Journal de Gyn´ ecologie Obst´ etrique et Biologie de la Reproduction (2014) 43, 294—299

Disponible en ligne sur

ScienceDirect www.sciencedirect.com

TRAVAIL ORIGINAL

Promouvoir la chirurgie ambulatoire en France en 2013 : une analyse de cohorte Promote ambulatory surgery in France in 2013: A cohort analysis P. Capmas a,∗,b,c, A. Nazac a,d, C. Jennequin a, H. Fernandez a,b,c a

Service de gynécologie obstétrique, hôpital Bicêtre, AP—HP, 78, avenue du Général-Leclerc, 94275 Le Kremlin-Bicêtre cedex, France b Inserm, CESP, U1018, 94276 Le Kremlin-Bicêtre, France c Université Paris-Sud, 94275 Le Kremlin-Bicêtre cedex, France d CNRS UMR 7647, École polytechnique, 91120 Palaiseau, France Rec ¸u le 28 mai 2013 ; avis du comité de lecture le 16 septembre 2013 ; définitivement accepté le 19 septembre 2013 Disponible sur Internet le 25 octobre 2013

MOTS CLÉS Chirurgie ambulatoire ; Chirurgie gynécologique ; Acte traceur ; Cohorte



Résumé But. — Montrer la faisabilité d’une prise en charge ambulatoire en chirurgie gynécologique. Matériels et méthodes. — Étude de cohorte monocentrique évaluant la prise en charge en ambulatoire dans un service de chirurgie gynécologique entre janvier 2010 et décembre 2011. Le nombre de réhospitalisation dans le mois suivant une intervention en ambulatoire a été recueilli. Résultats. — Deux mille huit cent trois interventions ont été réalisées, dont 1425 (51 %) en ambulatoire. Quatre réhospitalisations dans le mois suivant la chirurgie ont été nécessaires et aucune n’a nécessité de réintervention chirurgicale. Pour les actes traceurs en gynécologie, le taux de prise en charge en ambulatoire est de 86 % (hystéroscopie opératoire, conisation et tumorectomie du sein) alors que l’objectif fixé par les autorités de santé est de 80 %. Conclusion. — Une prise en charge ambulatoire est possible en chirurgie gynécologique. L’objectif de 80 % d’ambulatoire fixé par les autorités de santé sur les actes traceurs est réalisable sans risque supplémentaire. La diffusion de la prise en charge chirurgicale en ambulatoire est possible à condition de garder à l’esprit que c’est bien le patient qui est en ambulatoire et non l’intervention. Le choix repose sur la balance bénéfice—risque. © 2013 Publié par Elsevier Masson SAS.

Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (P. Capmas).

0368-2315/$ – see front matter © 2013 Publié par Elsevier Masson SAS. http://dx.doi.org/10.1016/j.jgyn.2013.09.006

Promouvoir la chirurgie ambulatoire

KEYWORDS Ambulatory surgery; Gynecologic surgery; Traceur act; Cohort

295

Summary Objective. — Study feasibility of outpatient management for gynaecologic surgery. Materials and methods. — Monocentric cohort analysis to study outpatient management in a gynaecologic department from January 2010 to December 2011. Number of second hospitalization in the month following ambulatory care was collected. Results. — Two thousand eight hundred and three interventions were performed including 1425 (51%) in outpatient management. Four women had a second hospitalization in the month following ambulatory care and none of them had a second surgery. For gynaecologic ‘‘tracer act’’, that required an 80% rate of outpatient management in France (operative hysteroscopy, conisation and breast tumorectomy), the rate of outpatient management was 86%. Conclusion. — Outpatient care is feasible in gynaecologic surgery and objective of an 80% rate of ambulatory care for some specific gynaecologic interventions is reasonable without additional risk. A large outpatient management is feasible keeping in mind that it is women that are concern with ambulatory care and not interventions. Choosing an outpatient care is based on the risk-benefit balance. © 2013 Published by Elsevier Masson SAS.

