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ANNPLA-1069; No. of Pages 30 Annales de chirurgie plastique esthétique (2014) xxx, xxx—xxx

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Rhinoplastie de fente primaire et secondaire Cleft rhinoplasty, from primary to secondary surgery Jean-Claude Talmant *, Jean-Christian Talmant ´ tence de traitement des fentes labio-maxillo-palatines Des Pays de la Chirurgie plastique, centre de compe Loire, clinique Jules-Verne, 2, route de Paris, 44300 Nantes, France

MOTS CLÉS Fente labiale ; Nez ; Développement maxillo-facial ; Ventilation nasale

Résumé En dépit de 50 ans de statistiques, de congrès et de publications le nez de fente reste une énigme. Seul le retentissement esthétique de cette déformation a stimulé la multiplication de recettes qui ambitionnent plus de la camoufler que de rétablir une anatomie normale et fonctionnelle. La complexité réelle de la tâche, les résultats souvent décevants, la méconnaissance profonde de la nécessité d’une ventilation nasale précoce et l’opprobre académique accablant les tentatives toujours imparfaites de correction chez l’enfant ont conduit à une relative résignation. Ce sujet nous a préoccupés pendant plus de 40 ans d’une recherche prudente mais obstinée. Nos conclusions, exposées ici, ont au minimum 17 ans de recul et permettent d’affirmer que les cartilages des nez de fente sont simplement déformés, que l’on peut faire des dissections souspériostées et sous-périchondrales étendues à partir de l’âge de 6 mois en respectant les croissances nasales ou maxillaires, que la seule reposition des structures suffit sous réserve de tout mettre en œuvre pour la maîtrise des phénomènes cicatriciels. Il n’y a pas de compromis à faire pour favoriser une fonction par rapport à une autre, la ventilation nasale étant à notre avis la fonction la plus importante pour une croissance faciale normale. En bref, la chirurgie nasale infantile justifiée par une fente labio-maxillo-palatine est nécessaire dès la première opération, à partir de l’âge de six mois, et doit être entreprise avec une double exigence esthétique et fonctionnelle en ayant une connaissance profonde de la déformation, des techniques chirurgicales utiles, et de l’intérêt de respecter une chronologie précise pour en tirer le meilleur parti. L’attention consacrée à la restauration nasale ne peut dans les fentes se limiter aux cartilages du nez. Toute la structure nasale est concernée, en particulier sa charpente osseuse, dont la largeur au niveau de l’orifice piriforme et au niveau du plancher des fosses nasales est totalement influencée par chacun des temps opératoires sur la lèvre, le palais, et la fente alvéolaire. L’intrication de tous ces facteurs appelle des réponses intelligentes, c’est-à-dire adaptées au diagnostic exact de la déformation, mesurées, c’est-à-dire cohérentes sachant que tout geste local doit être envisagé dans un cadre global, sous peine d’assister à la même cascade d’effets surprenants mais prévisibles qu’un chien provoque dans un jeu de quilles. Après la chirurgie primaire, des compléments de correction peuvent être utiles au cours de l’enfance pour des raisons aussi bien esthétiques que fonctionnelles. Chez l’adolescent ou l’adulte, la rhinoplastie pour séquelles de fente pourra être une simple rhinoplastie d’harmonisation si cela apparaît justifié après une bonne correction nasale précoce

* Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (J.-C. Talmant). http://dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004 0294-1260/# 2014 Publié par Elsevier Masson SAS.

Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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J.-C. Talmant, J.-C. Talmant et une croissance normale, ou une reprise labio-nasale plus ou moins complexe pour les séquelles majeures habituelles. Dans ce dernier cas, le diagnostic doit tenir compte de toutes les déformations résiduelles y compris labiales et alvéolaires et conduire à une reprise globale reprenant en tout point les principes et techniques de la chirurgie primaire : ce qui n’a pas été fait lors du traitement primaire doit être réalisé secondairement, toutes les structures étant présentes simplement déformées et piégées par les cicatrices. La rhinoplastie des fentes, qu’elle soit primaire ou secondaire doit être mise en œuvre par des opérateurs rompus à la chirurgie des fentes et si possible à toutes les chirurgies nasales réparatrices et esthétiques. # 2014 Publié par Elsevier Masson SAS.

KEYWORDS Cleft lip; Nose; Maxillofacial growth; Nasal breathing

Summary Despite fifty years of statistics, congresses, publications, the cleft nose remains an enigma to the great majority of cleft specialists. Most of the published papers give recipes to camouflage the cleft deformity, very few are concerned by the functional anatomy and its relation with facial growth. The complexity of the matter, the results frequently disappointing, the lack of awareness of the necessity of early nasal breathing, and the academic condemnation of any imperfect attempt to correct the nose at the time of the first operation have led to resignation. For the last forty years, we have been involved in a careful and obstinate research about the early correction of the cleft nose deformity. We wish to present our conclusions in this chapter with at least 17 years of follow-up. They are as following: in cleft patients the nasal cartilages are only deformed. We can achieve sub periosteal and sub perichondrial dissections by 6 months of age without being harmful for facial and nasal growth. Repositioning accurately the nasal structures is enough if we are able to control the healing process and prevent endonasal wound contraction. We have not to do any compromise and favor one function with regard to the others, nasal ventilation being the most important for a good facial growth. In a word, nasal pediatric surgery is necessary at the time of the first operation from 6 months of age and should be carried on with a double demand, aesthetic and functional. To achieve this goal, we must have a sound knowledge of the cleft nose deformity, of the adequate surgical techniques and of the logic chronology to reach the best result. The nose repair cannot be limited to the nasal cartilages. The whole nasal structure is concerned especially its bony framework, the width of which at the level of the piriform orifice and the nasal floor depends on the outcomes of any surgical step that it would relate to the lip, palate or alveolar closure. Interaction of all these factors calls for an appropriate answer in adequation with the diagnosis of the deformity and a coherent answer as we know that any local action may induce an unfavorable chain reaction and should integrate a global and logic project. After the primary surgery, additional correction for aesthetic or functional purpose as well, may be useful during the period of growth. For cleft teenagers or adults, the rhinoplasty can simply be indicated for harmonization after a good primary nasal correction and optimal facial growth. On the contrary, the rhinoplasty may be more or less a complex operation for the usual and severe deformities. In the last case, the diagnosis must take into account all the residual deformities, even the labial and alveolar ones, and the treatment plan integrate all the principles and techniques of the primary surgery. What has not been done at the time of the primary surgery, should be done secondarily: all the structures are present, only deformed and embedded in scarred tissues. Primary or secondary cleft rhinoplasty must be undertaken by surgeons accustomed to cleft patients, but also trained in the other fields of nasal surgery, aesthetic and reconstructive. # 2014 Published by Elsevier Masson SAS.

Introduction La rhinoplastie est un temps essentiel du traitement primaire des fentes et on ne peut la réduire, comme cela a été généralement admis jusqu’à ce jour, à un problème esthétique dont la solution relèverait en fin de croissance de la compétence d’un chirurgien spécialiste du nez mais étranger à l’ensemble du traitement fonctionnel de la fente. Le langage est source d’incompréhension surtout quand on aborde un domaine aussi chargé d’idées reçues et d’interdits dogmatiques. Ce que nous voulons dire c’est que tout dans la fente labio-maxillo-palatine y compris sa dénomination en fait une malformation buccale alors qu’il s’agit d’une malformation naso-maxillaire. Le but de chacune des étapes du

traitement primaire doit être de restaurer un nez normal, non seulement au niveau des cartilages, mais aussi du squelette osseux, en d’autres termes des parois latérales des fosses nasales (Fig. 1). La largeur du nez osseux dépend complètement de la qualité de la réparation du palais osseux et de l’arcade alvéolaire. Un autre point à souligner est la chronologie : établir un mode de respiration nasale dès la première opération est primordial [1—4]. Aujourd’hui, on sait que la reposition du cartilage alaire simultanée de la fermeture labiale respecte la croissance nasale. Sous réserve d’une technique rigoureuse et d’un bon contrôle des phénomènes cicatriciels, elle est sûre avec plus de 40 ans de recul dans les fentes unilatérales et plus de 17 ans dans les fentes bilatérales. Ce point est acquis [5—7].

Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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Figure 1 Ces coupes de scanner et reconstructions 3D de la face d’un enfant de 3 ans et demi avec une fente totale labio-maxillopalatine gauche, montrent le rétrécissement marqué du nez osseux du côté de la fente. On y voit une flexion du maxillaire sousorbitaire des deux côtés qui succède à la fermeture très précoce de la lèvre à l’âge de 2 semaines et aggravée par une fermeture du palais ayant laissé des zones osseuses dénudées dont les cicatrices sont très rétractiles. Avant toute chirurgie nasale, les structures osseuses du nez, particulièrement l’orifice piriforme et le plancher de la fosse nasale fendue sont gravement altérées. La classique rhinoplastie de fente viendra trop tard pour changer cette situation et ne sera qu’une opération de camouflage.

Le second point est le rôle essentiel, largement méconnu, de la ventilation nasale sur la croissance faciale [8]. Il y a 45 ans Jean Delaire avait montré l’importance d’une chirurgie fonctionnelle réinsérant les muscles labio-narinaires sur la cloison nasale [9]. Nous avons rapidement compris que cette réparation musculaire n’est pas à elle seule décisive pour une bonne croissance faciale, alors que parmi les différentes fonctions la ventilation nasale joue un rôle prépondérant. Notre expérience actuelle, 17 ans après la dernière modification de notre approche fonctionnelle nasale en est la confirmation. Si la compétence labiale et une bonne perméabilité nasale doivent être acquises dès la première opération, nous avons ensuite à préserver cette dernière tout au long des étapes du traitement. Les séquelles cicatricielles labiales, nasales et palatines sont la cause majeure des dysfonctions et des

défauts de croissance faciale. La largeur des fosses nasale n’est autre que celle du maxillaire au niveau de la voûte palatine qui est le plancher du nez. La largeur de l’orifice piriforme est le reflet exact du secteur incisif de l’arcade alvéolaire. Quand l’incisive latérale est absente (55 % des fentes totales) son espace doit être maintenu avant qu’il ne soit trop tard, en dentition de lait, pour reconstruire une arcade alvéolaire normale. Le recours à la cicatrisation secondaire de tissus dénudés crée les pires des rétractions et doit être abandonné dans ces régions éminemment fonctionnelles et en croissance comme on l’a fait depuis longtemps pour le traitement des brûlures [10,11]. Warren D.W. a observé que 75 % des patients opérés d’une fente totale, uni ou bilatérale ont une ventilation orale prépondérante [12], et nous savons qu’un pourcentage presque identique de ces patients a un petit maxillaire [13].

Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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Comment se fait-il que la restauration de la ventilation nasale en chirurgie primaire qui relève du simple bon sens commun soit à ce point négligée même dans les pays les plus développés ? L’enseignement officiel qui méconnaît l’influence d’une ventilation nasale persiste dans sa grande majorité à interdire chez l’enfant la chirurgie nasale, les dissections souspériostées au niveau du maxillaire, de même que les dissections sous-périchondrales. Millard lui-même en 1967 déconseille formellement la correction de la narine en même temps que la fermeture labiale en raison des sténoses narinaires qu’il a rencontrées après ses tentatives et repousse toute chirurgie nasale après l’âge de 16 ans. Cela ne laisse que peu d’options pour améliorer la prise en charge des fentes labio-maxillo-palatines dont nombre de protocoles restent inchangés depuis 30 à 40 ans, si l’on excepte la particularité dans notre pays des nombreuses tentatives de fermetures labiales néonatales destinées avant tout à favoriser l’acceptation du handicap par la mère. Il est plus que vraisemblable que ce dernier choix se révélera néfaste, une grande étude mondiale ayant montré en 1987 [14] que les interventions faites avant l’âge de 4 mois majoraient les troubles de croissance. La Fig. 1 donne une bonne explication à cette observation. Dans notre protocole, la dernière modification introduite il y a 17 ans a été l’usage systématique d’un conformateur narinaire amovible pendant les 4 premiers mois suivant la réparation nasale primaire [15]. Cette précaution essayée pour prévenir la rétraction de la columelle après son élongation simultanée de la fermeture labiale primaire des fentes bilatérales s’est montrée si efficace qu’elle fut rapidement étendue à la correction des fentes unilatérales avec le même succès. Depuis l’adoption du conformateur narinaire, ces bébés dorment la bouche fermée presque tous sans exception, et les maxillaires sont bien plus proches de la normale, entre 15 et 16 ans, surtout dans les fentes bilatérales symétriques dont la ligne médiane est normale. Notre expérience de 34 ans de chirurgie nasale secondaire chez les respirateurs buccaux [16] opérés d’une fente nous a appris qu’ils n’adoptent pas facilement un mode de respiration nasale au contraire du patient standard qui retrouve rapidement sa ventilation nasale après une adénoïdectomie. Pourquoi est-ce différent ? Dans le cas d’une fente complète, le nouveau-né respire par sa fente. Un mode de ventilation nasale n’est pas établi à la naissance et il n’a pas déjà une représentation corticale de sa narine. Le nouveau-né n’a pas fait la croissance verticale de son cou et n’a pas d’oropharynx. La ventilation orale à cet âge est difficile et inconfortable car au repos il n’y a pas de place pour abaisser la langue. Ceci peut expliquer comment une mauvaise réparation nasale contraignant le nourrisson à une ventilation orale laisse une empreinte corticale particulière difficile à effacer. Le bon moment pour établir un mode de ventilation nasale est la première opération. La transformation d’un ventilateur oral obligé en ventilateur nasal risque en effet d’être trop lente pour influencer favorablement la croissance faciale : malgré la perméabilité rétablie, la dysfonction persiste avec toutes ses conséquences. Nos dix premiers cas successifs de fentes bilatérales opérées depuis 17 ans plaident en faveur d’un potentiel de croissance normal chez ces patients ainsi que du rôle primordial de l’installation d’un mode de ventilation nasale dès

la première opération. À mesure que nous évaluons nos patients avec plus de recul, nous prenons conscience en même temps de l’extrême complexité de cette pathologie, toujours différente d’un patient à l’autre, où l’occlusion et la croissance dépendent aussi du défet osseux primaire, des agénésies dentaires, des tendances familiales à une classe II ou III d’Angle, du terrain cicatriciel, et bien sûr des circonstances socioéconomiques. Il y a dans cette équation de multiples inconnues, mais le chirurgien qui se préoccupe de la ventilation nasale apporte à ses patients un équilibre fonctionnel bien plus favorable à leur évolution de croissance avec moins de chirurgie secondaire et une qualité esthétique précoce essentielle à leur épanouissement scolaire et social.

L’approche fonctionnelle nasale : une vision globale avec deux principes Elle concerne toutes les fonctions Aujourd’hui, le choix judicieux de l’âge de la première opération, des techniques et de leur chronologie, permet de restaurer chacune des fonctions avec une meilleure qualité de vie pendant toute l’enfance. L’inter action de toutes les fonctions est telle que l’on ne peut pas faire un compromis sans nuire à l’ensemble.

Elle est une préoccupation à chaque temps opératoire Les gestes techniques qui impactent le nez ne se limitent pas à la reposition du cartilage alaire. La séquelle nasale d’une fente uni- ou bilatérale est rarement univoque. L’ensemble du nez doit être fonctionnel, et ceci implique :  une bonne réparation musculaire labio-narinaire qui influence la largeur du seuil narinaire et l’effacement de la bride du vestibule narinaire ;  la correction complète de la narine doit absolument être simultanée de celle de la lèvre car les déformations sont intriquées. La reposition primaire du cartilage alaire conditionne la perméabilité de l’orifice narinaire et de la valve nasale, la programmation initiale d’une ventilation nasale et la qualité esthétique de la restauration nasale ;  une réparation du palais dur qui préserve la largeur de la voûte palatine et en même temps celle du plancher nasal ;  une fermeture de la fente alvéolaire avec greffe osseuse qui respecte la largeur de l’orifice piriforme et de la valve nasale en maintenant l’espace de l’incisive latérale si elle est absente. Quand cela est nécessaire dans les fentes unilatérales, une amélioration de la perméabilité nasale par correction secondaire précoce des déformations septales et de l’hypertrophie du cornet inférieur du côté opposé à la fente. Lors de chacune des interventions la recherche du meilleur résultat anatomique, à la fois esthétique et fonctionnel exige la plus grande maîtrise des conséquences cicatricielles. Cette prise de conscience concernant les tensions immédiates créées par la fermeture labiale sur des structures malléables et les effets des rétractions nasales

Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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postopératoires est trop négligée par la majorité des protocoles. Sa prise en compte associée à une bonne connaissance de l’anatomie explique l’essentiel des progrès récents les plus spectaculaires.

Anatomie pathologique des fentes. Déductions thérapeutiques On peut aujourd’hui comprendre la genèse de toutes les déformations observées à la naissance dans les fentes uni ou bilatérales. Mécanique de l’enveloppe faciale [17] L’enveloppe faciale est l’ensemble des tissus mous de la face : peau, muscles et muqueuse. Ce concept global rend mieux compte qu’une étude limitée aux seuls muscles de l’influence morphogène des parties molles dont la mécanique répond aux lois de la théorie de l’élasticité. Avant même l’apparition des muscles, l’ouverture de la fente orale modifie la répartition des tensions au sein de l’enveloppe faciale fœtale. À la manière de ce que l’on observe quand on fait une boutonnière dans une membrane élastique, les forces locales migrent en dehors des commissures de la fente orale et se concentrent de chaque côté sous la forme de deux replis verticaux, que Bleschmidt a observé dès le milieu de la huitième semaine de vie in utero [18]. Les règles qui régissent la répartition des forces participent à l’organisation du réseau musculaire de la face : dès que les précurseurs des cellules musculaires migrent du deuxième arc branchial vers la face, et deviennent contractiles, ils s’orientent selon l’axe des tensions là où ils se trouvent et se regroupent en faisceaux musculaires, construisant un réseau symétrique. En cas de fente labiale la rupture de l’enveloppe faciale change la distribution des tensions au sein de l’enveloppe et en conséquence celle des muscles [19—21]. Le muscle le plus modifié est le muscle Nasalis, composé de deux parties : le transverse à la partie supérieure et le myrtiforme qui s’insère en bas sur le maxillaire. Ce complexe est le seul muscle du SMAS qui ait deux insertions fixes, de sorte qu’après la rupture de l’enveloppe faciale il change de fonction en devenant son point d’ancrage antérieur du côté de la fente. Seul élément capable de résister au recul de l’enveloppe il donne l’impression de migrer en avant par rapport aux structures voisines. Le corps musculaire du myrtiforme en glissant sur la crus latérale du cartilage alaire la contraint à une rotation caudale avant de s’insérer sur l’extrémité antérieure du petit fragment maxillaire en avant de la tête du cornet. Victor Veau [22] qui avait remarqué son insertion très puissante l’avait appelé « le muscle de la fente ». C’est lui qui soulève avec le bord caudal de la crus latérale le relief de la bride verticale du vestibule narinaire dont on doit bien connaître l’anatomie si particulière pour la corriger et reposer le cartilage alaire en le libérant de l’emprise du Myrtiforme (Fig. 2). On comprend aussi que la réinsertion du myrtiforme sur l’épine nasale antérieure préconisée dans la réparation musculaire fonctionnelle de Delaire va à l’opposé du but recherché : en tractant la bride narinaire comme un rideau vers la cloison nasale on obstrue ainsi la valve nasale et on ferme le seuil narinaire.

Figure 2 Représentation schématique du muscle Nasalis dans une fente unilatérale labio-maxillo-palatine. Avec son chef supérieur : le muscle Transverse et son chef inférieur : le muscle Myrtiforme, le muscle Nasalis glisse en avant et en bas, et recouvre la crus latérale du cartilage alaire en la contraignant à une rotation caudale. Le bord caudal du cartilage alaire et la masse musculaire puissante du myrtiforme qui s’insère sur le petit fragment maxillaire juste en avant de la tête du cornet forment l’armature de la bride narinaire qui soulève le vestibule de la narine du côté de la fente (voir aussi la Fig. 7b).

La dynamique de la ventilation fœtale [23] Ce phénomène dynamique presque inconnu il y a 15 ans joue un rôle important dans la morphogenèse du tractus aérien du nez aux poumons et apporte de nouvelles informations sur l’anatomie pathologique des malformations faciales. Le rôle de la ventilation fœtale : le moteur de la croissance faciale. Scott, suivi en cela par Jean Delaire pensait que le moteur de la croissance faciale durant la vie fœtale était la poussée septale liée à sa croissance hormono-dépendante [24]. Pour Delaire, ce rôle se poursuit après la naissance et le septum glissant sur sa gouttière septo-vomérienne tracte le ligament septo-prémaxillaire de Latham qui transmet cette tension au maxillaire. Aujourd’hui, nous comprenons mieux pourquoi le septum a été à tort considéré comme le moteur de la croissance faciale alors qu’il ne fait que transmettre passivement à la manière d’un bélier l’impulsion qu’il reçoit lors de chaque cycle expiratoire de la ventilation fœtale. La ventilation fœtale commence vers la 11e semaine de vie in utero, et même si elle n’est pas permanente le nouveau-né a ventilé pendant six mois avant sa naissance. Le fluide amniotique est incompressible et 800 fois plus lourd que l’air. Ces caractéristiques confèrent à la ventilation fœtale un

Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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J.-C. Talmant, J.-C. Talmant

Figure 3 Ventilation fœtale. a : durant l’inspiration le nez fonctionne comme une tuyère convergente divergente de Laval, avec un col ajustable qui n’est autre que la valve nasale ; b : durant l’expiration le nez fonctionne comme une tuyère convergente. La projection du liquide amniotique contre la capsule nasale distend les cartilages triangulaires retenus par leur continuité avec le septum, et les dômes des cartilages alaires qui résistent à la force du courant. Celui-ci se réfléchit à angle droit avant de se collecter en un jet qui va sortir de la narine parallèlement à la lèvre supérieure. Chaque expiration projette la capsule nasale en avant qui tire avec elle l’enveloppe faciale et le maxillaire. La ventilation fœtale est le moteur de la croissance faciale antérieure et transversale. Extrait d’une vidéo de Claude Talmant.

