G Model

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Article original

Qui est le me´decin de soins primaires du patient traite´ par he´modialyse ? Who is the physician in charge with the primary care of the dialysis patients? Cle´mence Be´chade a, Gre´gory Daireaux b, Patrick Henri a, Isabelle Landru c, Jean-Marie Batho d, Bruno Hurault de Ligny a, Thierry Lobbedez a,* a

Service de ne´phrologie, CHU Cle´menceau, 14033 Caen cedex, France Service de me´decine ge´ne´rale, CHU Coˆte-de-Nacre, 14033 Caen cedex, France c Service de ne´phrologie, centre hospitalier ge´ne´ral Bisson, 14100 Lisieux, France d Service de ne´phrologie, centre hospitalier prive´ Saint-Martin, 14000 Caen, France b

I N F O A R T I C L E

R E´ S U M E´

Historique de l’article : Rec¸u le 21 mars 2013 Accepte´ le 10 septembre 2013 Disponible sur Internet le xxx

Introduction. – Le roˆle du ge´ne´raliste dans la prise en charge du patient he´modialyse´ est mal connu. Notre hypothe`se est que les soins primaires du patient he´modialyse´ sont plus souvent assure´s par le ne´phrologue que par le me´decin ge´ne´raliste. L’objectif de cette e´tude e´tait d’estimer la proportion de patients traite´s par he´modialyse ayant un suivi par un me´decin ge´ne´raliste pour leurs soins primaires et de de´terminer les facteurs associe´s au non-recours au ge´ne´raliste. Patients et me´thodes. – Cette e´tude transversale multicentrique repose sur l’interrogatoire de patients he´modialyse´s via un questionnaire standardise´. Ont e´te´ inclus les patients insuffisants re´naux chroniques, aˆge´s de plus de 18 ans, he´modialyse´s depuis plus de trois mois dans l’une des structures de dialyse du Calvados. Les crite`res d’exclusion e´taient une dure´e en dialyse infe´rieure a` trois mois, les patients pris en charge temporairement dans la structure, les patients mineurs au moment de l’e´tude, une dysfonction cognitive se´ve`re, les patients ne parlant pas franc¸ais, un arreˆt de la dialyse en cours d’e´tude. Un mode`le de re´gression log-binomiale a e´te´ utilise´ afin d’e´tudier les facteurs associe´s au nonrecours au ge´ne´raliste. Re´sultats. – Seuls 26 % des patients he´modialyse´s avaient un suivi re´gulier par un me´decin ge´ne´raliste et 47 % e´taient pris en charge exclusivement par le ne´phrologue. La vie en institution e´tait associe´e a` un suivi re´gulier par un ge´ne´raliste tandis que l’anciennete´ en dialyse e´tait associe´e a` la prise en charge des soins primaires par le ne´phrologue. Il existait e´galement des diffe´rences de recours au me´decin traitant en fonction des centres de dialyse. Conclusion. – Les soins primaires du patient he´modialyse´ sont le plus souvent pris en charge par le ne´phrologue. ß 2013 Publie´ par Elsevier Masson SAS pour I’Association Socie´te´ de ne´phrologie.

Mots cle´s : He´modialyse Me´decin ge´ne´raliste Ne´phrologues Soins primaires

Keywords: General practitioner Hemodialysis Nephrologists Primary care

A B S T R A C T

Introduction. – The role played by nephrologists in hemodialysis patients’ primary care is not well known. We hypothesized that primary care are provided by nephrologists and not by general practitioners for most of these patients. The aim of this study was to estimate the rate of hemodialysis patients having a nephrologist as primary care provider, and to determine which factors were associated with non-resort to a general practitioner for primary care. Methods. – Patients older than 18 years treated by hemodialysis for more than 3 months in the Calvados district were included and were interviewed with a standardized questionnaire. A log-binomial regression was used to study factors associated with non-resort to a general practitioner for primary care. Results. – Only 26% of patients had a general practitioner involved in the primary care; whereas 47% considered that nephrologists were the physician in charge of the primary care. Time spent in

* Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (T. Lobbedez). 1769-7255/$ – see front matter ß 2013 Publie´ par Elsevier Masson SAS pour I’Association Socie´te´ de ne´phrologie. http://dx.doi.org/10.1016/j.nephro.2013.09.005

