11]. Une analyse interne des pratiques professionnelles avait permis de montrer une he´te´roge´ne´ite´ dans des pratiques non techniques d’e´quipe comme l’accueil des parents d’un enfant. Aussi, cette formation a e´te´ cre´e´e pour tester un PAPER et essayer de mieux re´pondre aux besoins des parents [7,12]. Selon le mode`le d’e´valuation d’un enseignement propose´ par Kirpatrick en 4 niveaux [13], cette e´tude-pilote montre qu’un impact de niveau 3 (modification des pratiques) est attribuable a` la formation. Dans la situation e´tudie´e, la mesure d’un effet de niveau 4 (e´valuation de l’accueil par les parents) semble difficile sur le plan me´thodologique et e´thique. Il nous a semble´ adapte´ de commencer la formation par des apports the´oriques, avant une mise en situation puis de terminer par un focus group. Les trois se´quences successives impose´es par le PAPER expe´rimental de´coulaient des contraintes mate´rielles et organisationnelles du service, mais aussi de donne´es de la litte´rature. Ainsi, nous avons choisi la dure´e maximale de l’entretien me´dical sur la base de l’e´tude d’Azoulay et al. [7] qui a montre´ que les familles souhaitaient 1,5 fois plus de temps d’e´change avec les soignants et que la diffe´rence me´diane entre le temps alloue´ et le temps « attendu » par les familles e´tait de 5 minutes : nous en avons conclu qu’un entretien d’une dure´e de 10 minutes augmente´e de 50 % (5 minutes) devait eˆtre teste´ en premier. De meˆme, une e´tude franc¸aise re´alise´e chez des patients adultes 2 ans apre`s un diagnostic de cancer [14] a montre´ que 70 % des patients auraient souhaite´ prolonger la consultation me´dicale avec une infirmie`re, d’ou` le sche´ma d’une consultation me´dicale qui se prolonge par un temps d’accompagnement soignant au lit de l’enfant avec l’IDE. Ces deux se´quences e´taient re´alise´es

1319

Archives de Pe´diatrie 2014;21:1316-1321

J. Hureaux et al.

en binoˆme pour faire expe´rimenter en simulation le travail en e´quipe dans ces situations. Le protocole d’accueil des parents a e´te´ pre´sente´ aux professionnels juste avant la mise en situation pour re´duire les risques de de´viation au protocole. Durant les de´briefings, les soignants ont re´gulie`rement exprime´ le be´ne´fice qu’ils avaient ressenti a` travailler en binoˆme, alors meˆme qu’ils avaient parfois e´te´ re´ticents a` suivre le protocole expe´rimental. Le de´briefing a aussi favorise´ une comparaison des pratiques professionnelles dans un cadre neutre. Les auto-questionnaires ont permis de mettre en e´vidence la satisfaction globale des soignants vis-a`-vis du dispositif d’accueil expe´rimental propose´. Les acteurs ont exprime´ un haut niveau de performance globale mais ont estime´ avoir rec¸u des informations contradictoires, plus fre´quemment au cours de l’entretien me´dical que dans la chambre. Il faut noter la tre`s grande variabilite´ de ces re´sultats selon les se´ances de simulation, comme en atteste la distance interquartile. Ce phe´nome`ne a de´ja` e´te´ observe´ en clinique aupre`s des proches de patients en re´animation [15]. Il pourrait s’expliquer par un e´tat de stress « non simule´ » des acteurs, par une communication non verbale en de´calage avec la communication verbale ou par des difficulte´s a` annoncer une mauvaise nouvelle chez le me´decin. Les me´decins auraient souhaite´ un de´briefing personnel plus approfondi sur leur communication, ce qui semble indiquer des besoins non assouvis en matie`re de communication avec les parents. Le focus group a constitue´ la dernie`re se´quence de la formation. Apre`s un bilan de l’ensemble de l’e´tude-pilote, les soignants e´taient invite´s a` exprimer si la formation avait ge´ne´re´ des propositions de modifications des pratiques professionnelles. Cela avait e´te´ le cas pour 80 % d’entre eux. Le STAI form Y1 e´value l’anxie´te´ que le sujet ressent au moment ou` il re´pond aux questions [9]. C’est un indicateur des modifications transitoires de l’anxie´te´ provoque´es par des situations aversives qui a e´te´ utilise´ dans de nombreux travaux en pe´diatrie [16,17]. Le score est proportionnel au niveau de stress. Notre e´tude montre qu’il existe un stress aigu chez les soignants lors de l’accueil des parents compris entre 45 et 55, correspondant a` un niveau d’anxie´te´ moyen pour la population franc¸aise. Ce niveau d’anxie´te´ est cohe´rent avec le ressenti des soignants exprime´ lors du de´briefing. Il est inte´ressant d’observer que cette formation ne modifie pas le niveau de stress aigu. Pour avoir un impact sur le stress, il faudrait sans doute enrichir