rôle morphogène considérable sur l’arbre aérien. À chaque éjection, le fluide amniotique en se réfléchissant sur la capsule nasale la propulse et elle entraîne avec elle l’enveloppe faciale et le maxillaire. La ventilation fœtale, en accord avec la théorie de la matrice fonctionnelle de Moss, est le principal moteur de la croissance faciale (Fig. 3). L’influence de la fente sur la ventilation fœtale. En cas de fente, la perte de pression dans la fosse nasale fendue lors de l’éjection du liquide amniotique explique clairement la faiblesse de la projection et de l’expansion de toutes les structures de ce côté et ainsi l’hypoplasie prémaxillaire et maxillaire que Mooney avait remarquée dès la 14e semaine de vie fœtale [25]. Le gradient de pression entre les deux fosses nasales a bien d’autres conséquences (Fig. 4). La fosse nasale opposée à la fente se dilate sous l’effet de l’hyperpression qui repousse le septum et le vomer vers le côté de la fente avec une dislocation de la jonction septovomérienne. Le fort courant de liquide amniotique soulève le long de la paroi latérale du côté opposé à la fente des replis muqueux excessifs repoussés vers la ligne médiane et qui deviendront les cornets inférieur et moyen dont l’hypertrophie est constante dans la fente unilatérale. L’affaissement du cartilage alaire et du cartilage triangulaire tout le long de sa jonction avec le septum, en fait, la faible projection de toutes les structures faciales et du petit fragment maxillaire du côté de la fente sont la conséquence immédiate de la perte de pression cyclique du liquide de ce côté. Il semble bien que la déformation de la fente unilatérale et le défaut de croissance répondent à un mécanisme de croissance normal opérant dans des conditions modifiées par la fente.

Déformation labio-narinaire bilatérale La déformation de la fente bilatérale est tout simplement la duplication de la déformation unilatérale avec l’avantage de la symétrie et de l’absence de déviation de la ligne médiane.

Figure 4 Document Jean Claude Talmant & David Precious. Coupe frontale passant par les fosses nasales d’un fœtus de 24 semaines avec une fente totale labio-maxillo-palatine gauche. Nous observons l’asymétrie des muscles Nasalis avec la robuste insertion du myrtiforme sur l’extrémité antérieure du petit fragment maxillaire (flèche), et les nombreuses conséquences du gradient de pression du liquide amniotique entre les deux fosses nasales : élargissement de la fosse nasale du côté opposé à la fente (1), étroitesse du côté de la fente (2), avec luxation du cartilage septal de sa gouttière vomérienne (3), affaissement du cartilage triangulaire (4), et de toutes les structures qui ne sont pas sollicitées par l’expansion cyclique de la fosse nasale du côté de la fente.

Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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Rhinoplastie de fente primaire et secondaire Contrairement aux hypothèses qui ont prévalu jusqu’en 1995, la brièveté de la columelle n’est pas la conséquence d’une forme particulière d’hypoplasie qui nécessiterait un apport cutané par plastie on par expansion. Elle n’est pas non plus due à la migration de la columelle dans le philtrum comme le pensait Delaire [26]. L’extrême projection du prémaxillaire de la fente bilatérale accroît l’effet de séparation sur la ligne médiane. Les deux cartilages alaires s’éloignent l’un de l’autre et du septum. La perte de pression lors de l’éjection du liquide amniotique explique que les dômes restent plats. La columelle s’étale dans les téguments de la pointe du nez. Harold McComb [27,28] décrit la déformation d’une manière imagée : la columelle est comme une fermeture Éclair complètement ouverte. Il suffit de la remonter par adossement des crus mésiales et des dômes des cartilages alaires pour la voir réapparaître. Nous avons mis en œuvre cette idée avec une technique personnelle [29] il y a plus de 19 ans approximativement en même temps que Cutting [30], mais après Mulliken [31] et Harold McComb [28].

Le rôle essentiel des dents et le management de l’agénésie de l’incisive latérale [32] Quand on traite la fente alvéolaire, on doit se souvenir que la largeur de l’orifice piriforme et de la valve nasale sont liées à celle de la distance inter canine, c’est-à-dire à celle du prémaxillaire dont le volume dépend du nombre et du volume des incisives (Fig. 5). En cas de fente totale, les incisives latérales temporaire et permanente sont souvent absentes, (55 % des cas) et il faut alors préserver l’espace de l’incisive latérale si l’on veut maintenir la largeur de l’orifice piriforme et donc de la valve nasale de ce côté. En pratique, il faut en dentition temporaire rétablir la largeur intercanine avec une expansion orthopédique par quadhelix avant la gingivopériostéoplastie avec greffe osseuse entre les âges de 4 et 5 ans. Notre recul de plus de 17 ans avec cette pratique confirme son efficacité.

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La fermeture du palais osseux La voûte palatine est le plancher du nez. Il est capital d’éviter toutes les techniques classiques de push back ou de lambeau vomérien en un plan faisant appel à la cicatrisation secondaire de surfaces tissulaires ou osseuses périphériques dénudées qui conduiront aux pires cicatrices, rétractiles à vie. Depuis plus de 33 ans, nous réparons le voile du palais à l’âge de six mois en même temps que la fermeture labiale, selon la chronologie en deux temps décrite par Schweckendiek [33,34]. Au cours de l’année suivante, la fente résiduelle du palais osseux se réduit dans de telles proportions sans déformation de l’arcade qu’il devient possible dans la quasi-totalité des cas de la fermer en deux plans à l’âge de 18 mois avec une vaste dissection mais sans laisser de zone dénudée et sans fistule. Dans les cas très rares où la fermeture totale n’est pas possible à 18 mois, elle sera complétée ultérieurement en même temps que la fermeture de la fente alvéolaire.

Un protocole primaire logique et sans compromis L’enfant atteint d’une fente non syndromique a un potentiel de croissance normal. Nous pensons comme V. Veau que « l’on retrouve sur les deux berges de la fente toutes les structures normales modifiées seulement du fait de la fente » [22]. Toutefois, dans toute fente y compris la plus frustre, la partie la plus antérieure de la branche montante qui est une expansion latérale du prémaxillaire est manquante [35]. Il s’associe à ce défect l’atteinte plus ou moins complète du secteur de l’incisive latérale, manquante dans plus de 50 % des cas de fentes totales. Il faut tenir compte de l’agénésie de l’incisive latérale dont il faut préserver l’espace lors du traitement primaire et tout au long de la croissance pour maintenir la largeur et la symétrie de l’orifice piriforme et de l’arcade maxillaire incisivo canine.

Orthopédie précoce préopératoire Il n’y a aucun avantage durable reconnu à ce jour de l’usage de l’orthopédie passive, dans quelque domaine que ce soit [36—38]. L’orthopédie active est néfaste car elle ferme précocement l’arcade alvéolaire en ignorant le problème de l’agénésie de l’incisive latérale dont nous venons de voir l’importance [39]. Nous n’avons jamais eu recours à cette orthopédie, notre expérience nous ayant montré qu’un maxillaire de fente n’est jamais trop large.

Fermeture primaire de la lèvre et du nez

Figure 5 Document Jean Claude Talmant & David Precious. Coupe frontale du prémaxillaire d’un fœtus de 24 semaines sans fente. Les bourgeons des Incisives centrales de lait sont le support principal du plancher de l’orifice piriforme et du plancher des narines. Cette première fonction des incisives montre aussi que l’influence fonctionnelle de n’importe quelle structure peut changer avec les différentes périodes de la vie.

Opération à six mois Cette réparation ambitieuse et simultanée du voile du palais, de la lèvre et de la narine demande trois heures et demie dans les fentes unilatérales et quatre heures et demie dans les fentes bilatérales. Cela n’est pas possible en période néonatale ou à un stade très précoce en raison des risques anesthésiques, et de la fragilité des structures musculaires du voile et des cartilages du nez.

Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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Figure 6 Tracé des incisions de la technique de rotation avancement de Millard. a : marquage et tatouage des points de référence sur la ligne cutanéo-muqueuse ; b : le lambeau sous-columellaire P sera transposé dans la contre-incision p de la muqueuse septale juste sous le cartilage triangulaire ; c : le lambeau d’avivement du vermillon latéral M sera transposé dans la contre-incision m du vestibule narinaire le long de l’orifice piriforme (lambeau de Muir).

Incisions dans une fente unilatérale Le tracé de rotation avancement de Millard [40] répartit au mieux la peau entre lèvre et nez. La rotation de la berge médiane horizontalise l’arc de Cupidon en ouvrant un espace comblé par l’avancement de la berge latérale. Le lambeau C va à la columelle. L’avancement latéral contrôle l’enroulement de la narine et la largeur du seuil. La cicatrice verticale sur la colonne philtrale et cachée sous la narine répond aux critères des unités esthétiques. L’extension péri alaire, très inesthétique, est inutile. Modification du tracé de Millard pour la reconstruction muqueuse nasale En 1991, nous avons ajouté sur la berge médiane à la partie supérieure de la lèvre un lambeau muqueux triangulaire prélevé sur la face latérale du prémaxillaire [29,41] (dénommé lambeau P) avec un pédicule supérieur basé sur le flanc de la columelle (Fig. 6). Après dissection, le lambeau qui monte avec la columelle est transposé dans une contreincision (p) muqueuse septale sous le cartilage triangulaire (Fig. 6b). Il contribue à l’allongement de la columelle, à la

projection du dôme et contrôle la fermeture de l’angle nasolabial. Latéralement, l’incision du vermillon labial préserve un lambeau à pédicule nasal transposé dans une contre-incision vestibulaire le long de l’orifice piriforme jusqu’à la tête du cornet (Fig. 6c). Il participe à la reconstruction du vestibule et du plancher narinaires (lambeau de Muir). Les dissections sous-périostées et sous-périchondrales La reconstruction musculaire et la correction nasale dépendent avant tout de notre capacité à mouvoir ces structures déformées pour les repositionner en situation normale. L’étendue de la dissection est la clé du succès. Dissection sous-périostée. Elle est frappée d’interdiction dogmatique, car elle nuirait à la croissance faciale. L’étude de Manucci et de Brusati [42] et notre expérience de 40 ans [3,4] démontrent l’inverse. La dissection peu étendue sur le prémaxillaire respecte sa ligne médiane. Par contre latéralement, elle est extensive sur toute la face antérieure du maxillaire. Le périoste est rompu. Juste au-dessus de

Figure 7 Dissection sous-périostée latérale. a : vaste dissection sous-périostée latérale de la face antérieure du maxillaire faisant le tour du pédicule sous-orbitaire, avec élongation du périoste ; b : individualisation de l’insertion du muscle Myrtiforme qui sera sectionnée. Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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Figure 8 Dissection sous-périchondrale des cartilages du nez. La dissection sous-périchondrale sur les deux faces du septum et des cartilages triangulaires communique largement latéralement avec la dissection sous-périostée maxillaire. La dissection du cartilage alaire est uniquement sous-cutanée sur sa face superficielle, sans abord direct.