Pour citer cet article : Be´chade C, et al. Qui est le me´decin de soins primaires du patient traite´ par he´modialyse ? Ne´phrol ther (2013), http://dx.doi.org/10.1016/j.nephro.2013.09.005

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hemodialysis was associated with non-resort to a general practitioner, while patients living in nursing home were more likely to have regularly a regular follow up by a general practitioner. Dialysis center was a factor associated with the general practitioner as a primary care provider. Conclusion. – Primary care of the hemodialysis patient is provided by nephrologists. ß 2013 Published by Elsevier Masson SAS on behalf of the Association Socie´te´ de ne´phrologie.

1. Introduction Les soins primaires ont e´te´ de´finis par l’Organisation mondiale de la sante´ (OMS) lors de la confe´rence d’Alma Ata, en 1978, puis pre´cise´s en 1996 par l’American Institute of Medicine comme des prestations de sante´ accessibles et inte´gre´es, assure´es par des me´decins qui ont la responsabilite´ de satisfaire une grande majorite´ des besoins individuels de sante´, d’entretenir une relation prolonge´e avec leurs patients et d’exercer dans le cadre de la famille et de la communaute´ [1]. Compte tenu des co-morbidite´s et de l’aˆge me´dian des patients dialyse´s, il est vraisemblable que le besoin de soins primaires soit important dans cette population. Selon les donne´es du registre REIN, le nombre de patients traite´s par dialyse a augmente´ de 17 % entre les anne´es 2004 et 2009 [2]. L’aˆge me´dian a` l’initiation de l’e´puration extra-re´nale e´tait de 68 ans en 2002 contre 70 ans en 2009. Dans le meˆme intervalle de temps, le nombre de me´decins ne´phrologues a augmente´ de 13,7 % [3]. Il a e´te´ rapporte´ que 90 % des ne´phrologues de´clarent prendre en charge tout ou partie des soins primaires de leurs patients dialyse´s et y consacrer entre 30 et 35 % de leur temps [4]. Une part des soins primaires du patient traite´ par dialyse pourrait eˆtre confie´e au me´decin ge´ne´raliste, libe´rant ainsi du temps pour des activite´s spe´cifiquement ne´phrologiques. Nous e´mettons l’hypothe`se que le me´decin de soins primaires du patient traite´ par dialyse est plus souvent le ne´phrologue en charge du patient que le me´decin ge´ne´raliste, et que des facteurs socio-e´conomiques et propres a` la dialyse sont associe´s a` un moindre recours au me´decin ge´ne´raliste comme me´decin de soins primaires. L’objectif de cette e´tude transversale est d’estimer la proportion de patients traite´s par he´modialyse ayant un suivi par un me´decin ge´ne´raliste pour leurs soins primaires, et de de´terminer les facteurs associe´s au non-recours au ge´ne´raliste. 2. Patients et me´thodes 2.1. Patients Les patients inclus devaient eˆtre aˆge´s de plus de 18 ans et traite´s depuis plus de trois mois pour une insuffisance re´nale chronique terminale dans le de´partement du Calvados. Tous les patients inclus ont e´te´ informe´s au pre´alable de l’objectif de l’e´tude par une lettre d’information. Les crite`res d’exclusion e´taient :      

une dure´e en dialyse infe´rieure a` trois mois ; une prise en charge temporaire dans un centre du de´partement ; le fait d’eˆtre mineur au moment de l’e´tude ; une dysfonction cognitive se´ve`re ; une maıˆtrise insuffisante de la langue franc¸aise ; un refus de participation.

Les patients he´modialyse´s a` domicile n’ont pas e´te´ retenus pour l’e´tude en raison de leur nombre peu important dans le de´partement. Les variables recueillies e´taient les donne´es :  de´mographiques ;

 ge´ographiques (adresse du patient et du me´decin ge´ne´raliste) ;  socio-e´conomiques, estime´es par l’indice de Townsend ;  me´dicales : ne´phropathie initiale, anciennete´ de la dialyse, mode de dialyse, et score de Charlson.

