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ARTICLE IN PRESS La Revue de médecine interne xxx (2015) xxx–xxx

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Une cause rare de douleur du membre inférieur Lower limb pain of unusual cause M.-A. Laffont a , M. Michaud a , G. Pugnet a,c , M. Gigaud b , P. Arlet a , L. Sailler a,c , L. Astudillo a,∗,d a

Service de médecine interne, CHU de Toulouse, 1, place du Dr-Baylac, 31059 Toulouse cedex, France Service de neurochirurgie, CHU Purpan, 1, place du Dr-Baylac, 31059 Toulouse cedex, France Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) UMR1027, 31037 Toulouse cedex 1, France d Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) UMR1037, centre de recherches en cancérologie de Toulouse (CRCT), 31000 Toulouse, France b c

i n f o

a r t i c l e

Historique de l’article : Disponible sur Internet le xxx Mots clés : Nerf sciatique Schwannome Nerf périphérique Keywords: Sciatic nerve Schwannoma Peripheral nerve

1. L’histoire Un homme, âgé de 43 ans, avait une douleur du membre inférieur droit depuis 3 ans, de type neurogène. Celle-ci avait commencé par une douleur de l’hallux isolée, qui dans un second temps, était remontée selon un trajet sciatique tronquée jusqu’au creux poplité (face externe et postérieure de jambe et de cuisse). Cette douleur avait conduit à de multiples consultations spécialisées (rhumatologie hospitalière, centre de la douleur, consultation du pied) et divers examens complémentaires étaient normaux : IRM du rachis dorsolombaire dans l’hypothèse d’une sciatique d’origine rachidienne, électromyographie, scintigraphie osseuse. Une IRM du pied dans l’hypothèse d’un névrome de Morton était également normale. Le patient avait rec¸u divers traitements pour les douleurs neuropathiques sans succès. À l’interrogatoire, il était essentiellement gêné par des douleurs insomniantes. En réalité, les douleurs étaient aggravées par le décubitus, quel que soit le moment de la journée, et soulagées par l’orthostatisme. Le patient décrivait une douleur irradiant dans le membre inférieur, fugace, déclenchée

∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (L. Astudillo).

parfois par des traumatismes lorsqu’il jouait avec ses enfants. À l’examen, il n’y avait pas d’anomalie neurologique : pas de déficit sensitif ou moteur, ni d’abolition des réflexes ostéo-tendineux. L’examen rhumatologique ne retrouvait pas de raideur rachidienne, pas de douleur déclenchée à la mobilisation, ni de signe de Lasègue ou de Léri. Une IRM de la cuisse était pratiquée (Fig. 1). 2. Le diagnostic Un schwannome du nerf sciatique. 3. Les commentaires Les douleurs, lors des traumatismes minimes de la cuisse, correspondaient à une zone gâchette dans la cuisse. On mettait alors en évidence un signe de Tinel à la face postérieur de cuisse, à 31 cm audessus du creux poplité. En regard, on palpait une masse oblongue rénitente et non fixée. L’échographie retrouvait en regard une formation bien limitée sur le trajet du nerf sciatique hypo-échogène hétérogène de 34 × 26 × 31 mm. L’IRM confirmait l’existence d’une masse au contact du nerf sciatique, à sa face postéro-médiale et excentrée. Celle-ci était bien limitée polylobée et hétérogène, rehaussée par le gadolinium de fac¸on importante et hétérogène.

http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2015.02.002 0248-8663/© 2015 Publie´ par Elsevier Masson SAS pour la Société nationale française de médecine interne (SNFMI).

Pour citer cet article : Laffont M-A, et al. Une cause rare de douleur du membre inférieur. Rev Med Interne (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2015.02.002

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ARTICLE IN PRESS M.-A. Laffont et al. / La Revue de médecine interne xxx (2015) xxx–xxx

Fig. 1. IRM de la cuisse droite : masse bien limitée polylobée et hétérogène, rehaussée par le gadolinium de fac¸on importante et hétérogène, au contact du nerf sciatique.