l’extrémité antérieure du petit fragment maxillaire, la muqueuse vestibulaire est incisée en direction de la tête du cornet, découvrant la solide insertion du muscle myrtiforme, appelé le « muscle de la fente » par Victor Veau. Sa section ouvre l’accès au cartilage triangulaire et à la branche montante vers le haut et au cartilage alaire en bas (Fig. 7 b). La dissection sous-périchondrale. L’interdiction de la dissection sous-périchondrale des cartilages du nez chez l’enfant est plus catégorique encore que celle de la dissection sous-périostée, même en cas de ventilation buccale permanente. Harold McComb [5], Hans Anderl [6], Smahel et al. [7], et nous-même avec un suivi scrupuleux des 20 premiers cas consécutifs de fentes totales pendant plus de 17 ans, avons démontré que ce bannissement est sans fondement scientifique [3,4]. La dissection sous-périchondrale dans une fente unilatérale. Le périchondre est disséqué sur les deux faces du septum (Fig. 8). Puis, la dissection est poursuivie de façon rétrograde de haut en bas sur la face profonde du cartilage triangulaire jusqu’à ce que son bord libre inférieur replié en col de chemise soit complètement dégagé. Ce décollement rejoint latéralement celui de la branche montante du maxillaire. Les ciseaux courbes de Ragnell introduits dans la columelle entre les deux crus mésiales sont poussés jusqu’aux dômes puis inclinés du côté de la fente pour séparer la face superficielle de la crus latérale de sa couverture cutanée. L’adhérence du périchondre au cartilage alaire est beaucoup plus serrée qu’au niveau du septum ou du cartilage triangulaire et il faut la respecter de même que la face endonasale du cartilage alaire est laissée adhérente à son revêtement. Le périchondre est ensuite soulevé de la face superficielle du cartilage triangulaire de dedans en dehors jusqu’à ce que l’on rejoigne latéralement le décollement en avant du maxillaire. Le dissecteur peut alors se mouvoir librement des os propres du nez en haut jusqu’au rebord narinaire en bas ou l’on insiste pour bien séparer les deux plans cutanés de la narine dont le vestibule est plus ou moins éversé par des tissus sous-cutanés excessifs.

On repose le septum sur la ligne médiane en le séparant en avant de sa gouttière vomérienne. La correction complète de la déformation septale n’est entreprise que dans les rares cas où l’éperon septo-vomérien est si saillant et proche de la paroi latéro-nasale du côté de la fente que l’on ne pourrait installer le conformateur narinaire amovible, indispensable durant les quatre premiers mois postopératoires, pour pérenniser la correction initiale. Dans ces cas, la gouttière vomérienne inclinée est redressée par une fracture en bois vert et le cartilage septal est replacé dans sa gouttière après une résection adaptée du cartilage. Sutures muqueuses et suture du muscle Transverse [3,20]. Au niveau de la muqueuse septale, le lambeau P est suturé dans l’espace ouvert par la contre-incision p (Fig. 9a). Latéralement, le lambeau de Muir M est suturé dans l’espace ouvert par la contre-incision m le long de l’orifice piriforme (Fig. 9b) et il participe ensuite à la reconstruction du plancher de la narine avec la muqueuse septale et prémaxillaire (Fig. 9c). Avant suture complète du vestibule labial, ce dernier est suspendu au muscle myrtiforme en regard de la fente alvéolaire par un point résorbable (Fig. 9d). De cette façon, on évite que le muscle myrtiforme ne tracte la bride narinaire comme un rideau vers la ligne médiane en obstruant la valve nasale (voir paragraphe : Mécanique de l’enveloppe faciale), et la reposition de la crus latérale au-dessus du muscle va effacer la bride narinaire. La suture musculaire : orbiculaire de la lèvre et muscles labio-narinaires. La partie profonde et supérieure de l’orbiculaire latéral est suturée à la partie profonde de l’orbiculaire opposé à proximité de l’épine nasale antérieure. Cette réinsertion verticalement ascendante surcroise celle verticalement descendante plus profonde du muscle myrtiforme, ce qui participe à la correction de la distension verticale de la région. Cette suture a pour effet de repousser la narine vers le haut. Il est donc utile de stabiliser auparavant l’aile narinaire par une suture de mono filament passée dans ses muscles de telle façon que son serrage induise un

Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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Figure 9 Sutures muqueuses et du plan profond de la réparation musculaire. a : suture du lambeau muqueux triangulaire souscolumellaire P dans la contre-incision p de la muqueuse septale ; b : suture du lambeau de Muir M dans la contre-incision m le long de l’orifice piriforme en avant de la tête du cornet ; c : suture du plancher narinaire entre la muqueuse septale et prémaxillaire en dedans et la muqueuse du lambeau de Muir en dehors ; d : avant la fermeture complète du vestibule labial, le muscle myrtiforme est suturé au fond du vestibule labial en face de la fente alvéolaire, c’est-à-dire au niveau de la future incisive latérale qui est le siège normal de son insertion.

enroulement de l’aile narinaire en même temps que son abaissement. Après une suture profonde qui avance l’orbiculaire latéral au-delà de la ligne médiane, la réparation musculaire est terminée en un plan (Fig. 10). Suture cutanée. Le lambeau C peut participer à l’allongement de la columelle par son inclusion dans le back cut

préconisé par Millard ou simplement contribuer au galbe de la base de la columelle (Fig. 10). Son extrémité complète la fermeture du seuil narinaire par suture à l’aile narinaire. Le modelage de la pointe du nez par conformateur adapté in situ [3,29]. Nous avons abandonné les sutures directes entre cartilages car elles ne sont pas aussi précises et

Figure 10 Suture cutanée et conformation nasale peropératoire. a : vue frontale. Suture de l’orbiculaire en 2 plans. La première suture est la réinsertion ascendante de la partie profonde de l’orbiculaire latéral dans la région de l’épine nasale antérieure. Elle est complétée par une deuxième suture profonde qui fait avancer l’orbiculaire latéral au-delà de la ligne médiane et crée le galbe du philtrum ; b : vue par en dessous. Les deux premières attelles de silicone enroulées dans chaque narine, sont fixées l’une à l’autre par des sutures trans-septales de mono filament. Elles sont ensuite suturées de la même manière à une attelle externe qui permet d’affiner la conformation, de symétriser le niveau des rebords narinaire, creuser la concavité du vestibule externe et de fermer les espaces morts. Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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Figure 12 Conformation postopératoire. La conformation avec le conformateur amovible est permanente pendant 4 mois ; le conformateur en silicone de 0,5 mm d’épaisseur, maintien la symétrie des deux narines et de la partie antérieure des fosses nasales. Il est stabilisé par une languette labiale utile pour la prévention d’une cicatrice hypertrophique.

Figure 11 Conformation nasale peropératoire. a : les deux attelles internes sont taillées dans une feuille de silicone de 0,5 mm d’épaisseur ; b : un carré de 3,5 mm de côté est transformé en trèfle, forme qui permet la meilleure conformation interne et n’entraîne pas de point de compression. Ce système fixe est laissé 6 à 7 jours puis remplacé par un conformateur amovible.

reproductibles qu’on pourrait l’espérer (Fig. 10 et 11). Depuis 19 ans, nous utilisons un système d’attelles internes et externe qui sont faites d’une feuille de silicone de 0,5 mm d’épaisseur. Deux attelles internes en forme de trèfle sont enroulées dans chaque narine et conformées progressivement pour les arrondir de façon symétrique. Elles sont réunies entre elles par des sutures transfixiantes de monofilament étagées de la base au sommet de la columelle. Ensuite une attelle posée sur la peau de la pointe du nez est fixée aux attelles internes par sutures transfixiantes de façon à créer la meilleure symétrie possible. Grâce à l’étendue de la dissection préalable et à l’attelle externe, on peut ajuster le niveau du rebord narinaire en abaissant la peau pour allonger le nez, tandis que le revêtement interne est repoussé dans la narine pour effacer la bride et creuser la concavité du vestibule. Bien sûr le serrage des points transfixiants doit être lâche et anticiper l’œdème postopératoire, mais la transparence de l’attelle facilite la surveillance de la peau. L’avantage de ce système ne se limite pas à la maîtrise de la forme. La fermeture des espaces morts est la meilleure que l’on puisse espérer, réduisant ainsi le pouvoir de rétraction des cicatrices. Les attelles sont maintenues 5 à 6 jours puis remplacées. Le rôle capital d’une conformation postopératoire efficace. Il y a 17 ans, nous avons cherché à contrôler la rétraction postopératoire qui dégradait la correction nasale primaire

des fentes bilatérales (Fig. 12). Un conformateur narinaire amovible en silicone maintenu quatre mois a transformé l’évolution des premiers cas à un point tel que nous l’avons généralisé à l’ensemble des fentes primaires. Ce procédé est pourtant sujet à controverses et le plus souvent déconsidéré. Nous pensons que la condamnation sans appel de la conformation par certains détracteurs tel que Mulliken ne peut s’expliquer que par leurs échecs après une mise en œuvre inadaptée et donc inefficace. Notre très longue et constante expérience nous amène à préciser ce qui nous paraît conduire au succès de la conformation. Elle doit être commencée sans délai après ablation des attelles peropératoires par une mise en place immédiate du conformateur et son maintien sans aucune interruption. Aucun répit ne doit être laissé au phénomène cicatriciel. Le conformateur n’est enlevé que pour un ou deux rapides lavages quotidiens Il ne doit pas être rigide. Au contraire, ses parois fines et souples qui autorisent une adaptation confortable immédiate à toutes les morphologies, contribuent à sa stabilité et sa tolérance et garantissent la plus large lumière pour la ventilation nasale. Les parents doivent être instruits et convaincus de sa nécessité. Sans leur totale adhésion aux contraintes de cette technique la réussite n’est pas possible. Nous consacrons beaucoup de temps à leur information. Bien sûr la conformation n’est pas envisageable à n’importe quel âge : elle est acceptée et efficace entre les âges de 6 et 10 mois, grâce à la collaboration de parents avertis. Il faut ensuite attendre au minimum l’âge de 4 à 5 ans où les enfants motivés collaborent. Seuls des résultats constants justifient l’intérêt majeur de la chirurgie nasale infantile dans le traitement des malformations faciales, et la conformation est à notre avis indispensable au succès. Même dans les séquelles de l’adulte, nous le verrons plus loin, la conformation postopératoire met en lumière la responsabilité largement méconnue des phénomènes cicatriciels sur la détérioration du résultat initial. Dans un autre

Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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12 domaine, son indication s’étend aux reconstructions nasales où elle donne des résultats inaccessibles jusqu’alors. Avec la conformation prolongée, une seule épaisseur de cartilage suffit comme dans le nez normal à remplir son objet fonctionnel et esthétique. Il n’est pas besoin d’ajouter des greffes, et celles-ci peuvent souvent être enlevées avec bénéfice dans la révision de séquelles déjà corrigées par approche externe. Inversement, un conformateur narinaire ne peut participer à la correction du cartilage alaire en l’absence de sa mobilisation complète par une large dissection. Au mieux, il contrôle la contraction du seuil narinaire.