2.2. Me´thode Il s’agit d’une e´tude transversale multicentrique, re´alise´e en mai 2011 au sein des unite´s de dialyse du de´partement. Les patients inclus dans l’e´tude ont re´pondu a` un questionnaire standardise´, et les renseignements me´dicaux ont e´te´ extraits de la base de donne´es informatise´es d’he´modialyse des diffe´rents centres du de´partement. La variable a` expliquer e´tait le me´decin ge´ne´raliste comme me´decin de soins primaires. Cette variable a e´te´ initialement recueillie comme une variable qualitative a` trois classes :  aucun suivi par un ge´ne´raliste ;  suivi occasionnel par un ge´ne´raliste ;  suivi re´gulier par un ge´ne´raliste.

Le suivi re´gulier par le me´decin ge´ne´raliste e´tait de´fini par une consultation au minimum une fois tous les 3 mois. Pour l’analyse statistique, la classe « suivi occasionnel » a e´te´ rapproche´e de la modalite´ non-suivi par un ge´ne´raliste pour les soins primaires, constituant ainsi une variable binaire. Les patients non suivis par un me´decin ge´ne´raliste ont e´te´ interroge´s sur leur souhait de reprendre un suivi re´gulier par un omnipraticien pour la prise en charge de leurs soins primaires. 3. Analyse statistique Les variables quantitatives ont e´te´ de´crites par leur moyenne et l’e´cart type en cas de distribution normale, estime´e par repre´sentation graphique. En cas de distribution asyme´trique, les valeurs quantitatives ont e´te´ de´crites par la me´diane, le premier et le troisie`me quartiles. Les variables qualitatives ont e´te´ de´crites par leur proportion et leur pourcentage. Une description des variables dans les groupes me´decin ge´ne´raliste, comme me´decin de soins primaires et ne´phrologue, comme me´decin de soins primaires a e´te´ effectue´e. Le risque relatif et son intervalle de confiance (IC) a` 95 % ont e´te´ estime´s pour chaque variable, avec un mode`le de re´gression log-binomiale a` un facteur. L’intervalle de confiance du risque relatif a e´te´ estime´ par boostraping. Pour les variables quantitatives, la relation log-line´aire entre les variables et la variable a` expliquer a e´te´ estime´e par la me´thode des splines. L’association des variables quantitatives et de la variable a` expliquer a e´te´ estime´e par une analyse en composante principale focalise´e dans une approche exploratoire. Toujours dans une approche exploratoire des liaisons, les relations entre les diffe´rentes variables quantitatives et binaires ont e´te´ explore´es par une analyse en composante principale. Un mode`le de re´gression log-binomiale a e´te´ utilise´ pour l’analyse multivarie´e. Les variables ont e´te´ entre´es dans le mode`le selon les re´sultats de l’analyse bivarie´e. L’intervalle de confiance des risques relatifs a e´te´ estime´ par la me´thode du Boostrap. Les

Pour citer cet article : Be´chade C, et al. Qui est le me´decin de soins primaires du patient traite´ par he´modialyse ? Ne´phrol ther (2013), http://dx.doi.org/10.1016/j.nephro.2013.09.005

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NEPHRO-690; No. of Pages 6 C. Be´chade et al. / Ne´phrologie & The´rapeutique xxx (2013) xxx–xxx Tableau 1 Caracte´ristiques de la population, donne´es me´dicales.

3

Tableau 2 Caracte´ristiques de la population, donne´es socio-e´conomiques. Me´diane (1er–3e quartile)

Aˆge (anne´es) Score de Charlson

72 (60–81) 5 (4–6)

Anciennete´ en dialyse (mois)

42 (20–83)

Temps de transport domicile-centre de dialyse (en minutes)

18 (11–33)

Temps de transport domicilecabinet du MG (en minutes)

2 (1–5)

Effectif (pourcentage) Sexe (F) ne´phropathie Vasculaire Diabe´tique Glome´rulone´phrite chronique Polykystose re´nale Ne´phropathie interstitielle chronique Divers Mode de dialyse He´modialyse en centre Autodialyse Unite´ de dialyse me´dicalise´e Centre de dialyse Centre 1 Centre 2 Centre 3 Centre 4 Nombre hebdomadaire de se´ances 1 2 3 4 5

Effectif (pourcentage)

83 51 46 34 11 20 57

(38) (23) (21) (16) (5) (9) (26)

153 (70) 46 (21) 20 (9)

76 48 43 52

(34) (22) (20) (24)

1 23 185 4 6

(1) (10) (84) (2) (3)

MG : me´decin ge´ne´raliste ; F : sexe fe´minin ; variable continue exprime´e par la me´diane, le 1er et le 3e quartile ; variable qualitative exprime´e en effectif et proportion.