Cette tumeur était réséquée sans difficulté. L’anatomopathologie retrouvait une prolifération hétérogène avec des faisceaux en tout sens, composée de cellules fusiformes à noyau allongé avec une vascularisation importante, l’ensemble permettant de poser le diagnostic de schwannome du nerf sciatique. Le schwannome du nerf sciatique est une cause rare de sciatiques extra-rachidiennes [1]. Les tumeurs des nerfs périphériques sont rares (1 à 2 % des tumeurs des tissus mous). Les schwannomes (autrefois appelé neurinomes) sont des tumeurs bénignes des nerfs périphériques, développées aux dépens des cellules de Schwann, représentant 70 % des tumeurs des nerfs périphériques. Les schwannomes touchent principalement les nerfs crâniens, du cou, les racines médullaires, et les membres, essentiellement supérieurs (nerf médian, radial et ulnaire, zone de flexion : gouttière cubitale). Le nerf sciatique et ses branches ne sont touchés que rarement, dans 5 à 16 % des schwannomes. Dans une étude portant sur 234 schwannomes bénins, une atteinte du nerf sciatique est retrouvée dans 15 cas soit dans 6,4 % [2]. Aux membres inférieurs, ils touchent aussi bien les gros troncs que les nerfs sensitifs. Exceptionnellement, ils peuvent être bifocaux voire multiples sur le nerf sciatique. La transformation maligne est également exceptionnelle.

Le trajet de la douleur est volontiers tronqué, souvent à distance de la tumeur (dans 85 % des cas) [3]. Il s’agit d’une douleur radiculaire, qui fait errer le diagnostic à la recherche d’une atteinte rachidienne. L’existence d’une aggravation au décubitus et d’une zone gâchette sont des signes qui doivent faire évoquer le diagnostic. C’est souvent la découverte d’un pseudo-Tinel qui permet de redresser le diagnostic, et parfois, dans les zones superficielles, découvrir une masse oblongue rénitente sur le trajet du nerf, en regard de la zone gâchette, comme dans notre cas. Dans ce contexte, les touchers pelviens peuvent être réalisés en cas de suspicion d’une tumeur pelvienne. Les déficits sensitifs et moteurs sont rares. Parfois, la douleur fait évoquer un tableau de compression du sciatique poplité externe ou un syndrome du tunnel tarsien, conduisant parfois à tort à la chirurgie [4]. Le délai entre le début des douleurs et le diagnostic est souvent long, variable en fonction de la localisation, jusqu’à une dizaine d’année, du fait de l’errance vers d’autres diagnostics plus fréquents, voire par l’évocation d’une douleur psychogène devant la normalité de l’ensemble des examens complémentaires. L’électromyogramme, notamment, est très souvent normal jusqu’à un stade avancé de la compression, en raison du caractère non infiltrant de la tumeur. Parfois, il peut montrer un bloc de conduction voire des signes de dénervation. Dans une étude portant sur 25 schwannomes du nerf tibial, le délai diagnostique est en moyenne de 86 mois avec des extrêmes allant de 2 à 360 mois [5]. D’autres auteurs rapportent également deux patients ayant une douleur du pied évoluant respectivement depuis 4 et 5 ans avant le diagnostic de schwannome du nerf sciatique de la cuisse [4]. Concernant l’imagerie, l’échographie permet d’affirmer rapidement la présence d’une masse excentrée sur le trajet du nerf. Le meilleur examen reste l’IRM qui retrouve une masse excentrée par rapport au nerf en isosignal T1, hypersignal T2, avec rehaussement important et homogène de la masse. Cet aspect caractéristique permet souvent de le différencier du neurofibrome, dont le pronostic fonctionnel post-opératoire est beaucoup moins bon, du fait de l’infiltration des faisceaux nerveux. La résection chirurgicale permet souvent une bonne amélioration de la symptomatologie, comme dans notre cas où les douleurs nocturnes avaient disparu, sans que des signes neurologiques déficitaires ne soient apparus au décours. Cette dernière est souvent possible car les schwannomes sont des tumeurs encapsulées et peuvent donc être énucléées sans interrompre la continuité nerveuse. Il n’y a pas de récidive après l’exérèse. Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Références [1] Bickels J, Kahanovitz N, Rubert CK, Henshaw RM, Moss DP, Meller I, et al. Extraspinal bone and soft-tissue tumors as a cause of sciatica. Clinical diagnosis and recommendations: analysis of 32 cases. Spine 1999;24:1611–6. [2] Knight DM, Birch R, Pringle J. Benign solitary schwannomas: a review of 234 cases. J Bone Joint Surg Br 2007;89:382–7. [3] Thomas JE, Piepgras DG, Scheithauer B, Onofrio BM, Shives TC. Neurogenic tumors of the sciatic nerve. A clinicopathologic study of 35 cases. Mayo Clin Proc 1983;58:640–7. [4] Gominak SC, Ochoa JL. Sciatic schwannoma of the thigh causing foot pain mimicking plantar neuropathy. Muscle Nerve 1998;21:528–30. [5] Nawabi DH, Sinisi M. Schwannoma of the posterior tibial nerve: the problem of delay in diagnosis. J Bone Joint Surg Br 2007;89:814–6.

Pour citer cet article : Laffont M-A, et al. Une cause rare de douleur du membre inférieur. Rev Med Interne (2015), http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2015.02.002

[Lower limb pain of unusual cause].

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