Annales Franc¸aises d’Anesthe´sie et de Re´animation 33 (2014) 669–676

Revue ge´ne´rale

Prise en charge pe´riope´ratoire du patient scle´rodermique Perioperative management of patients with systemic scleroderma E. Be´gneu, M. Aı¨ssou *, T. Lescot, J.P. Cabane, M. Beaussier De´partement d’anesthe´sie re´animation, hoˆpital Saint-Antoine, AP–HP, 184, rue du Faubourg-Saint-Antoine, 75012 Paris, France

I N F O A R T I C L E

R E´ S U M E´

Historique de l’article : Rec¸u le 9 juillet 2014 Accepte´ le 30 septembre 2014 Disponible sur Internet le 1er novembre 2014

La scle´rodermie syste´mique est une maladie auto-immune qui associe des anomalies de la microcirculation et une accumulation de collage`ne responsable d’atteinte cutane´e, digestive, pulmonaire, cardiaque ou re´nale. La fre´quence ainsi que la se´ve´rite´ de ces atteintes sont extreˆmement variables et peuvent eˆtre a` l’origine de nombreuses difficulte´s rencontre´es par les me´decins anesthe´sistes-re´animateurs lors de la prise en charge de ces patients : difficulte´s d’acce`s veineux, risques d’intubation difficile, d’inhalation de liquide gastrique, mais aussi d’insuffisance cardiaque droite et de crise re´nale aigue¨ scle´rodermique. L’objectif de cette revue est de rappeler la physiopathologie et les diffe´rentes complications potentielles de cette pathologie lors de la prise en charge anesthe´sique et re´animatoire ainsi que les modalite´s de prise en charge les plus adapte´es. ß 2014 Socie´te´ franc¸aise d’anesthe´sie et de re´animation (Sfar). Publie´ par Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.

Mots cle´s : Scle´rodermie Anesthe´sie Gestion pe´riope´ratoire Physiologie Crise re´nale scle´rodermique

A B S T R A C T

Keywords: Systemic sclerosis Physiology Anaesthesia Perioperative management Acute renal failure

Systemic sclerosis (SSc) is an auto-immune disease characterized by vasculopathy and the combination of microangiopathy and tissue collagen deposit leading to skin, digestive, pulmonary, myocardial and renal injuries. These repercussions could be challenging for anesthesiologists and associated with difficulties in airway management, and occurrence of congestive right heart failure or acute kidney crisis. The aim of this review is to review the physiopathology and the progression of the SSc, as well as to provide a strategy of perioperative management of these patients. ß 2014 Socie´te´ franc¸aise d’anesthe´sie et de re´animation (Sfar). Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

1. Introduction La scle´rodermie syste´mique est une maladie rare mal connue des me´decins anesthe´sistes-re´animateurs. Cette revue ge´ne´rale a pour but de rappeler les bases de la physiopathologie, la classification ainsi que les diffe´rentes atteintes d’organes de la scle´rodermie syste´mique et leurs conse´quences sur la prise en charge anesthe´sique. 2. La scle´rodermie syste´mique 2.1. E´pide´miologie La scle´rodermie syste´mique (ScS) est une maladie rare qui touche pre´fe´rentiellement la femme (3F/1H) aˆge´e de 40 a` 60 ans. * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (M. Aı¨ssou).

Cette connectivite a une distribution mondiale dont la pre´valence semble eˆtre de l’ordre de 50 a` 200 cas par million d’habitants, ce qui fait estimer le nombre de patients atteints de ScS dans notre pays entre 3000 et 12 000 [1,2]. 2.2. Physiopathologie La scle´rodermie syste´mique est une maladie auto-immune associe´e a` un dysfonctionnement des cellules immunitaires, des fibroblastes et des cellules endothe´liales. Les facteurs responsables de ces anomalies cellulaires restent a` de´terminer. Certains virus (CMV) ou certains facteurs chimiques comme les solvants et la silice pourraient jouer un roˆle de´clenchant. Les facteurs ge´ne´tiques (polyge´niques) jouent un roˆle indiscutable, mais faible. Bien que mal comprise, la physiopathologie de la scle´rodermie syste´mique semble associer une production accrue de prote´ines de

http://dx.doi.org/10.1016/j.annfar.2014.09.008 0750-7658/ß 2014 Socie´te´ franc¸aise d’anesthe´sie et de re´animation (Sfar). Publie´ par Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.