Vie en institution

22 (10)

Seul au domicile

67 (31)

Suivi IDE a` domicile

34 (16)

Activite´ actuelle En activite´ Retraite´ ou pre´-retraite´ Choˆmage ou sans activite´ Profession Agriculteurs exploitants Artisans, commerc¸ants, chefs d’entreprise Cadres, professions intellectuelles supe´rieures Professions interme´diaires Employe´s Ouvriers Autres personnes sans activite´ professionnelle

7 26 23 24 72 48 19

(3) (11) (11) (11) (33) (22) (9)

Niveau d’e´tude Sortie de l’enseignement sans diploˆme Certificat d’e´tudes primaires BEPC, BEP, CAP Bac, brevet supe´rieur, brevet professionnel Bac + 2 Bac + 4 et plus

55 57 68 17 10 12

(25) (26) (31) (8) (5) (5)

Be´ne´ficiaires de la CMU

11 (5)

Be´ne´ficiaires d’une mutuelle ou assurance comple´mentaire Pas de protection comple´mentaire CMU comple´mentaire Mutuelle, compagnie d’assurance

15 (7) 8 (4) 196 (89)

Revenus Sans revenu Moins de 700 s De 700 a` 1500 s De 1500 a` 3000 s Plus de 3000 s Refus Non connu

4 38 113 31 8 6 19

diffe´rents mode`les ont e´te´ estime´s par le rapport de vraisemblance et l’indice d’Akaike (AIC).

(2) (17) (50) (14) (4) (3) (9)

Me´diane (1er–3e quartile) Indice de Townsend

4. Re´sultats

15 (7) 168 (77) 36 (16)

2,5 (0,01–4,86)

IDE : infirmier diploˆme´ d’E´tat ; CMU : couverture me´dicale universelle ; variable continue exprime´e par la me´diane, le 1er et le 3e quartile ; variable qualitative exprime´e en effectif et proportion.

4.1. Population e´tudie´e Deux cent trente-sept patients dialyse´s ont e´te´ interroge´s, et 18 patients ont e´te´ exclus de l’e´tude conforme´ment aux crite`res d’exclusion (2 pour refus, 16 pour troubles cognitifs, 2 ne parlaient pas franc¸ais, 7 patients dialysaient depuis moins de 3 mois). Parmi les 219 patients restants, l’aˆge moyen e´tait de 72 ans  8 ans et le sex-ratio de 1,6. Les caracte´ristiques me´dicales sont de´taille´es dans le Tableau 1 et les caracte´ristiques socio-e´conomiques dans le Tableau 2. 4.2. Patients he´modialyse´s avec suivi par un me´decin ge´ne´raliste Parmi les 219 patients de l’e´tude, 47 % (103/219) n’avaient pas de suivi par un me´decin ge´ne´raliste et e´taient pris en charge exclusivement par leur ne´phrologue pour leurs soins primaires. Parmi les patients encore suivis par un me´decin ge´ne´raliste, 26 % (57/219) avaient un suivi re´gulier par leur me´decin ge´ne´raliste. Enfin, 27 % (59/219) des patients continuaient de consulter occasionnellement leur ge´ne´raliste pour des proble`mes intercurrents, mais leur suivi e´tait assure´ par le ne´phrologue ; ce dernier e´tait alors conside´re´ comme le me´decin de soins primaires pour ce groupe de patients (Fig. 1).

Fig. 1. Me´decin de soins primaires des patients dialyse´s.

4.3. Motif de non-recours au ge´ne´raliste comme me´decin de soins primaires Les patients dont le me´decin de soins primaires e´tait le ne´phrologue ont e´te´ interroge´s sur la raison principale de l’absence

Pour citer cet article : Be´chade C, et al. Qui est le me´decin de soins primaires du patient traite´ par he´modialyse ? Ne´phrol ther (2013), http://dx.doi.org/10.1016/j.nephro.2013.09.005

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Tableau 3 Analyse bivarie´e : lien entre les caracte´ristiques me´dicales et le ge´ne´raliste comme me´decin de soins primaires.

