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Mini-Review

Praxis 2015; 104 (8): 4 0 3 - 4 0 9

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Swiss O ly m p ic M e d ica l Center, H a u te Ecole Föderale du S p o rt M a c o lin (HEFSM), M a c o lin 1; M e d e cin e du s p o rt, D e p a rte ­ m e n t de I'a p p a re il lo c o m o te u r (DAL), C entre h o s p ita lie r u n iv e rs ita ire v a u d o is (CHUV) e t U n iv e rs ite de Lausanne (U N IL ) 2

,2Boris Cojanovic

Le sp o rt e s t-il v ra im e n t si bon p o u r la sante? Are Sports Really Such a Good Thing for Health?

R esum e

Le mouvement du corps est necessaire ä la vie et fait partie des opportunity maj eures pour ameliorer la sante de nos populations, mais parfois l'amalgame est fait avec le sport, qui peut causer des blessures ou des atteintes cardiaques aigues. Toutefois, certaines personnes peuvent presenter des effets secondaires metaboliques meme par la pratique d'une activite physique reputee bonne pour la sante. Ce type d'intolerance ä l'exercice a des causes genetiques entre autres et ne signifie pas forcement un renoncement au mouve­ ment, mais doit etre considere comme un effet secondaire d'un traitement qui doit etre optimise. L'individualisation de la prescription d'exercice tiendra compte du suivi et se fait de fa^on dynamique en adaptant les conseils selon revolution. M ots-cles: activite physique - effet secondaire - genetique - individualisa­ tion - exercice

In t r o d u c t io n

Comment oser cette insolente question en 2015, alors que d'innombrables mes­ sages fusent de partout pour exhorter les gens ä se mettre en mouvement, au sport ou ä l'activite physique (AP)? L'exercice est un terme utilise ä toutes les sauces comme ingredient de base de la sante, et les dernieres 60 annees nous ont prouve l'impact positif de la condition physique sur de multiples aspects de la vie hu© 2015 V e rla g H a n s H u b e r, H o g re fe AG , Bern

maine [1]. En effet, la sedentarite est un facteur de risque majeur de perte de san­ te [2]. Cette question, ce sont les medias televises qui la posaient il y a quelques mois, par un zapping de la Radio Tele­ vision Suisse (RTS), RTS Focus™, sorte de best-of demissions autour du sport et de la sante, que je vous encourage ä visionner [3], C'est un bei exemple d'amalgame en tous genres, oil en partant des benefices de TAP, on enchaine sur les derives du sport d'elite, les problemes d'image corporelle, la rare mort subite de l'athlete pour finalement aboutir ä une conclusion coulant de source, un sonnant et trebuchant «No sports!» de Winston Churchill. S'il est vrai que le sport presente des problemes lorsque Fon parle de sante, il y a d'autres ques­ tions plus pertinentes et moins sujettes au sensationnalisme des medias. Pour commencer, permettez-moi de vous presenter le concept «Exercise is Medi­ cine®».

connaissances actuelles en matiere de promotion de TAP, de les ancrer dans une experience pratique et d'integrer les techniques d'entretien motivationnel [ 6 ],

Ces initiatives tendent ä medicaliser 1'AP comme outil therapeutique dont le me­ decin devient le prescripteur principal. Ceci renforce l'importance de TAP et sa place dans l'arsenal therapeutique, et il est demontre que le medecin de premier recours peut le faire de maniere efficace et econome [7]. Cela pose aussi de nouvelles questions: bien que les evaluations couts-benefices penchent en faveur du mouvement, tout comme pour beaucoup d'interventions medicamenteuses, il est des situations oil Ton doit prendre garde aux effets secondaires, aux reac­ tions adverses, et de maniere plus large ä l'individualisation de l'intervention. Car oui, parfois l'exercice peut poser Probleme, et les paragraphes qui suivent vont tenter d'amener un peu de lumiere sur son cote sombre.

E x e rc is e is M e d ic in e

Lancee en 2007, cette initiative de l'American College of Sports Medicine [4] a pour but d'integrer la prescription de TAP dans la pratique du cabinet medical, en partant du principe que l'exercice est ä considerer comme un medicament, et done ä utiliser avec un processus deva­ luation, prescription et suivi similaire, y compris monitoring des effets secon­ daires [5]. En Suisse, c'est dans l'esprit du role du medecin praticien q u a ete lance des 2009 le programme PAPRICA (physical activity promotion in primary care), avec pour objectif de partager les

Abreviations utilisees dans Particle: AP Activite physique OFSPO Office Federal du Sport PAPRICA Physical activity promotion in primary care RD Reponse deletere SNP Polymorphisme nucleotidique isole V 0 2max Capacite cardio-respiratoire maximale DOI I0 .1 0 2 4 /l6 6 l- 8 1 5 7 /a 0 0 l9 7 2

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A d a p t a t io n p h y s io lo g iq u e ä l'e x e rc ic e