Introduction La chirurgie ambulatoire a été définie par la conférence de consensus de mars 1993 [1] comme « des actes chirurgicaux programmés et réalisés dans les conditions techniques nécessitant impérativement la sécurité d’un bloc opératoire, une anesthésie de mode variable et suivie d’une surveillance postopératoire permettant, sans risque majoré, la sortie du patient le jour même de son intervention ». Les décrets du 2 octobre 1992 avaient préalablement fixé le cadre législatif en France. Ces textes ont été récemment complétés par le décret 2012-969 du 20 août 2012. Cependant, malgré ce cadre précis, le taux de chirurgie ambulatoire n’était en France en 1995 que de 20 % [2] alors qu’elle atteignait 50 à 60 % aux États-Unis à la même période [3]. En 2009, la France affichait un taux de chirurgie ambulatoire de 36 % alors qu’il était de 70 % en Norvège et en Suède et de 80 % en Grande-Bretagne et aux États-Unis. La France se place ainsi au dernier rang des pays de l’OCDE pour la prise en charge en ambulatoire [4]. L’essor de la chirurgie ambulatoire a été facilité dans de nombreux pays pour des motifs divers : désengorgement des lits d’hospitalisation, réduction des coûts hospitaliers, pénurie de l’offre de soins, accroissement de la demande, contraintes économiques. La politique de santé franc ¸aise s’est orientée tardivement vers la prise en charge en ambulatoire (dans les années 1990) ce qui explique probablement le retard par rapport à certains pays européens. Les problématiques actuelles de santé publique, d’occupation des lits et de gestion des coûts en France sont autant d’arguments en faveur de la diffusion de la prise en charge ambulatoire. La politique de santé actuelle a comme objectif de promouvoir la prise en charge en ambulatoire [4]. Des incitations tarifaires ou non ont été mises en places lors de 2 vagues successives. La première de 1999 à 2003 concernait la substitution de lits de chirurgie classique par des lits de chirurgie ambulatoire. La seconde vague d’incitation de 2004 à 2011 comportait d’une part des incitations tarifaires tels que le rapprochement entre les tarifs de la chirurgie complète et de l’ambulatoire, alors que ces derniers étaient jusqu’alors en défaveur

de la chirurgie ambulatoire, notamment sur 18 GHM mais aussi des incitations plus coercitives telles que la mise sous accord préalable de l’Assurance maladie de 17 gestes marquers : dont deux concernent la chirurgie gynécologique (intervention sur la vulve, le vagin ou le col utérin et dilatations et curetages, conisations pour affections non malignes). Les données actuelles sur la prise en charge en ambulatoire en France sont peu nombreuses. La promotion de la chirurgie ambulatoire pose certaines questions ; à savoir, le type d’intervention pouvant être réalisé, les critères de sélection des patients, les comorbidités susceptibles d’interférer avec une bonne gestion de l’ambulatoire. La prise en charge en ambulatoire est largement possible notamment dans le secteur de la chirurgie gynécologique. On retrouve ainsi 5 interventions de gynécologie dans la liste des 38 actes traceurs qui vont être suivie par l’Assurance Maladie, à savoir la chirurgie du col de la vulve et du vagin (conisation et laser), chirurgie du sein (tumorectomie du sein), chirurgie de l’utérus (hystéroscopie opératoire), interruption tubaire (cœlioscopique ou hystéroscopique) et la ponction d’ovocyte. L’activité chirurgicale d’un service hospitalier de chirurgie gynécologique est rapportée ici. L’objectif de ce travail est de montrer la faisabilité d’une prise en charge large en ambulatoire et de rapporter les complications ayant nécessité une nouvelle hospitalisation. L’évaluation du nombre de réhospitalisations dans le mois suivant a été choisie comme critère pour évaluer la qualité de la sélection des patientes pouvant être prise en charge en ambulatoire à défaut de disposer des taux de conversion en hospitalisation traditionnelle pour chaque type d’intervention.

Méthodes Il s’agit d’une étude de cohorte monocentrique évaluant la prise en charge en ambulatoire dans un service de chirurgie gynécologique sur une période de deux ans entre janvier 2010 et décembre 2011. Le recueil des données a été réalisé grâce au logiciel DIAMM, qui sert à la réalisation des comptes rendus opératoire et d’hospitalisation, pour le diagnostic