Fermeture de la fente vélaire et de la fente du palais osseux La fermeture du voile est réalisée à six mois par véloplastie intravélaire de Sommerlad [43] en même temps que celle de la lèvre et de la narine. Cette chronologie, mise en œuvre depuis 34 ans est essentielle car on assiste dans l’année qui suit à une telle réduction spontanée de la largeur de la fente résiduelle du palais osseux que l’on peut un an plus tard, à l’âge moyen de 18 mois, la fermer dans les meilleures conditions [44]. Le simple soulèvement des tissus mitoyens de la fente et leur suture en deux plans ne laisse aucune surface dénudée à l’origine des pires cicatrices rétractiles par épithélialisation secondaire qui accompagnent toutes les autres techniques. On préserve ainsi la largeur de la voûte palatine et donc celle du plancher des fosses nasales. Quand on sait qu’un gain de 1 mm sur la largeur de la valve nasale multiplie à

J.-C. Talmant, J.-C. Talmant la puissance quatre le débit d’air qui passe à ce niveau (Loi de Poiseuille), on comprend l’importance qu’il y a à tenir compte de tous ces facteurs pour une bonne ventilation nasale.

Gingivopériostéoplastie et greffe osseuse à 4 ans [1—3] Pour les même raisons que dans le paragraphe précédent, la perméabilité nasale est tributaire de la fermeture de la fente alvéolaire, car elle conditionne la largeur de l’orifice piriforme et de la valve nasale. Nous avons avancé cette opération à l’âge de 4 ans où les germes dentaires sont protégés par la corticale osseuse. La dentition temporaire permet de juger des relations entre les deux arcades. La distance inter canine maxillaire doit être supérieure de 4 mm à celle de l’étage mandibulaire pour restaurer une fonction canine du côté de la fente, c’est-à-dire un arc incisif normal même si l’incisive latérale est absente comme cela est le cas dans plus de 50 % des cas de fentes totales. Une expansion orthopédique avec un quadhélix ligaturé aux molaires permet de restaurer la distance inter canine à partir de l’âge de 3 ans et demi ; dès obtention d’une bonne fonction canine, la fente alvéolaire est fermée par gingivopériostéoplastie et greffe osseuse iliaque.

Correction nasale secondaire dans les suites de notre protocole Lorsque la ventilation nasale n’est pas optimale, c’est-à-dire nasale au repos y compris nocturne, le septum est corrigé, et

Figure 13 Jeune fille avec une fente totale labio-maxillo-palatine gauche (a, b) traitée avec notre protocole actuel. Résultat à l’âge de 13 ans après une révision de la narine et de la cloison à 5 ans en même temps que sa gingivopériostéoplastie. Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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Rhinoplastie de fente primaire et secondaire la déformation du cartilage alaire est améliorée dès l’âge de 5 à 6 ans. La reposition septale très conservatrice est faite par une voie inter septo-columellaire du côté opposé à la fente. On peut facilement à cet âge redresser l’inclinaison du vomer par fracture en bois vert. La fibrose dans la base de la columelle, la région voisine de l’épine nasale antérieure et le bord antérieur du septum est excisée. Le cartilage alaire

13 côté fente est disséqué par une incision marginale et le dôme rétracté en w dans son périchondre s’arrondit en une courbe régulière dès que le périchondre est soigneusement excisé de sa face superficielle. La symétrie des fosses nasales et de la pointe du nez est maintenue par le même système d’attelles internes et externe en silicone que pour la reposition primaire du cartilage alaire (paragraphe : Le modelage de la

Figure 14 Fente totale labio-maxillo-palatine droite. Patient âgé de 15 ans et demi-traité avec notre protocole actuel (b, c, d, e). Une rhinoplastie d’harmonisation a réduit l’arête, creusé l’angle nasofrontal et corrigé la déviation. Résultat 10 mois plus tard (f, g, h, i). L’espace de l’incisive latérale droite est préservé pour son remplacement futur par un implant. Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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Figure 14. (Suite ).

pointe du nez par conformateur adapté in situ). Un conformateur narinaire est ensuite mis en place pour les 4 premiers mois postopératoires(paragraphe : Le rôle capital d’une conformation postopératoire efficace). Généralement à ce stade, la qualité des fonctions et l’équilibre esthétique sont si proches de la normale que ces patients ont la même vie que leurs camarades (Fig. 13).

Rhinoplastie d’harmonisation finale Après la poussée de croissance de l’adolescence, si les deux ailes narinaires sont symétriques par rapport à la ligne médiane, et que la lèvre ne demande que d’infimes retouches, tout ce qui peut être utile est une rhinoplastie d’harmonisation sans réouvrir la lèvre (Fig. 14). Si la déviation est corrigée en même temps, il faut se méfier de l’hypoplasie de la branche montante du côté de la fente. Une rhinotomie de ce côté n’est pas toujours indiquée.

Traitement primaire de la fente bilatérale labio-maxillo-palatine [1—3,29] La brièveté de la columelle est considérée à tort comme une hypoplasie qui nécessite un apport cutané venant de la lèvre ou des seuils narinaires. Depuis plus de 19 ans, nous avons la certitude que la columelle est dans la pointe du nez. Comme le dit Harold McComb, la columelle s’est ouverte comme une fermeture Éclair, qu’il faut fermer pour la voir réapparaître. Différentes méthodes de traitement primaire de la déformation nasale bilatérale ont vu le jour faisant appel à un abord

externe ou à une élongation préopératoire par une orthopédie d’expansion de la columelle associée à une orthopédie alvéolaire active pour fermer la fente de l’arcade précocement sans greffe osseuse dès la première opération (nasoalveolar molding de C. Cutting). Soit ces méthodes ne répondent pas à un bon diagnostic anatomique soit, elles sont associées à une chronologie et à des gestes très nocifs pour la largeur de la valve nasale, de l’orifice piriforme, de l’arcade alvéolaire et elles seront donc néfastes pour la croissance faciale, comme on le constate déjà avec les 75 % d’ostéotomies de Lefort 1 de Mulliken pour ses patients traités d’une fente bilatérale.

Protocole de traitement des fentes bilatérales Depuis 17 ans, notre protocole est le même dans les fentes uni et bilatérales, sans orthopédie précoce préopératoire :  à 6 mois les deux fentes labionasales sont fermées en un temps avec correction complète de la déformation nasale par élongation simultanée de la columelle. Un conformateur narinaire amovible est indispensable pendant les quatre premiers mois postopératoires. La fermeture du voile avec une véloplastie intravélaire de Sommerlad est réalisée dans le même temps, sans toucher au vomer dont l’intégrité garantie la vascularisation du prémaxillaire ;  à 18 mois, la fente résiduelle du palais osseux qui s’est rétrécie spontanément est fermée en deux plans sans dénudation osseuse. Les fentes gingivo-alvéolaires sont laissées ouvertes. À 3 ans et demi, une expansion maxillaire antérieure par quadhelix ligaturé aux molaires est

Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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Rhinoplastie de fente primaire et secondaire mise en œuvre chaque fois qu’il faut rétablir la largeur inter canine maxillaire avec une bonne fonction canine des deux côtés. Entre 4 et 5 ans, les deux fentes alvéolaires sont fermées l’une après l’autre à 6 mois d’intervalle par gingivopériostéoplastie et greffe osseuse iliaque.

Technique de fermeture labiale bilatérale avec élongation de la columelle Cette opération faite à six mois est pratiquement la duplication en un temps de la fermeture d’une fente unilatérale mais adaptée aux particularités d’une fente bilatérale sur la ligne médiane. Avec une expérience de plus de 40 ans, nous sommes persuadés qu’il faut préserver au maximum le vermillon du prolabium sous la forme d’un vaste et épais triangle muqueux sans hésiter à incorporer la muqueuse humide. Cette dernière sera éliminée secondairement en avançant deux lambeaux de muqueuse sèche en îlots sans altérer le modelé labial [3]. Incisions sur la ligne médiane Nous avons évolué vers la simplicité en abandonnant la reconstruction de l’arc de Cupidon et du vermillon central par la rotation de deux lambeaux venant des deux berges latérales (Fig. 15). Il ne faut pas sacrifier de tissus au milieu

15 de la lèvre. Deux incisions verticales descendent de chaque côté de la columelle à partir du seuil narinaire. Le vermillon central est triangulaire, large de 6 à 8 mm, aussi long que possible et incisé en lui laissant le maximum d’épaisseur. Après ajustement, les lambeaux C participeront de chaque côté à la fermeture des seuils (Fig. 15a). De chaque côté, en arrière du lambeau C, nous avons ajouté un lambeau triangulaire qui est une originalité de notre tracé depuis 1991 et qui s’est montré si utile que nous l’utilisons aussi dans les fentes unilatérales. Ce lambeau muqueux (P) prélevé sur la face latérale du prolabium et du prémaxillaire est triangulaire à base supérieure attenante au flanc de la columelle (Fig. 15b). Après la dissection sous-périchondrale, il montera avec la columelle et sera transposé avec une rotation de 90 degrés dans une contre-incision (p) de la muqueuse septale juste sous le cartilage triangulaire. Il apporte plus de souplesse à la région des dômes, allonge la columelle et prévient son glissement dans le philtrum en fermant l’angle nasolabial. Incisions sur les berges latérales Le tracé répond à celui du prolabium (Fig. 15c). Comme dans la fente unilatérale, l’avivement muqueux est transformé en un lambeau à pédicule nasal (lambeau de Muir : M) qui sera transposé par rotation dans la contre-incision (m) faite le long de l’orifice piriforme.

Figure 15 Incisions dans un cas de fente bilatérale labio-maxillo-palatine totale avec un pont narinaire gauche. Le traitement primaire dans ce cas est montré dans les Fig. 15—17 incluses. a : sur la ligne médiane, le vermillon est préservé et les 2 incisions cutanées verticales sont prolongées par un épais lambeau triangulaire de vermillon. Les lambeaux C participeront à la fermeture des seuils. Latéralement les incisions sont aussi simples que possible ; b : au milieu, en arrière du lambeau C un deuxième lambeau muqueux triangulaire à pédicule supérieur basé sur la columelle P sera transposé après dissection dans une contre-incision p de la muqueuse septale sous le cartilage triangulaire ; c : le lambeau de vermillon latéral M sur son pédicule nasal sera transposé après dissection dans une contre-incision du vestibule narinaire m le long de l’orifice piriforme ; d : du côté du pont narinaire, le tracé de ce lambeau M doit être adapté et peut parfois être transformé en lambeau en îlot. Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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Figure 16 Dissection dans la même fente bilatérale. a : large dissection sous-périostée de la face antérieure du maxillaire des 2 côtés, et dissection sous-périchondrale des deux faces du septum et des deux cartilages triangulaires. La dissection des cartilages alaires est uniquement sous-cutanée sur leur face superficielle ; b : les deux dissections communiquent largement et permettent une vaste mobilisation des structures musculaires et des cartilages du nez.