Aˆge ˆ ge, A ˆ ge, A ˆ ge, A ˆ ge, A

1er quantile quantile (60,1–71,7) quantile (71,7–80,9) quantile (80,9–99,2)

RR

IC 95 %

1,01 Re´f. 0,96 1,00 1,75

1,00–1,03 – 0,47–1,99 0,49–2,06 0,98–3,33

Tableau 4 Analyse bivarie´e : lien entre les caracte´ristiques socio-e´conomiques et le ge´ne´raliste comme me´decin de soins primaires. RR

IC 95 %

Vie en institution

2,14

1,22–3,33

Suivi infirmier a` domicile

1,94

1,17–3,00

Be´ne´ficiaires de la CMU

1,82

0,76–3,17

Protection sociale comple´mentaire Absence CMU comple´mentaire Mutuelle, compagnie d’assurance

Re´f. 1,41 0,96

– 0,35–5,04 0,47–2,85

Niveau d’e´tude Sortie de l’enseignement sans diploˆme Certificat d’e´tudes primaires BEPC, BEP, CAP Bac, brevet supe´rieur, brevet professionnel Bac + 2 Bac + 4 et plus

Re´f. 1,02 0,81 0,19 0,65 0,54

– 0,59–1,79 0,45–1,44 0,01–0,82 0,11–1,82 0,09–1,56

Sexe

1,28

0,81–2,00

Score de Charlson 1er quantile Quantile (4–5) Quantile (5–6) Quantile (6–12)

Re´f. 0,66 0,98 1,63

– 0,25–1,50 0,48–1,96 0,92–3,03

Anciennete´ en dialyse

0,98

0,94–1,02

Anciennete´ en dialyse supe´rieure a` 12 mois

0,45

0,29–0,74

Centre de dialyse Centre 1 Centre 2 Centre 3 Centre 4

Re´f. 1,16 0,41 0,51

– 0,66–1,87 0,17–0,82 0,25–0,92

Activite´ actuelle En activite´ Retraite´ ou pre´-retraite´ Choˆmage ou sans activite´

Re´f. 1,00 0,83

– 0,49–2,99 0,31–2,74

Temps de parcours domicile-centre de dialyse

1,00

0,98–1,01

Townsend

0,99

0,92–1,05

CMU : couverture me´dicale universelle.

de suivi par un ge´ne´raliste. Parmi les 162 patients ayant un ne´phrologue comme me´decin de soins primaires, 120 ont mis en avant le fait d’eˆtre vus re´gulie`rement par un ne´phrologue au cours de leurs se´ances de dialyse, 20 conside´raient que le me´decin ge´ne´raliste n’e´tait plus assez au courant de leur dossier. Pour 12 patients, le me´decin ge´ne´raliste n’e´tait plus compe´tent du fait de leur insuffisance re´nale terminale. Pour 5 patients, le me´decin ge´ne´raliste s’e´tait de´clare´ incompe´tent pour ge´rer les soins primaires en raison du traitement par dialyse. 4.4. Facteurs associe´s au non-recours au me´decin ge´ne´raliste Nous avons e´tudie´ la liaison entre les facteurs socio-e´conomiques, me´dicaux ou ge´ographiques et le fait d’avoir un me´decin ge´ne´raliste comme me´decin de soins primaires. Les Tableaux 3 et 4 correspondent a` l’analyse bivarie´e de´crivant la liaison entre le me´decin ge´ne´raliste comme me´decin de soins primaires et respectivement les donne´es me´dicales et socio-e´conomiques. L’anciennete´ en dialyse supe´rieure a` 12 mois (risque relatif [RR] 0,45 ; IC 95 % 0,29–0,74) et le centre de dialyse (RR 0,41, IC 95 % 0,17–0,82 pour le centre 3 ; et RR 0,51, IC 95 % 0,25–0,92 pour le centre 4) e´taient statistiquement significatifs, de meˆme que les variables vies en institution (RR 2,14 ; IC 95 % 1,22–3,33) et le suivi infirmier a` domicile (RR 1,94 ; IC 95 % 1,17–3,00). En analyse multivarie´e, la vie en institution e´tait associe´e a` un recours plus important au me´decin ge´ne´raliste (RR 1,97 ; IC 95 %