Pour commencer, les principes de la Physiologie de l'exercice investigues les 100 dernieres annees temoignent de la grande faculte de l'organisme ä repondre aux stimuli appliques. Prenons l'exemple des muscles squelettiques: pour developper leur fonction (force et endurance), il est necessaire de repeter de nombreuses activations musculaires par la production d'un travail externe (poids ä soulever). Le Systeme neuromusculaire ameliore ainsi le recrutement des fibres musculaires, et celles-ci augmentent en taille (surtout) et nombre (aussi), le tout entrainant une adaptation fonctionnelle et physiologique superieure, et done une meilleure sante. Ce modele fonctionne aussi pour le Systeme cardiovasculaire, avec repetitions d'effort aerobie menant ä une meilleure contractilite myocardique, un remodelage benefique des cavites cardiaques et du myocarde, tout en ameliorant la compliance arterielle. La aussi, le Systeme devient plus performant et moins sujet aux defaillances. La physiologie nous dit aussi que ces effets sont incrementaux selon le principe dose-effet, comme represente dans les recommandations suisses pour l'AP chez les adultes (Fig. 1) [8].

Ce schema nous dit que le passage de pas ou peu d'aetivite ä une activite regu­ liere d'intensite moyenne permet les plus grands gains de sante, et qu'en en faisant plus, on atteint progressivement un pla­ teau des qu'on en fait vraiment beaucoup. On se doit aussi d'integrer d ’autres ele­ ments du fonctionnem ent de l'orga­ nisme, comme la reponse aux stimuli decrite par Selye des 1936 [9] dans sa theorie du Systeme general d'adaptation, appelee plus tard stress. Le corps reagit ä un stimulus en trois phases, pour lesquelles je ferai une analogie dans l'entrainement physique:

M in i-R eview

2. Resistance (adaptation vers un niveau de fonctionnement plus eleve avec la re­ petition des Stimuli). 3. Epuisement (lors de repetition trop importante en dose ou en frequence, le Systeme se fatigue chroniquement et son fonctionnement devient limite, voire compromis). L'entrainement dans le sport de com­ petition a integre ces elements, en comprenant que c'est l'evitement de la phase d'epuisement, et la maximisation de la phase de resistance qui amenent la meil­ leure performance possible. On appelle ceci la periodisation de l'entrainement, concept developpe par Matveyev en URSS dans les annees 1960, et popularise par Bompa [10]. L'application correcte et in d iv id u alist des stimuli d'entrainem ent est ce qui permet d'optimiser le developpement de la performance. On comprend des lors l'importance de la planification correcte, du suivi, du chan­ gement en fonction des effets observes, et de la variation des stimuli pour eviter un autre ecueil dans l'exercice: la monotonie des stimulations. Mais oil done se situe le patient sedentaire que nous aimerions entrainer pour sa sante?

Les causes classiques d'echec de l'e n tra in e m e n t

La personne sedentaire doit etre entrainee, au meme titre que l'athlete qui court apres les records. La principale difference

R apport d o s e -e ffe t

2 h V2 de mouvement d'intensite moyenne ou 1 h 'A de sport

d'intensite £lev£e par semaine 1. Alarme (perturbation du metabolisme musculaire avec fatigue aigue de courte Fig- l: Rapport dose-effet dans I'activite sique et la sante (selon reference [8]). duree apres l'effort, soit 24 ä 48 heures).

phy­

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entre eux se trouve dans la marge de pro­ gression, beaucoup plus importante chez le sedentaire. Pour le reste, ils sont relativement similaires physiologiquement. On admettra que les facteurs psychologiques et motivationnels sont a priori differents, quand bien meme ceci ne soit pas fige dans la pierre. Nous identifions deux ecueils clas­ siques ä la progression de l'entrainement, aux consequences problematiques.

La blessure

Si on se refere au Systeme de Selye, les sti­ muli trop importants peuvent causer une defaillance, par exemple sur 1'appareil locomoteur. Si un accident est toujours possible dans la pratique d'une AP (chute, entorse), on se retrouve le plus souvent face ä des problemes de surcharge (tendinopathie, douleurs musculaires), causes par une progression trop rapide des activites, sans respect du temps d'adaptation necessaire. Une blessure de ce type peut remettre en question la motivation ini­ tiale au debut d'une AP, et n'est souvent pas prise en charge comme eile le serait pour un sportif (renforcement des struc­ tures atteintes, entrainement alternatif, evitement de l'inactivite et la passivite). Heureusement, ce genre de blessures dans la pratique de LAP d'intensite moderee est rare, et le rapport coüt-benefice reste favorable [11],

La fa tig u e excessive

La prescription d'un programme d'AP sur un modele «medicamenteux» implique une bonne compliance. Si eile est necessaire tant pour le medicament que pour l'AP, il est egalement primordial d'evaluer les effets de nouvelles interven­ tions, ce qui inclut les effets secondaires. Si une personne se met ä suivre les re­ commandations d'AP de cinq fois 30 min par semaine (marche rapide), il se peut quelle ressente une fatigue inhabituelle apres quelques semaines, tout comme un antihypertenseur trop dose causerait des symptömes. En l'absence d'adaptation de

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M in i-R e v ie w

Seance e n tra m e m e n t

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[Sport, is it really so good for health?].

Le mouvement du corps est nécessaire à la vie et fait partie des opportunités majeures pour améliorer la santé de nos populations, mais parfois l'amal...
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