Dissection C’est le temps essentiel de l’opération (Fig. 16). Comme dans la fente unilatérale, il faut de chaque côté une vaste dissection sous-périostée de toute la face antérieure de maxillaire pour permettre l’avancée de la joue, de la narine et de la lèvre vers la ligne médiane. Une vaste dissection sous-périchondrale du septum sur ses deux faces et des deux cartilages triangulaires est aussi nécessaire ainsi qu’une dissection sous-cutanée des deux cartilages alaires. Ces dissections communiquent entre elles largement (Fig. 16b) et permettent la reposition anatomique des muscles labionarinaires et une correction complète de la déformation nasale avec élongation de la columelle. Les techniques de dissection sous-périostée et souspérichondrale, la mise en place des lambeaux P et M dans les contre-incisions p et m lors des sutures muqueuses endonasales, et de chaque côté la suspension du vestibule labial au muscle myrtiforme en regard de la fente alvéolaire sont en tout point identiques à ce que l’on réalise dans une fente unilatérale (voir Fig. 9).

Suture musculaire et cutanée Les muscles narinaires et orbiculaires latéraux sont réunis entre eux (Fig. 17). De chaque côté, on fait une large prise musculaire et dermique dans la base narinaire de telle sorte qu’au serrage les narines s’enroulent et que la largeur de la base du nez n’excède pas 22 mm. Comme cette suture est fragile, on serre d’abord les deux premiers points de monofilament qui unissent sur la ligne médiane la partie supérieure

des orbiculaires latéraux (Fig. 17a, b). La dernière suture musculaire abaisse le prolabium au niveau adéquat en l’insérant entre les deux éléments musculocutanés latéraux en même temps qu’elle dessine la fossette philtrale (Fig. 17c). Les lambeaux C après ajustement précis participent à la fermeture des seuils narinaires.

Conformation nasale et contrôle des phénomènes cicatriciels Comme dans les fentes unilatérales, la conformation de la pointe du nez est réalisée avec des attelles de silicone de 0,5 mm d’épaisseur enroulées dans chaque narine et réunies entre elles par des sutures transfixiantes pour allonger la columelle et projeter les dômes (Fig. 18d—f). Avec l’aide d’une attelle externe, on peut fermer les espaces morts, effacer la bride narinaire en creusant la concavité du vestibule externe, affiner les contours en symétrisant leur niveau. Le serrage des sutures doit être assez lâche pour anticiper l’œdème et éviter toute compression. La transparence de l’attelle facilite la surveillance de la couleur de la peau. Après 5 à 7 jours, les attelles sont enlevées sous anesthésie générale et remplacées par un conformateur narinaire amovible en silicone porté en permanence 4 mois (Fig. 18g, h). Nos 40 ans d’expérience nous ont démontré l’absolue nécessité de contrôler la rétraction cicatricielle narinaire pendant cette période initiale. Quand une ventilation nasale s’installe à la suite de la première opération, au repos et durant le sommeil, on voit l’occlusion labiale se compléter en quelques mois avec un remodelage harmonieux et spectaculaire du prémaxillaire et de la face que nous

Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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Rhinoplastie de fente primaire et secondaire

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Figure 17 Sutures musculaires. Même patient que pour les Fig. 15 et 16. a, b : serrage des sutures des muscles narinaires et orbiculaires sur la ligne médiane. La suture supérieure de l’orbiculaire est suturée la première et protège le serrage des suivantes ; c : schéma des 3 sutures musculaires les plus importantes. 1 — muscles narinaires. 2 — partie supérieure de l’orbiculaire. 3 — partie inférieure de l’orbiculaire avec une suture qui prend successivement la partie inférieure de l’orbiculaire du premier côté puis fait une prise verticale dans le derme profond du philtrum avant de faire une dernière prise symétrique de la première dans l’orbiculaire opposé. Le serrage abaisse le philtrum au bon niveau entre les deux orbiculaire latéraux et creuse une fossette centrale. Il reste à suturer le plan superficiel.

n’avions jamais observé à l’époque où nous fermions la lèvre avec la technique de Millard qui laisse une pointe de nez écrasée et installe une ventilation buccale obligatoire (Fig. 18i—k). Notre protocole actuel avec sa chronologie et l’usage systématique du conformateur narinaire amovible pendant 4 mois a commencé fin 1997, à l’exception d’une sévère fente bilatérale traitée début 1995. Dans ce cas le conformateur initial peropératoire, avec ses sutures transfixiantes, est resté en place les 4 premiers mois, et son résultat a été si convaincant que nous avons cherché ensuite le moyen le plus confortable de conformation prolongée pour maîtriser l’évolution cicatricielle du nez chez le nourrisson. Ce cas est montré Fig. 19.

La rhinoplastie secondaire [4,45,46] Les lecteurs qui commenceront par la lecture de la « Rhinoplastie secondaire » ne pourront en tirer le meilleur parti qu’après avoir lu les paragraphes 1, 2, 3, 6 et 7, concernant la rhinoplastie primaire. Ce qui n’a pas été fait en chirurgie primaire doit être fait secondairement avec la même technique.

Traitement secondaire de la séquelle labionarinaire unilatérale La séquelle associe à des degrés divers la récidive partielle de la déformation originelle et les conséquences cicatricielles et fonctionnelles des opérations précédentes. Seul le diagnostic précis des déformations et des dysfonctions permet de concevoir un plan de traitement rationnel. La plateforme osseuse a une telle influence sur la morphologie labiale et nasale qu’il faut d’abord évaluer l’occlusion et les relations entre les deux arcades. La chronologie pour corriger la déformation maxillaire dépend de l’âge du patient et de nombreux autres facteurs comme les conditions socioéconomiques. Le plus souvent, particulièrement chez les jeunes enfants, la révision secondaire sera l’occasion de greffer la fente osseuse alvéolaire en même temps que la correction esthétique et fonctionnelle rétablira les meilleures conditions pour une bonne croissance faciale (Fig. 21). Après la poussée de croissance de l’adolescence, il peut y avoir une indication d’ostéotomie de Lefort I, mais la correction simultanée de la déformation labionasale est un challenge bien difficile. La correction en deux temps est plus performante et sûre.

Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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J.-C. Talmant, J.-C. Talmant

Figure 18 Conformation nasale et sutures finales dans un autre cas de fente bilatérale. a, b, c : vues préopératoires de face, par en dessous et de profil ; d, e, f : lèvre et columelle à la fin de la procédure. Vues frontale, par en dessous et de profil ; g, h : le conformateur est en place pour les 4 premiers mois ; i, j, k : résultat à l’âge de 2 ans. La ventilation nasale installée dès la première opération a permis une occlusion labiale au repos et dans le sommeil, avec un remodelage spectaculaire du prémaxillaire et de la face. Nous n’avions jamais observé auparavant un tel effet orthopédique qui s’avère très constant avec ce protocole.

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Rhinoplastie de fente primaire et secondaire

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Figure 19 Fente bilatérale sévère avec un très petit pré maxillaire n’ayant qu’une incisive centrale (a, b). Chez cette patiente traitée avec notre protocole début 1995, le conformateur narinaire postopératoire est resté fixé par des sutures pendant 4 mois. Le résultat a été si stimulant que nous avons essayé de mettre au point un conformateur en silicone amovible et stable dont nous n’avons pu disposer qu’à partir de fin 1997 et que nous avons alors utilisé dans tous les cas. Résultat à l’âge de 19 ans et demi, après un lambeau d’Abbe à 14 ans et une rhinoplastie d’harmonisation à 17 ans (c, e, f).

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Diagnostic clinique de la déformation L’une des difficultés de l’évaluation de la déformation réside dans la perte des axes de référence. On voit mieux les asymétries du visage en le regardant d’en haut pour inverser l’image. Le plan de référence horizontal à restaurer est celui qui réunit les deux ailes narinaires. C’est à partir de lui qu’il faut évaluer au-dessus le niveau des rebords narinaires et des dômes et au-dessous la hauteur de la lèvre. À chaque étage, la symétrie des repères doit être étudiée par rapport à la ligne médiane qui est souvent décalée. L’évaluation clinique de la ventilation nasale est plus utile que les mesures contestables de flux, de débit et de résistance : un patient qui a une occlusion labiale au repos, particulièrement en dormant et un réveil reposé a sûrement une ventilation nasale. Un scanner précisera les déformations nasales qui sont celles déjà connues observées avant toute chirurgie primaire mais modifiées par les insuffisances, et rétractions cicatricielles des opérations précédentes (Fig. 20). Le but du traitement sera de rétablir la perméabilité des deux fosses nasales afin que le patient abandonne ses habitudes de ventilation orale. Nous savons tous à quel point les

J.-C. Talmant, J.-C. Talmant mauvaises habitudes de langage acquises précocement comme les coups de glotte sont difficiles à corriger. De même, la restauration secondaire d’une perméabilité nasale est fréquemment décevante chez le patient contraint par la chirurgie primaire à mettre en place une ventilation orale et qui garde cette habitude longtemps. Les adaptations posturales et dysfonctions persistent avec leurs conséquences morphologiques durant la phase la plus active de la croissance. Cela est particulièrement vrai quand la posture linguale basse adoptée pour favoriser la ventilation orale s’associe comme souvent à la persistance d’une déglutition de type infantile. Rien ne peut égaler l’installation d’une fonction normale dès la première opération.

Comment décider d’une ré-intervention complète labio-narinaire et septale Des ailes narinaires asymétriques, habituellement plus haute ou postérieure du côté de la fente, un seuil cicatriciel trop large ou au contraire sténosé, associé à des déformations labiales qui captent le regard, comme une lèvre trop haute ou trop courte, plate avec un excès de tension du bord

Figure 20 Séquelle d’une fente unilatérale labio-maxillo-palatine (a, b) ; obstruction complète de la narine et de la fosse nasale fendues en raison de la fermeture précoce de la fente alvéolaire avec un lambeau vomérien en un seul plan et de la fermeture orthodontique de l’espace de l’incisive latérale manquante. La canine est au contact de l’incisive centrale (c). Du côté de la fente l’orifice piriforme est étroit comme l’est le plancher de la fosse nasale sur toute sa longueur : Le cartilage alaire n’a pas été corrigé et la réparation musculaire a tiré la bride narinaire vers la convexité du septum (a, b). La crête de la luxation septo-vomérienne est au contact de la paroi latérale. La gouttière osseuse du vomer est horizontale, parallèle au plancher narinaire. Il n’y a aucune perméabilité de la fosse nasale fendue. Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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Rhinoplastie de fente primaire et secondaire

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Figure 21 Séquelle modérée d’une fente unilatérale totale labio-maxillaire gauche chez un enfant de 4 ans et 3 mois. L’arc de Cupidon a été partiellement amputé. Une expansion maxillaire antérieure restaure la fonction canine du côté de la fente pour préparer la gingivopériostéoplastie avec une greffe osseuse iliaque de la fente alvéolaire. La médiocre continuité de l’ourlet cutanéomuqueux, l’excès de hauteur de la lèvre, et la déformation résiduelle de la narine et du septum vont être corrigés en même temps. a, b : avant la révision complète labio-narinaire ; c, d : résultat final après le port d’un conformateur narinaire. Ce patient bénéficiera d’une meilleure perméabilité nasale et d’un bon look si utile dans la vie scolaire et sociale.

muqueux, une cicatrice médiocre, distordue quand la lèvre bouge, un décalage cutanéo-muqueux, un vermillon rétracté ou ptosé, justifient une réouverture complète de la lèvre surtout si persiste une fistule alvéolaire avec un mauvais support osseux (Fig. 20 et 21). Dans ce cas, la gingivopériostéoplastie simultanée économisera un temps opératoire, réduira la lourdeur du traitement et facilitera l’orthodontie si une expansion maxillaire antérieure rétablit la fonction canine préalablement.