296 précis de l‘intervention réalisée et le type d’hospitalisation (ambulatoire ou complète) et avec le logiciel de codage ARCCAM. Ce type d’étude ainsi que le recueil de données via les logiciels de codage ne nécessite pas l’approbation d’un comité d’éthique. La base de données a été déclarée à la CNIL. Les critères d’éligibilité à une prise en charge en ambulatoire dans ce service sont ceux proposés par la SFAR en 2009 [5]. Certains critères concernent l’acte lui-même : intervention programmée, de courte durée (inférieure à 1 h 30), à risque faible, notamment hémorragique ou respiratoire et aux suites simples, peu douloureuses et n’impliquant pas de handicap important. D’autres critères concernent le patient avec des critères sociaux : compréhension, aptitude à observer les prescriptions médicales, conditions d’hygiène et de logement décentes, disponibilité d’une personne responsable pour raccompagner le patient et rester la nuit suivante auprès de lui, éloignement de moins de une heure d’une structure de soins adaptée et accès rapide à un téléphone. Des critères médicaux sont aussi pris en compte : l’état du patient à savoir préférentiellement des patients ASA 1 ou 2 ou 3 stable. L’âge n’est en revanche pas un critère discriminant pour décider d’une prise en charge en ambulatoire et n’est d’ailleurs pas dans les critères de la SFAR [5,6]. Sur la période de deux ans, un recueil du nombre total d’interventions programmées a été réalisé et la proportion de prise en charge en ambulatoire a été recherchée. La comparaison entre prise en charge ambulatoire et complète a ensuite été réalisée par type d’intervention. Le logiciel DIAMM a ensuite permis de connaître toutes les patientes ayant nécessité une réhospitalisation dans le mois suivant une intervention avec prise en charge en ambulatoire. Les dossiers informatisés DIAMM de ces patientes prises en charge en ambulatoire ont ensuite été consultés et le recueil des réhospitalisations, de leurs motifs et de leurs prises en charge a alors pu être réalisé. En revanche, le nombre de patientes prévues initialement pour une prise en charge ambulatoire et finalement hospitalisées en hospitalisation complète n’a pu être recueilli que pour les patientes prisent en charge pour incontinence urinaire d’effort par pose de bandelette sous-urétrale.

P. Capmas et al.

Figure 1 Répartition entre chirurgie ambulatoire et chirurgie conventionnelle par type d’intervention. Distribution between ambulatory surgery and conventional surgery by intervention.

Les indications de prise en charge ambulatoire en gynécologie dans le service sont les hystéroscopies opératoires, les cœlioscopies pour pathologies annexielles ou bilan d’infertilité ou autres cœlioscopies dont la durée est en moyenne inférieure à 120 minutes, les aspirations programmées, la pose de bandelettes sous urétrales, les conisations, la chirurgie vulvaire (à l’exclusion de la cancérologie) et enfin les tumorectomies avec ou sans exérèse du ganglion sentinelle. Une prise en charge ambulatoire a été possible pour plus de 85 % des hystéroscopies opératoires, pour 93 % des conisations, pour 34 % des cures d’incontinence urinaire par pose de bandelettes sous urétrales et pour 42 % des cœlioscopies pour infertilité, pathologie annexielle ou autres cœlioscopies de moins de 120 minutes. La répartition entre chirurgie ambulatoire et chirurgie conventionnelle par type d’intervention est présentée sur la Fig. 1. Les patientes prises en charge en ambulatoire ont dans 60 % des cas bénéficié d’une hystéroscopie opératoire, dans 10 % des cas d’une cœlioscopie et dans 9 % des cas d’une aspiration programmée pour grossesse arrêtée. Cette composition par type d’intervention dans le nombre global de patientes prises en charge en ambulatoire est rapportée sur la Fig. 2. Pour les patientes prises en charge en ambulatoire, un recueil des réhospitalisations a permis de voir que sur les 1425 patientes prises en charge en ambulatoire pendant 2 ans, seulement 4 ont nécessité une réhospitalisation dans

Résultats Sur cette période de 2 ans, 2803 interventions ont été réalisées, dont 1425 (51 %) en ambulatoire (Tableau 1). La prise en charge en hospitalisation complète inclut les patientes prises en charge en urgence qui ne sont pas prise en compte dans le décompte de l’ambulatoire même si la durée d’hospitalisation est inférieure à 12 heures ainsi que les patientes prises en charge le week-end. La chirurgie d’urgence compte pour 19 % de l’activité chirurgicale en hospitalisation complète. En chirurgie programmée, 58 % des interventions sont donc réalisées en ambulatoire. Les actes d’orthogénie et de prise en charge médicale de la procréation n’ont pas été inclus dans cette étude puisque les données sont issues d’un service sans département d’aide médicale à la procréation, d’une part, et avec un service d’orthogénie indépendant, d’autre part.

Figure 2 Répartition au sein de la chirurgie ambulatoire par type d’intervention. Distribution within the ambulatory surgery by intervention.