Tableau 5 Variables associe´es au me´decin ge´ne´raliste comme me´decin de soins primaires, analyse multivarie´e avec un mode`le de re´gression log-binomiale. Variables

RR

IC 95 %

Vie en institution Dure´e de dialyse > 12 mois Dialyse en clinique prive´e

1,97 0,59 0,60

1,14–3,03 0,36–0,93 0,29–1,07

1,14–3,03), alors que l’anciennete´ en dialyse e´tait associe´e a` un moindre recours au ge´ne´raliste (RR 0,59 ; IC 95 % 0,36–0,93) (Tableau 5). Un mode`le mixte avec le centre de traitement comme effet ale´atoire et le temps en dialyse, ainsi que la vie en institution comme effet fixe a e´te´ utilise´ afin de confirmer les re´sultats (Tableau 6). 4.5. Accord du patient pour un suivi avec le me´decin ge´ne´raliste La majorite´ des patients ont refuse´ de reprendre un suivi par un me´decin ge´ne´raliste (Fig. 2) : 109 patients e´taient oppose´s a` cette ide´e, 29 e´taient sans opinion et seuls 24 patients e´taient favorables a` la proposition de reprendre un suivi par le me´decin traitant. 5. Discussion Ce travail montre que le ne´phrologue est, dans la majorite´ des cas, le me´decin de soins primaires des patients he´modialyse´s

Fig. 2. Souhait des patients de reprendre un suivi re´gulier par un me´decin ge´ne´raliste.

Pour citer cet article : Be´chade C, et al. Qui est le me´decin de soins primaires du patient traite´ par he´modialyse ? Ne´phrol ther (2013), http://dx.doi.org/10.1016/j.nephro.2013.09.005

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NEPHRO-690; No. of Pages 6 C. Be´chade et al. / Ne´phrologie & The´rapeutique xxx (2013) xxx–xxx Tableau 6 Variables associe´es au me´decin ge´ne´raliste comme me´decin de soins primaires, analyse multivarie´e avec centre de dialyse en effet ale´atoire. Variables

RR

Valeur de p

Vie en institution Dure´e de dialyse > 12 mois

3,22 0,52

0,01 0,04

puisque seuls 26 % des patients ont un suivi re´gulier par leur me´decin ge´ne´raliste. A` notre connaissance, il n’existe que deux e´tudes s’e´tant inte´resse´es a` cette proble´matique :  une enqueˆte canadienne re´alise´e en 2002 aupre`s de 163 patients en he´modialyse ou en dialyse pe´ritone´ale a montre´ que 87 % des patients interroge´s ont de´clare´ avoir un me´decin ge´ne´raliste [5]. La variable d’inte´reˆt e´tait la consultation d’un me´decin ge´ne´raliste en cas de proble`me de sante´ non lie´ a` la dialyse ; la proportion de patients vus au moins trimestriellement par un ge´ne´raliste n’e´tait pas pre´cise´e. Cependant, ce travail a montre´ que seuls 56 % des patients ont consulte´ un me´decin ge´ne´raliste plus d’une fois par an, correspondant aux re´sultats observe´s dans notre enqueˆte puisque 53 % des patients interroge´s ont consulte´ plus de deux fois un me´decin ge´ne´raliste au cours de l’anne´e ;  une e´tude re´alise´e aux E´tats-Unis s’est inte´resse´e au roˆle des ne´phrologues dans la gestion des soins primaires des patients he´modialyse´s [6]. Holley et al., en interrogeant 233 ne´phrologues, ont montre´ que ceux-ci estiment a` 20 % la proportion de patients dialyse´s ayant un me´decin de soins primaires diffe´rent du ne´phrologue. Dans cette e´tude, le crite`re utilise´ pour de´finir le me´decin de soins primaires n’e´tait pas spe´cifie´ et semblait subjectif puisqu’il s’agissait de l’appre´ciation de´clarative du ne´phrologue en charge du patient.