La technique d’une reprise complète labionarinaire Ce qui n’a pas été réalisé lors de la première opération doit donc être fait secondairement, car tous les défauts (sauf les mutilations) sont améliorables si on en comprend bien la cause. Incisions cutanées Le principe de rotation philtrale et d’avancement latéral de Millard est la meilleure option en chirurgie primaire comme secondaire. Il faut en tirer le meilleur parti en l’adaptant aux conditions locales et aux cicatrices. Il n’y a pas deux cas identiques.

Dissection C’est probablement le temps le plus important de l’opération, car seules des structures complètement libérées peuvent être mobilisées et repositionnées en situation anatomique (Fig. 22). Comme en chirurgie primaire, les muscles labio-narinaires et les cartilages du nez sont mobilisés par une très large dissection sous-périostée et souspérichondrale avant d’être replacés. Une incision marginale prolongée vers la queue de la crus latérale expose largement le cartilage alaire. Le dôme est rétracté en W, aplati et emprisonné dans la gangue de son périchondre. Dès que le périchondre disséqué de la face superficielle et du bord céphalique du cartilage alaire est excisé, le dôme s’épanouit et se projette. Si l’on excepte l’abord direct du cartilage alaire ce qui différencie la chirurgie secondaire de la chirurgie primaire et en fait la difficulté, c’est la présence des cicatrices précédentes. Elles perturbent l’anatomie que ce soit la plastie en Z de Tennisson, la réfection artificielle de la ligne cutanéo-muqueuse, ou pire, les multiples cicatrices injustifiées de certaines approches nasales externes. Il serait préférable d’abandonner celles de ces cicatrices qui ne répondent pas à un diagnostic correct de la déformation, c’est-à-dire presque toutes car nous n’en connaissons pas dont on ne puisse se passer.

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J.-C. Talmant, J.-C. Talmant

Figure 22 Dissection dans une révision labio-narinaire unilatérale complète. Même cas que la Fig. 21. a, b : dissection souspériostée et sous-périchondrale du maxillaire et du nez. Les deux dissections communiquent largement et sont identiques à celles de la chirurgie primaire.

Figure 23 Lambeau de muqueuse labiale en îlot pour corriger la rétraction du seuil et du plancher narinaires. a : dessin du lambeau muqueux le long de la cicatrice labiale avec une extension dans le vestibule. Sa forme en boomerang simplifie sa plicature ; b : le positionnement du pédicule sous-muqueux du lambeau en îlot en regard de l’angulation du boomerang permet une mise en place sans tension ; c : suture du lambeau dans le plancher et le vestibule de la narine.

Un plancher narinaire sténosé ne peut être corrigé que par l’apport d’un lambeau muqueux en îlot récupéré sur l’excision de la cicatrice muqueuse labiale et élargi par une extension en forme de boomerang dans le vestibule (Fig. 23). Le pédicule du lambeau est centré sur les tissus sous-muqueux de la partie haute de la lèvre. Dans ce cas, un conformateur narinaire amovible maintenu pendant les quatre premiers mois postopératoires préviendra la récidive de la rétraction.

l’anatomie pathologique des muscles, et de la déformation des cartilages. On comprend alors où la réparation musculaire est erronée et comment mobiliser et repositionner les structures. Les chirurgiens accusent trop facilement la peau des défauts qu’ils observent. En fait, la hauteur de la lèvre, le positionnement vertical et horizontal des bases narinaires, le niveau du seuil et sa largeur, le modelé du philtrum et la profondeur du vestibule labial dépendent directement de la réparation musculaire.

Le septum La réouverture totale de la fente procure un accès unique sur l’ensemble de la luxation septo-vomérienne. Occasionnellement, le cornet inférieur hypertrophique de la fosse nasale opposée à la fente doit être réséqué.

La réparation nasale La qualité de la réparation nasale dépend plus du degré de mobilisation des cartilages et de la reconstruction musculaire du seuil narinaire et de la lèvre que de procédures complexes de fixation. Quand le seuil reconstitué rapproche l’un de l’autre les pieds de l’arche du cartilage alaire, l’élasticité du dôme libéré de sa gangue de périchondre l’arrondit et le projette. Nous avons abandonné les sutures directes entre les cartilages, préférant remodeler la pointe

Les muscles La meilleure façon de corriger chaque défaut est d’être très investi dans la chirurgie primaire avec une vision claire de

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Rhinoplastie de fente primaire et secondaire du nez sous contrôle visuel direct à la fin de l’opération avec notre système d’attelles de silicone internes et externe si performant en chirurgie primaire (paragraphe : Le modelage de la pointe du nez par conformateur adapté in situ) (Fig. 27, 29). Notre expérience depuis 17 ans avec le port permanent d’un conformateur narinaire amovible contrôlant les phénomènes cicatriciels postopératoires pendant les quatre premiers mois nous a étonné par des résultats

23 incomparables, à n’importe quel âge, même si cela est contraignant. Il faut espérer que de plus en plus de patients puissent à l’avenir bénéficier de cette conformation ce qui suppose que les chirurgiens prennent conscience de son absolue nécessité. Pour maîtriser la puissance des phénomènes cicatriciels intra-narinaires, ils doublent la charpente nasale avec une armature cartilagineuse ou osseuse au détriment de la subtile grâce de son modelé, et de la

Figure 24 a, b, c : séquelle d’une fente complète labio-maxillo-palatine unilatérale. Arc de Cupidon en partie amputé. Reprise complète labio-narinaire avec greffe osseuse. Dans un second temps, à l’âge de 16 ans une rhinoplastie corrige la déviation et affine le nez ; d, e, f : résultat 1 an après la rhinoplastie. Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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24 perméabilité des valves nasales. En fait, une seule épaisseur de cartilage avec ses couvertures cutanées interne et externe suffit au nez normal pour répondre à ses objets fonctionnel et esthétique. À chaque fois que nous le pouvons, nous devons nous inspirer de l’anatomie normale sans la transformer (Fig. 24—26). Préservation du contour narinaire et du triangle mou. À notre avis, le rebord narinaire est une structure repère qui ne doit pas être violée surtout au niveau de sa jonction avec la columelle : le triangle mou. Il suffit de regarder nos résultats pour comprendre qu’il n’est pas utile de soulever un lambeau cutané en U inversé au dépend du triangle mou pour l’invaginer dans la narine ni de suspendre le cartilage. L’étendue de notre dissection et la conformation par des attelles internes et externe permettant des mouvements cutanés contrariés de la peau externe par rapport au revêtement endonasal adhérent au cartilage alaire permettent d’effacer la bride narinaire et de creuser la concavité des dômes et du vestibule de la narine. Les différences anatomiques du nez asiatique où un tissu fibro-adipeux abondant et ferme supplée la faiblesse du cartilage et du nez caucasien avec son armature cartilagineuse puissante expliquent probablement la popularité de l’approche externe par plastie en U inversé sur le triangle mou chez les chirurgiens asiatiques [47—50]. Néanmoins, notre courte expérience du nez asiatique

J.-C. Talmant, J.-C. Talmant confirme que notre méthode le corrige aussi bien que le nez caucasiens. Il faut noter que beaucoup de ces chirurgiens font un usage prolongé du conformateur narinaire postopératoire [49,50]. Correction du dorsum. Il peut être bénéfique de réaliser une rhinoplastie pour ré axer et harmoniser le nez quand il est dévié avec une cyphose excessive. La branche montante du côté de la fente est généralement hypoplasique et plus postérieure. La rhinotomie n’y est pas toujours indiquée ou doit être faite avec doigté. Une bosse importante ne doit être réduite qu’après stabilisation de la projection de la pointe du nez. Par ailleurs, 40 ans d’expérience de la chirurgie secondaire de fentes avec ré ouverture complète et reconstruction musculaire nous ont appris que l’on ne peut pas prédire avec précision le degré de projection de la pointe du nez et de l’angle nasolabial qui persisteront six mois à un an plus tard. Pour cette simple raison, la rhinoplastie destinée à harmoniser les proportions nasales ne doit être entreprise que comme une procédure tertiaire sauf en cas d’ajustement mineur. Quand la bosse est réséquée, une greffe de cartilage septal écrasée et rainurée longitudinalement sur sa face superficielle, assez longue et large pour recouvrir l’ensemble de l’arête, cachera l’asymétrie des os propres sous-jacents et les courbes septales résiduelles constantes des fentes unilatérales (Fig. 24 et 25). Au niveau

Figure 25 a, b, c, d : séquelle d’une fente labio-maxillo-palatine gauche totale ayant déjà fait l’objet par nos soins d’une révision complète avec une greffe osseuse à l’âge de 4 ans et demi. La déviation nasale résiduelle s’est majorée de façon importante depuis deux ans. La demande esthétique est forte et la patiente âgée de 15 ans a accepté de porter un conformateur 4 mois pour sécuriser l’évolution sur ce terrain cicatriciel. Rhinoplastie par vois endonasale ; e, f, g, h : résultat 12 mois après rhinoplastie. Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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Figure 26 a, b, c, d : séquelle d’une fente labio-maxillo-palatine totale gauche qui avait fait l’objet ailleurs d’une rhinoplastie avec approche externe et greffe de cartilage de conque à visée de camouflage sur la pointe du nez. Aucune tentative n’avait été faite pour corriger la hauteur excessive de la lèvre ; e, f, g, h : reprise complète labio-narinaire et septale avec ablation des greffes de cartilage. Dans un deuxième temps rhinoplastie essentiellement d’affinement. Résultat 1 an plus tard.