Promouvoir la chirurgie ambulatoire

297

Tableau 1 Répartition entre chirurgie ambulatoire et chirurgie conventionnelle. Distribution between ambulatory surgery and conventional surgery. Ambulatoire

Hospitalisation traditionnelle

Hystéroscopie opératoire Cœlioscopie Bandelette sous-urétrale Aspiration Tumorectomie ± GS Conisation Cerclage Bartholin ou autres Autres

842 (85 %) 173 (42 %) 20 (34 %) 139 (40 %) 28 (42 %) 128 (93 %) 30 (36 %) 21 (24 %) 44

146 (15 %) dont 26 avec acte associé 237 (58 %) 38 (66 %) 209 (60 %) 40 (58 %) 9 (7 %) dont 3 avec acte associé 65 (64 %) 65 (76 %) 569

Total

1425 (51 %)

1378 (49 %)

Total 988 410 58 348 68 137 95 86 613 2803

GS : ganglion sentinelle.

le mois suivant la chirurgie et aucune n’a nécessité de réintervention chirurgicale. Les 4 réhospitalisations étaient dues à une rétention aiguë d’urine dans les suites d’une cure d’incontinence urinaire d’effort par bandelette sous urétrale, un iléus réflexe suite à une cœlioscopie pour migration de dispositif intra-utérin (DIU), une salpingite dans les suites d’une épreuve au bleu tubaire pour bilan d’infertilité et enfin, une brèche après rachianesthésie pour une hystéroscopie opératoire. Ces quatre patientes ont par ailleurs été réhospitalisées dans des délais très courts inférieurs à une semaine, délai qui pourrait être choisi comme critère d’évaluation à la place de la réhospitalisation dans le mois suivant choisi initialement. Deux études rétrospectives concernant la cure d’incontinence urinaire par pose de bandelette sous urétrales et les cœlioscopies pour pathologies annexielles, infertilité ou exploratrice permettent de connaître le taux de conversion en hospitalisation traditionnelle, ce taux n’est pas récupérable par les logiciels de codage. Ces taux de prolongation d’hospitalisation sont de 25 % soit 7 patientes sur 27 après pose de bandelettes sous urétrales, sans réintervention lors de la même hospitalisation. Ces prolongations sont liées à un retard à la reprise des mictions complètes spontanées (résidu inférieur au volume uriné) dans 62,5 % des cas. Pour les cœlioscopies, le taux de conversion est de 17 % soit 36 patientes sur 209 pour des motifs organisationnels de type heure de passage au bloc, absence de personne accompagnante dans 42 % des cas. Enfin, pour les actes traceurs en gynécologie, le taux de prise en charge en ambulatoire est de 86 % (hystéroscopie opératoire, conisation et tumorectomie) dans le service alors que l’objectif fixé par les autorités de santé est de 80 %.

Discussion Un taux de prise en charge ambulatoire élevé est possible en chirurgie gynécologique sans engendrer de taux important de réhospitalisation. Ces résultats valident les critères d’aptitude à la sortie proposés par la SFAR [5]. Une prise en charge ambulatoire est ainsi réalisée au décours de nombreux types d’intervention, y compris après cœlioscopie opératoire ou pose de bandelette sous-urétrale.

Le taux global de prise en charge en ambulatoire de 58 % pour la chirurgie programmée est difficile à majorer en raison de la nécessité d’opérer les patientes le matin, notamment pour les cœlioscopies et les bandelettes sous urétrales où les patientes peuvent difficilement sortir le soir si l’intervention a débuté après 12 heures le matin. Le choix de 12 heures est issu des résultats d’études rétrospectives dont les résultats n’ont pas encore été publiés. Ceci explique en partie le taux de chirurgie ambulatoire pour les cœlioscopies courtes de seulement 40 % alors qu’il peut probablement atteindre sans difficulté les 60 % dans cette population mais aussi le taux de prolongation d’hospitalisation de 17 % lié dans 42 % a des motifs organisationnels de type heure de passage au bloc opératoire. Cette étude doit ainsi nous imposer de modifier nos programmations pour optimiser l’organisation et le flux des patientes. Une prise en charge en ambulatoire est parfois prévue sans être réalisable en raison du non-respect des critères d’aptitude à la sortie : nausées ou vomissements, douleur importante, complications peropératoires contre indiquant la sortie, refus de la patiente. . . Le design de notre étude ne nous permet pas cependant de savoir quelle proportion de patientes prévues initialement en ambulatoire n’ont finalement pas pu sortir le jour de l’intervention, ce qui est la limite principale de cette étude. Des études rétrospectives complémentaires pour la cure d’incontinence urinaire d’effort par bandelette sous urétrale et pour les cœlioscopies pour pathologies annexielles et infertilité ont permis d’obtenir ces taux dans ces indications. Ce taux est de 25 % pour les cures d’incontinence urinaire d’effort, lié dans 62,5 % des cas à une non reprise optimale des mictions le soir de l’intervention et de 17 % pour les cœlioscopies. Ces taux sont relativement importants mais concernent les deux types d’intervention pour lesquels les risques de conversion en hospitalisation traditionnelle sont les plus importants. Le développement des techniques de chirurgie miniinvasives telles que l’hystéroscopie opératoire et la cœlioscopie, la maîtrise de techniques d’anesthésie plus légères ainsi que la prise en charge accrue de la douleur postopératoire ont permis l’essor de la prise en charge ambulatoire. Reste les freins notamment organisationnels ; à savoir notamment l’absence de relais organisé entre la ville et l’hôpital et le faible nombre de lit proposé en chirurgie