cette formation au moyen de modules d’apprentissage de la gestion du stress. La principale faiblesse de notre travail est le faible effectif de professionnels engage´s, bien qu’il repre´sente la moitie´ de l’e´quipe du service. Alors que ce type de formation a e´te´ propose´e par Greenberg et al. pour des me´decins juniors dans un service d’urgence pe´diatrique de`s 1999 [18], l’originalite´ de notre formation est qu’elle est destine´e a` une e´quipe pluriprofessionnelle de re´animation. Elle s’appuie sur les propositions formule´es par Azoulay et Sprung de`s 2004 [4] et vise a` tester un PAPER dans le cadre d’une communication centre´e sur la famille [1]. Ce projet a utilise´ une strate´gie d’induction du changement en trois temps selon le mode`le de Lewin [19] : de´verrouillage (unfreeze) des connaissances en s’appuyant sur l’exemple de la communication en cance´rologie, l’expe´rimentation d’un changement (change) en simulation, puis le verrouillage (freeze) des souhaits de changements lors du focus group. Cette se´quence a permis a` chaque soignant de se pre´parer a` son rythme et selon ses besoins, tout en interagissant avec les membres de son e´quipe durant la dure´e de la formation. Des travaux comple´mentaires sont requis pour confirmer les re´sultats de cette e´tude-pilote.

5. Conclusion Cette e´tude a montre´ que la formation avait permis de modifier, un an plus tard, la moitie´ des pratiques professionnelles d’accueil des parents d’un enfant admis en re´animation pe´diatrique. Elle n’avait cependant pas modifie´ le niveau de stress aigu des soignants confronte´ a` cette situation.

De´claration d’inte´reˆts Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article. Remerciements 1) La troupe de the´aˆtre Tre´teauscope, du CHU d’Angers, en particulier Mme Nadine Pasquier, M. Philippe Jeannin et M. Claude Reliat. 2) M. Ste´phane Brut, technicien au centre de simulation. 3) Les soignants qui ont accepte´ de participer a` la formation.

Support financier : aucun.

Annexe 1. Questionnaire State-Trait Anxiety Inventory for adults (STAI) form Y1 [9] Ci-apre`s figurent un certain nombre de de´claration que les gens utilisent souvent pour se de´crire. Lisez chacun des e´nonce´s et cochez dans la case approprie´e ce qui convient le mieux a` la fac¸on dont vous vous sentez avant la premie`re rencontre avec le(s) parent(s) d’un enfant dont le pronostic vital est incertain (risque de de´ce`s estime´ a` 50 % et si survie risque de se´quelles majeures). Il n’existe ni bonnes ni mauvaises re´ponses. Ne passez pas trop de temps sur chacun des points, mais donnez la re´ponse qui semble de´crire le mieux ce que vous ressentez dans cette situation. Re´pondez a` toutes les questions et ne cochez qu’une case pour chacune d’entre elles.