Pour les patients interroge´s, le recours au ne´phrologue comme me´decin de soins primaires est essentiellement lie´ a` la possibilite´ de voir un me´decin pendant la se´ance d’he´modialyse. En outre, une anciennete´ en dialyse supe´rieure a` 12 mois est associe´e a` un moindre recours au ge´ne´raliste, traduisant une perte de suivi par le ge´ne´raliste au cours du temps. Les pratiques me´dicales au sein de chaque structure sont probablement en partie implique´es puisque des diffe´rences de recours au me´decin ge´ne´raliste sont constate´es selon les centres de dialyse. Nos donne´es montrent qu’une fois le transfert de prise en charge re´alise´, la majorite´ des patients ne souhaite pas eˆtre a` nouveau suivi par un omnipraticien. Notre e´tude ne met pas en e´vidence d’association entre des facteurs socio-e´conomiques ou ge´ographiques et un moindre recours au me´decin ge´ne´raliste. Cette observation pourrait s’expliquer par le fait que tous les patients dialyse´s be´ne´ficient d’une prise en charge au titre de l’affection de longue dure´e, l’ensemble des soins e´tant inte´gralement pris en charge s’ils sont en rapport avec l’insuffisance re´nale chronique terminale [7]. La vie en institution est associe´e a` un recours plus e´leve´ au me´decin ge´ne´raliste. Il est vraisemblable que cela soit lie´ a` l’obligation pour le patient de de´clarer un me´decin libe´ral capable de se de´placer a` l’institution comme me´decin traitant a` l’admission dans l’e´tablissement [8]. La prise en charge des soins primaires par les ne´phrologues semble comporter certaines limites. En effet, le temps consacre´ par les ne´phrologues aux soins primaires de leurs patients pourrait eˆtre limite´ dans l’avenir par diffe´rents e´le´ments de´mographiques et organisationnels. En 2002, en France, il existait 1326 ne´phrologues en activite´ ; le nombre de ne´phrologues en formation e´tait infe´rieur au nombre de de´parts a` la retraite pre´vus avant 2010. De plus, la moyenne nationale e´tait de 22 ne´phrologues par million

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d’habitants, mais il existait d’importantes disparite´s ge´ographiques [9]. L’augmentation du nombre de ne´phrologues peut donc, dans certaines re´gions, eˆtre insuffisante par rapport a` l’accroissement du nombre de patients insuffisants re´naux chroniques ne´cessitant une prise en charge spe´cialise´e. De plus, certains aspects de la prise en charge peuvent eˆtre non pris en compte par le ne´phrologue. Holley et al. ont ainsi montre´ que seules 13 % des femmes en aˆge de procre´er suivies en he´modialyse ont discute´ de contraception et/ou de grossesse avec leur ne´phrologue alors que le taux de grossesses dans cette population est de 4 % [10]. Enfin, une e´tude canadienne pose e´galement la question de la formation des ne´phrologues vis-a`-vis des soins primaires [5]. Bien que la majorite´ d’entre eux se sentent compe´tents dans ce domaine, moins d’un tiers a participe´ a` un congre`s relatif aux soins primaires au cours des trois dernie`res anne´es, et aucune revue me´dicale de soins primaires n’est cite´e dans les journaux me´dicaux les plus fre´quemment lus par les ne´phrologues. La place du me´decin ge´ne´raliste au sein de la prise en charge des soins primaires des he´modialyse´s pourrait eˆtre rede´finie. L’importance de la collaboration entre praticiens a fait l’objet de quelques e´tudes. Selon une e´tude ame´ricaine mene´e en 2004 sur des patients he´modialyse´s [11], il a e´te´ montre´ qu’une plus grande fre´quence des consultations me´dicales est associe´e a` une meilleure satisfaction des patients et a` une meilleure adhe´rence vis-a`-vis de leurs traitements de supple´ance, meˆme si la survie et l’hospitalisation ne de´pendaient pas de la fre´quence des consultations. Toutefois, l’organisation du syste`me de soins aux E´tats-Unis est tre`s diffe´rente de celle qui existe dans notre pays. En France, le me´decin re´fe´rent peut intervenir dans le parcours de soins du patient insuffisant re´nal chronique, notamment pour de´cider d’une initiation de la dialyse. De plus, il a e´te´ montre´ que le me´decin ge´ne´raliste peut participer a` la discussion et a` la prise de de´cision d’arreˆt de dialyse, comme c’est le cas dans l’unite´ de concertation e´thique en ne´phrologie de´veloppe´e dans le bassin grenoblois [12]. Enfin, le de´veloppement des techniques de dialyse a` domicile est e´galement un e´le´ment a` prendre en compte. En effet, notre travail montre que le cabinet du me´decin ge´ne´raliste se situe en moyenne a` deux minutes du domicile du patient, alors que le temps moyen de transport jusqu’au centre de dialyse est de 18 minutes. Ce re´sultat est confirme´ par l’institut de recherche et documentation en e´conomie de la sante´ (Irdes), qui montre qu’au niveau national, la distance domicile-cabinet du me´decin ge´ne´raliste est de 600 m en moyenne [13], avec toutefois des disparite´s selon les re´gions.