298 ambulatoire dans les structures ; ce qui conduit à des hospitalisations ambulatoires dites « foraines » c’est-à-dire sur des lits d’hospitalisation complète donc sans personnel dédié en nombre suffisant ce qui est une adaptation soit à la montée en nombre de l’ambulatoire soit à l’inadaptation architecturale des lieux et qui est probablement un frein au développement de la chirurgie ambulatoire. La prise en charge « foraine » en ambulatoire est par ailleurs moins avantageuse en termes financier puisqu’elle mobilise les moyens de l’hospitalisation traditionnelle qui sont quatre fois plus onéreux que les hospitalisations ambulatoires. Ces constatations sont à l’origine de l’ouverture d’unité spécifique de chirurgie ambulatoire mutualisant différentes spécialités. La chirurgie non programmée, effectuée en urgence, est difficile à réaliser en hospitalisation courte en raison principalement de problèmes organisationnels : occupation du bloc opératoire, jeun de 6 heures nécessaires pour l’anesthésie, heure de consultation aux urgences, intervention réalisée le week-end même avec une durée d’hospitalisation inférieure à 12 heures. En dehors des urgences différées qui peuvent être programmées pour le lendemain, la chirurgie sous anesthésie locale doit être diffusée pour réduire les durées d’hospitalisation associées à la prise en charge en urgence notamment par l’utilisation de blocs paracervicaux pour les aspirations réalisées en urgence. La question principale qui reste peu évaluée concerne la satisfaction des patientes sur ce type de prise en charge. Une étude prospective réalisée en Irlande du Nord a trouvé une bonne compliance des patients vis-à-vis des instructions postopératoires et un faible recours au médecin traitant en postopératoire immédiat [7]. Cependant, cette étude n’évaluait pas la satisfaction des patientes vis-à-vis de cette prise en charge. En pratique quotidienne, les patientes sont souvent satisfaites de cette prise en charge, et certains auteurs rapportent que l’analyse de questionnaire de satisfaction le confirme mais aucune donnée n’a été publiée [8]. L’hospitalisation en ambulatoire offre un bénéfice théorique par rapport à l’hospitalisation complète avec une morbidité équivalente, voire moindre : diminution des infections nosocomiales notamment [4]. Le principal frein est cependant « idéologique » ; on en vient à se demander pourquoi cette prise en charge qui ne semble présenté que des avantages ne se développe pas rapidement et sans nécessiter l’intervention des politiques. L’exemple de la pose de bandelettes sous urétrales en ambulatoire est intéressant puisque l’avis général est que « tout le monde » réalise la pose de bandelettes sous urétrales majoritairement en ambulatoire. Cependant, lors du dernier rapport publié dans le Nouvel Observateur, reflet des données informatisées du PMSI, la durée moyenne de séjour nationale pour ce type d’intervention est supérieure à 2 jours. Qui croire ? La réalité subjective reflet de l’idéal des chirurgiens ou la force tranquille des chiffres ? L’économiste Joseph Schumpeter mort en 1950 faisait la distinction entre innovation et invention, distinction qui reste d’actualité et permet d’expliquer la non-diffusion de l’ambulatoire (Abécédaire de chirurgie ambulatoire [ANAP]). L’invention crée de la nouveauté ou remplace l’existant alors que l’innovation renouvelle l’existant, le