de la pointe du nez, la continuité du cartilage alaire doit être respectée et si une réduction de projection ou de largeur de la pointe du nez est souhaitable, la section du cartilage avec dissection des deux berges respectant leur revêtement endonasal est suivie de leur suture avec chevauchement. La rhinoplastie par approche externe. Revue critique [3,51,52]. Contrairement aux idées reçues l’approche externe n’est pas la meilleure voie d’abord pour exposer les déformations d’une fente. À l’occasion d’une reprise complète labio-narinaire, la ré ouverture de la fente et l’incision inter septo-columellaire du même côté donnent la meilleure vue que l’on puisse espérer sur l’ensemble du septum et les cartilages triangulaires. Le but essentiel de ces approches externes est de suturer les cartilages sous contrôle visuel et d’ajouter des greffes de cartilage pour projeter la pointe, vaincre la rétraction cicatricielle et camoufler les déformations sous-jacentes. Il est difficile en cours d’intervention d’apprécier le résultat immédiat puisque la peau doit être replacée et suturée avant de juger. Certes, empiler les greffes de cartilage change la forme et peut améliorer à court terme le résultat esthétique, mais elles ne peuvent prétendre affiner le nez et leur volume empiète nécessairement sur le calibre endonasal. Avec le

temps, les résultats se détériorent alors que la peau s’atrophie et se rétracte laissant deviner les greffes trop rigides et des orifices narinaires souvent étroits. Surtout, cette technique peut laisser croire à un chirurgien peu entraîné que l’approche directe va rendre cette opération facile, ce qui n’est jamais le cas. Que faut-il faire quand une approche externe n’a pas donné l’amélioration esthétique et fonctionnelle souhaitée (Fig. 26) ? Sauf exceptions liées au caractère très visible des cicatrices, ou à l’inadaptation totale des plasties précédentes, ces nez multi-opérés doivent être repris par une voie interne classique avec excision de la fibrose, et ablation des greffes de cartilage ou leur réduction dans des proportions considérables. Les structures normales sont repositionnées avec les principes que nous avons développés en chirurgie primaire et le résultat est consolidé par le port permanent d’un conformateur narinaire amovible pendant quatre mois. On peut de cette façon transformer le résultat esthétique et surtout restaurer une fonction qui avait disparue. Pour John Tebbets [52], grand maître de l’approche externe, il faut en rhinoplastie primaire de l’adolescent ou de l’adulte respecter la continuité du cartilage alaire, le conformer par sutures et le repositionner sans greffes de cartilage. En chirurgie secondaire par contre, il pense que la difficulté de la correction justifie le recours aux greffes de cartilage malgré leurs

Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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J.-C. Talmant, J.-C. Talmant

Figure 27 Séquelle d’une fente bilatérale ayant fait l’objet de plusieurs tentatives de correction de la pointe du nez dans son équipe initiale. Révision complète labio-narinaire avec plastie en VY de la columelle et de la lèvre sans aucune greffe de cartilage mais avec contrôle de la cicatrisation postopératoire par conformateur amovible pendant 4 mois. L’amélioration est stable depuis plus d’un an. Un lambeau d’Abbe a été réalisé pour les petites imperfections de l’arc de Cupidon et du vermillon central avec dysharmonie inter labiale chez une patiente ayant fait la preuve de sa capacité à faire des cicatrices excellentes.

imperfections, sachant que le travail sous contrôle direct favorisant la constance de la performance et l’éventail des options techniques seraient pour lui les avantages principaux de l’approche externe. Sa longue expérience l’amène cependant à relativiser son propos : « l’histoire des techniques de rhinoplastie est cyclique. La prochaine étape pourrait être de parvenir à la même précision et au même contrôle avec la technique de rhinoplastie classique endonasale. ». Notre impression avec 17 ans de recul de reposition des cartilages par vaste dissection sans greffes de cartilage et de contrôle de la cicatrisation par fermeture immédiate des espaces morts puis par conformation prolongée postopératoire nous pousse à croire que cette étape nouvelle est déjà devant nous. Il reste à convaincre et à transmettre pour que nos patients soient rapidement les bénéficiaires de cette évolution.

Révision labionasale bilatérale en un temps Les cicatrices nasolabiales de l’allongement primaire de la columelle par lambeaux en fourche de Millard menacent la

viabilité du philtrum lorsque la columelle reste son pédicule (Fig. 27—30). Dans ce cas, il faut modifier le tracé pour que la columelle puisse être allongée à nouveau par reprise des lambeaux en fourche, tandis que la lèvre est ré ouverte complètement sur un côté et partiellement sur l’autre en gardant le vermillon central et le philtrum vascularisés par un pédicule sur le vermillon latéral de ce côté. On peut alors ajuster la longueur de la columelle comme la hauteur de la lèvre selon le principe du VY, et repositionner les ailes narinaires transversalement par rapport à la ligne médiane (Fig. 27 et 29). Il peut être nécessaire de faire ultérieurement une retouche limitée du vermillon latéral qui a servi de pédicule pendant le premier temps. Ce tracé permet une bonne dissection sous-périostée de la face antérieure du maxillaire des deux côtés, et une dissection complète de la fente alvéolaire permettant la gingivopériostéoplastie et greffe osseuse du côté de l’ouverture complète de la lèvre. Sur la ligne médiane, la dissection sous-périchondrale du septum et des cartilages triangulaires ainsi que la dissection sous-cutanée des cartilages alaires sont identiques à celles de la chirurgie primaire. Il est possible dans cette révision

Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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Figure 28 Même patiente que la Fig. 27. a, b, c, d : avant reprise labio-narinaire complète ; e, f, g, h : après reprise complète avec un conformateur narinaire pendant 4 mois, puis un lambeau d’Abbe. Résultat 1 an après le dernier temps opératoire.

d’ajouter une dissection sous-périchondrale de la face superficielle des deux cartilages alaires par une incision marginale bilatérale. La cicatrice finale en W dans l’angle nasolabial en respecte le contour naturel à l’opposé d’une cicatrice horizontale qui y creuserait un angle aigu. Comme en chirurgie primaire, le système d’attelles en silicone

internes et externe mis en place après les dernières sutures permet de régler la projection et l’affinement de la pointe du nez ainsi que sa symétrie. Bien sûr après ablation des attelles un conformateur narinaire amovible sera porté en permanence pendant les quatre premiers mois pour stabiliser cette correction. Le résultat labial final est très dépendant du

Figure 29 Séquelle difficile d’un syndrome de Van der Woude avec fente labio-maxillo-palatine bilatérale. Reprise complète labionarinaire bilatérale avec greffe osseuse de la fente alvéolaire gauche. Conformateur narinaire pour les 4 premiers mois. Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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J.-C. Talmant, J.-C. Talmant

Figure 30 Même patient que la Fig. 29. a, b, c, d : avant la réparation secondaire labio-narinaire ; e, f, g, h : résultat 4 ans après la réparation secondaire 2 ans après une rhinoplastie pour déviation résiduelle de l’arête et cyphose, et 6 mois après un lipofilling de l’hémilèvre supérieure et correction de la dysharmonie inter labiale majeure par excision centrale transfixiantes de la lèvre inférieure.

volume du vermillon central disponible avant la reprise. Chaque fois que l’arc de Cupidon et le vermillon central sacrifiés dans la technique primaire de Millard, ont été reconstruits par rotation inférieure de lambeaux cutanéomuqueux venus des segments latéraux, la lèvre trop tendue le long de son bord libre manque de réserve tissulaire et la dysharmonie inter labiale ne trouvera sa solution idéale qu’avec l’apport d’un lambeau d’Abbe. Dans les cas limites, un lipofilling de la lèvre supérieure peut être la bonne solution.

La rhinoplastie esthétique finale des fentes bilatérales À la fin du traitement, certains de ces nez de fente bilatérale restent bulbeux, trop larges, et cyphotiques avec une pointe plongeante. La résection du triangle osseux entre les os propres et le septum dans l’angle nasofrontal, prépare une rhinotomie efficace des deux côtés, pour réduire la largeur du nez osseux. Le dorsum est refermé en greffant la bosse retaillée selon la technique de Skoog, ou une tuile de cartilage septal écrasée et rainurée longitudinalement sur sa face superficielle. On doit être attentif à éviter le retrait de l’angle nasolabial, une procidence de la columelle, ou une

excessive convexité du dorsum inférieur. L’association de ces défauts est particulièrement inélégante et très difficile à vivre au quotidien dans notre société. La rhinoplastie par approche externe est incapable d’affiner un nez déjà trop large et cicatriciel en lui ajoutant des greffes de cartilage ! Nous entreprenons de plus en plus souvent la révision de telles rhinoplasties en les explorant par une voie interne, en excisant la fibrose et faisant l’ablation des greffes cartilagineuses pour retrouver les structures normales, les repositionner par notre système d’attelles internes et externe. Grâce à la maîtrise de la cicatrisation pendant les quatre premiers mois postopératoires, l’amélioration de la réparation nasale est régulièrement confirmée même dans les cas les plus difficiles.

Conclusion La rhinoplastie de fente garde cette image surannée d’ultime espoir esthétique mettant un terme au parcours partagé entre contraintes et déceptions de jeunes gens multi-opérés dès leur première enfance. Une meilleure compréhension des mécanismes qui entraînent les déformations et expliquent l’hypoplasie que l’on observe dans les fentes labio-maxillo-palatines permettent

Pour citer cet article : Talmant J-C, Talmant J-C. Rhinoplastie de fente primaire et secondaire. Ann Chir Plast Esthet (2014), http:// dx.doi.org/10.1016/j.anplas.2014.08.004

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Rhinoplastie de fente primaire et secondaire une réparation primaire plus ambitieuse, non seulement anatomique mais aussi fonctionnelle. Tous les progrès résultent de la restauration immédiate de toutes les fonctions sans compromis : langage, ventilation nasale, mastication centrée et symétrique avec une bonne fonction canine. Le bon potentiel de ces enfants se confirme si lors de chaque opération le chirurgien restaure l’anatomie avec le moins de cicatrice possible. La correction complète de la déformation nasale par simple reposition des cartilages mobilisés par de très vastes dissection, et le contrôle de la rétraction cicatricielle par conformateur narinaire pendant les quatre premiers mois postopératoires mènent aux meilleurs résultats aussi bien en chirurgie primaire qu’en chirurgie secondaire. Le traitement des fentes labio-maxillopalatines est une équation complexe avec de multiples inconnues dont le dénominateur commun est la ventilation nasale. Quand le choix des techniques et de leur chronologie l’installe dès la première opération et la préserve lors des étapes chirurgicales suivantes, on bénéficie de surcroît de la meilleure largeur possible de la voute palatine et de l’orifice piriforme. Ventilation nasale, compétence labiale, mastication en bonne occlusion symétrique et centrée s’influencent l’une l’autre et sont le gage d’une bonne et durable harmonie faciale. La compétence d’une équipe multidisciplinaire appuyée sur la motivation des parents guide chacun de ces patients, tous différents, vers cette maîtrise fonctionnelle. Le traitement de l’exigeante pathologie des fentes labiomaxillo-palatines ne peut progresser que par l’innovation. Avec la maturité d’une expérience de 17 ans, s’affirment de nouvelles techniques qui doivent bénéficier plus largement au monde de la rhinoplastie et de la reconstruction nasale. L’avènement d’une chirurgie nasale infantile sûre et performante et la capacité de réunir une grande précision morphologique avec la meilleure efficacité fonctionnelle à tout âge sont à la portée de la rhinoplastie endonasale, en chirurgie primaire comme secondaire.

Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

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[Cleft rhinoplasty, from primary to secondary surgery].

Despite fifty years of statistics, congresses, publications, the cleft nose remains an enigma to the great majority of cleft specialists. Most of the ...
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