6. Conclusion La proximite´ ge´ographique du me´decin ge´ne´raliste et sa formation spe´cifique concernant la prise en charge des soins primaires sont donc des arguments forts pour re´investir le me´decin ge´ne´raliste dans la prise en charge du patient dialyse´, d’autant que la de´mographie ne´phrologique actuelle ne suffit pas a` couvrir les besoins croissants en soins primaires de ces patients. Toutefois, il semble difficile de re´inte´grer le me´decin ge´ne´raliste dans la prise en charge du patient dialyse´ lorsque le suivi a e´te´ interrompu, et il faut probablement veiller a` ce que la relation du patient avec son ge´ne´raliste soit pre´serve´e lors de la mise en dialyse afin qu’elle puisse perdurer. En effet, selon un questionnaire adresse´ en Lorraine aux me´decins traitants, 42 % des ge´ne´ralistes conside´raient qu’ils perdaient leur patient de vue lorsqu’ils l’envoyaient au ne´phrologue [14]. Une transmission d’informations entre le centre de traitement et le me´decin ge´ne´raliste doit eˆtre e´tablie pour e´viter les ruptures de suivi. La mise en place de programmes d’e´ducation the´rapeutique, de´finis par l’OMS comme des programmes visant « a` aider les

Pour citer cet article : Be´chade C, et al. Qui est le me´decin de soins primaires du patient traite´ par he´modialyse ? Ne´phrol ther (2013), http://dx.doi.org/10.1016/j.nephro.2013.09.005

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patients a` acque´rir ou maintenir les compe´tences dont ils ont besoin pour ge´rer au mieux leur vie avec une maladie chronique », au stade pre´coce de l’insuffisance re´nale chronique, permet l’intervention de plusieurs acteurs, comme les infirmiers d’e´ducation the´rapeutique, la die´te´ticienne, la psychologue. . . Ces programmes devraient e´galement permettre de maintenir la relation entre me´decin ge´ne´raliste et ne´phrologue en amont de la mise en dialyse. Enfin, une formation spe´cifique du ge´ne´raliste prenant en charge un patient traite´ par dialyse devrait eˆtre mise en place. De´claration d’inte´reˆts Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article. Re´fe´rences [1] Donaldson MS, Vanselow NA. The nature of primary care. J Fam Pract 1996;42(2):113–6. [2] Re´seau e´pide´miologie et information en ne´phrologie (REIN). Rapport annuel 2009. www.soc-nephrologie.org/PDF/enephro/registres/rapport_2009/rapport_2009.pdf. [3] Conseil national de l’Ordre des me´decins. Atlas de la de´mographie me´dicale en France, situation au 1er janvier 2009. [4] Holley JL. Nephrologists as primary care providers: a review of the issues. Am J Kidney Dis 1998;31(4):574–83.

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Pour citer cet article : Be´chade C, et al. Qui est le me´decin de soins primaires du patient traite´ par he´modialyse ? Ne´phrol ther (2013), http://dx.doi.org/10.1016/j.nephro.2013.09.005

[Who is the physician in charge with the primary care of the dialysis patients?].

The role played by nephrologists in hemodialysis patients' primary care is not well known. We hypothesized that primary care are provided by nephrolog...
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