P. Capmas et al. transforme. Elles n’ont pas la même diffusion ; l’invention diffuse comme une traînée de poudre une fois son bénéfice prouvé alors qu’à bénéfice égal, l’innovation se diffuse selon 3 phases, une première phase de négation, suivie d’une phase de mode et enfin une phase de développement [9]. La chirurgie ambulatoire est malheureusement une innovation et non une invention ce qui explique sa difficulté de diffusion. Elle doit donc pour se répandre, malgré la preuve de ses bénéfices multiples, passer la phase de négation qui consiste en une détraction par les spécialistes qui arguent que l’innovation n’apporte rien, présente des dangers et le risque lors de cette phase est la disparition de l’innovation. Il semble pour la chirurgie ambulatoire que cette phase soit en train de passer. Reste cependant à affronter la phase de mode qui est au moins aussi dangereuse puisque tout le monde risque de la pratiquer sans respecter les conditions de mise en œuvre. Les conséquences néfastes arrivent alors et les critiques reviennent sur le devant de la scène. La phase de maturité peut alors enfin arriver si les deux précédentes ont été surmontées (Abécédaire de chirurgie ambulatoire [ANAP]). . . Les hystérectomies n’ont pas été incluses dans cette analyse même si leur réalisation en ambulatoire mais sur des définitions d’hospitalisation de moins de 24 heures (et non 12 heures) est possible [10]. Ce type de chirurgie en prise en charge ambulatoire doit il être favorisé alors que des interventions plus classiques ne sont pas réalisées en ambulatoire ? Est ce là le reflet d’un phénomène de mode ou le résultat de freins lié à la tarification et aux limitations ¸aises ? psychosociales franc La diffusion de la prise en charge chirurgicale en ambulatoire doit donc suivre ce cheminement mais chacun doit garder à l’esprit et notamment pour éviter la phase du phénomène de mode, que c’est bien le patient qui est en ambulatoire et non l’intervention. Le choix d’une prise en charge en ambulatoire repose sur la balance bénéfice—risque pour le patient.

Conclusion Une prise en charge large en ambulatoire est possible en chirurgie gynécologique. L’objectif de 80 % d’ambulatoire fixé par les autorités de santé sur les actes traceurs est réalisable sans risque supplémentaire. La diffusion de la prise en charge chirurgicale en ambulatoire est possible à condition de garder à l’esprit que c’est bien le patient qui est en ambulatoire et non l’intervention. Le choix d’une prise en charge en ambulatoire repose sur la balance bénéfice—risque pour chaque patient.

Déclaration d’intérêts Les auteurs n’ont pas transmis de déclaration de conflits d’intérêts.

Références [1] Conférence de consensus. La chirurgie sans hospitalisation. Rapport de la conférence. Rev Hosp France 1995;2:156—71.

Promouvoir la chirurgie ambulatoire [2] Mahieu A, Raffy-Pihan N. La chirurgie ambulatoire en France : bilan et perspectives. Question d’économie de la santé; 1998. p. 1—4 [vol. 2]. [3] Manchikanti L, Singh V, Hirsch JA. Saga of payment systems of ambulatory surgery centers for interventional techniques: an update. Pain Physician 2012;15: 109—30. [4] HAS, ANAP. Ensemble pour le développement de la chirurgie ambulatoire; 2012 www.has-sante.fr [5] SFAR. Prise en charge anesthésique des patientes en hospitalisation ambulatoire. Recommandations formalisées d’expert. SFAR; 2009 http://www.anap.fr/fileadmin/user upload/04publications outils/Chirurgie ambulatoire/ Recommandations SFAR chir ambulatoire2009.pdf

299 [6] Aldwinckle RJ, Montgomery JE. Unplanned admission rate and postdischarge complications in patients over the age of 70 following day case surgery. Anaesthesia 2004;59:57—9. [7] Kelly MC. Patients’ perception of day case surgery. Ulster Med J 1994;63:27—31. [8] Lecuru F. La chirurgie ambulatoire en gynécologie. Gynecol Obtet Fertil 2008;36:701—2. [9] Schumpeter J. Théorie de l’évolution économique [Theorie der wirtschaftlichen Entwicklung]; 1911 [Traduit en franc ¸ais dans un ouvrage: « Les classiques des sciences sociales » 1935]. [10] de Lapasse C, Rabischong B, Bolandard F, Canis M, Botchorischvili R, Jardon K, et al. Total laparoscopic hysterectomy and early discharge: satisfaction and feasibility study. J Minim Invasive Gynecol 2008;15:20—5.

[Promote ambulatory surgery in France in 2013: a cohort analysis].

Study feasibility of outpatient management for gynaecologic surgery...
556KB Sizes 0 Downloads 3 Views