1320

Simulation de l’accueil en re´animation Annexe 1 (Suite) Impact de l’e´ve`nement 1. Je me sens calme 2. Je me sens su ˆ r de moi 3. Je suis tendu 4. Je me sens contraint 5. Je me sens a` mon aise 6. Je me sens bouleverse´ 7. Je m’inquie`te a` l’ide´e de malheurs possibles 8. Je me sens satisfait 9. J’ai peur 10. Je me sens bien 11. J’ai confiance en moi 12. Je me sens nerveux 13. Je suis agite´ 14. Je me sens inde´cis 15. Je suis de´tendu 16. Je suis content 17. Je suis inquiet 18. Je me sens trouble´ 19. Je me sens stable 20. Je me sens dans de bonnes dispositions

Fre´quence Pas du tout

Rarement

Parfois

Souvent

0 0 0 0 0 0 0

1 1 1 1 1 1 1

2 2 2 2 2 2 2

3 3 3 3 3 3 3

0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0 0

1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1 1

2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2 2

3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3 3

Re´fe´rences [1]

[2]

[3] [4] [5]

[6]

[7]

[8] [9]

Aldridge MD. Decreasing parental stress in the pediatric intensive care unit: one unit’s experience. Crit Care Nurse 2005;25: 40–50. Ringuier B, Richard N, Leteurtre S, et al. La simulation en re´animation pe´diatrique : e´tat des lieux et perspectives. Reanimation 2013;22:562–8. Oriot D, Boureau-Voultoury A, Ghazali A, et al. Inte´reˆt de la simulation en pe´diatrie. Arch Pediatr 2013;20:667–72. Azoulay E, Sprung CL. Family-physician interactions in the intensive care unit. Crit Care Med 2004;32:2323–8. Carnevale FA, Canoui P, Hubert P, et al. The moral experience of parents regarding life-support decisions for their critically-ill children: a preliminary study in France. J Child Health Care 2006;10:69–82. Berger JS, Blatt B, McGrath B, et al. Relationship express: a pilot program to teach anesthesiology residents communication skills. J Grad Med Educ 2010;2:600–3. Azoulay E, Pochard F, Chevret S, et al. Meeting the needs of intensive care unit patient families: a multicenter study. Am J Respir Crit Care Med 2001;163:135–9. Fourrier F(coordonateur). Mieux vivre la re´animation. Reanimation 2010;19:191–203. Spielberger CD, Gorsuch RL, Lushene R, et al. Manual for the State-Trait Anxiety Inventory. Palo Alto, CA: Consulting Psychologists Press; 1983.

[10]

[11]

[12]

[13] [14]

[15]

[16] [17]

[18]

[19]

Bruchon-Schweitzer MB, Paulhan I. Manuel pour l’Inventaire d’Anxie´te´ Trait-E´tat (Forme Y). Bordeaux: Laboratoire de Psychologie de la Sante´, Universite´ de Bordeaux II; 1990. Wigert H, Hellstrom AL, Berg M. Conditions for parents’ participation in the care of their child in neonatal intensive care – a field study. BMC Pediatr 2008;8:3. Miles MS, Carter MC. Coping strategies used by parents during their child’s hospitalization in an intensive care unit. Child Health Care 1985;14:14–21. Kirkpatrick DL, Kirkpatrick JD. Evaluating training programs. San Francisco: Berrett-Koehler Publishers; 1994. Le Corroller-Soriano, Malavolti L, Mermilliod C, Groupe ALD cancer. Les conditions de vie des patients atteints de cancer 2 ans apre`s le diagnostic. DREES 2006;486:12. Azoulay E, Chevret S, Leleu G, et al. Half the families of intensive care unit patients experience inadequate communication with physicians. Crit Care Med 2000;28:3044–9. Smith MS, Mitchell J, McCauley EA, et al. Screening for anxiety and depression in an adolescent clinic. Pediatrics 1990;85:262–6. Bouve´ LR, Rozmus CL, Giordano P. Preparing parents for their child’s transfer from the PICU to the pediatric floor. Appl Nurs Res 1999;12:114–20. Greenberg LW, Ochsenschlager D, O’Donnell R, et al. Communicating bad news: a pediatric department’s evaluation of a simulated intervention. Pediatrics 1999;103:1210–7. Lewin K. Field theory in social sciences. New York: Harper & Row; 1951.

1321

[Simulation training: a pilot-study on reception of parents in a pediatric intensive care unit].

Simulation training is gradually being integrated into the curriculum for caregivers in intensive care units. There are few training programs on commu...
309KB Sizes 0 Downloads 6 Views