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la matrice extracellulaire par les fibroblastes, une dysfonction endothe´liale et une activation du syste`me immunitaire. Les fibroblastes synthe´tisent en exce`s des constituants de la matrice extra-cellulaire comme le collage`ne de type IV, les prote´oglycanes et la fibronectine ainsi que des prote´ines inhibant la de´gradation de cette matrice comme l’inhibiteur tissulaire des me´talloprote´inases 3. L’ensemble de ces me´canismes aboutit a` une accumulation de collage`ne [3]. Il s’y associe des le´sions vasculaires et endothe´liales caracte´rise´es par un remaniement de la paroi arte´riolaire avec prolife´ration des cellules de l’intima, une hypertrophie de me´dia et l’apparition d’une fibrose au sein de l’adventice. L’ische´mie distale re´pe´te´e entraıˆne des changements dans le me´tabolisme cellulaire a` l’origine de produits de de´gradation de l’oxyge`ne mis en cause dans le de´clenchement et la progression de la maladie [4]. Enfin l’activation des lymphocytes T au cours de la maladie favorise l’accumulation de collage`ne et l’hyperre´activite´ vasculaire en intervenant dans l’activation des fibroblastes et en ayant un effet cytotoxique direct sur les cellules endothe´liales. Les derniers travaux insistent sur le roˆle important des cellules dendritiques et de la che´mokine CXCL4 dont le taux est corre´le´ a` la gravite´ de la maladie [5]. La physiopathologie de la scle´rodermie permet de comprendre l’expression clinique de cette pathologie incluant les manifestations cutane´es, le syndrome de Raynaud souvent expression inaugurale de la maladie, la dysfonction intestinale, l’HTAP, l’atteinte cardiaque et pulmonaire. 2.3. Classification et pronostic En 1988, LeRoy et al. ont individualise´ deux formes principales de ScS, les formes cutane´es diffuses et les formes cutane´es limite´es. Les formes cutane´es diffuses repre´sentent environ 40 % des patients. L’atteinte cutane´e s’e´tend au-dela` des coudes et des genoux, inte´ressant la partie proximale des membres et/ou le tronc. Son e´volution est maximale dans les deux a` trois ans apre`s l’apparition du premier signe en dehors du syndrome de Raynaud. Les anticorps anticentrome`res sont ge´ne´ralement absents et on retrouve des topoı¨some´rase I. De fac¸on concomitante, les manifestations visce´rales apparaissent sous forme d’atteintes articulaires, musculaires, digestives hautes et basses, d’une crise re´nale, d’une pneumopathie infiltrante diffuse et/ou d’une atteinte cardiaque [6]. L’atteinte re´nale est associe´e a` la positivite´ des anti-RNA polyme´rase de type III. La survenue d’une hypertension arte´rielle pulmonaire est possible et gre`ve le pronostic. La mortalite´ est plus pre´coce dans cette forme que dans la forme cutane´e limite´e. Ainsi la prise en charge des malades ayant une forme cutane´e diffuse est plus active. En effet, les atteintes visce´rales doivent eˆtre de´piste´es pre´cocement pour en ame´liorer le pronostic. Dans les formes cutane´es limite´es, l’atteinte cutane´e peut toucher les mains, les avant-bras, la face, les pieds et les jambes, mais ne remonte pas au-dela` des coudes et des genoux. La signature immunologique repose sur la pre´sence des anticorps anticentrome`res dans 70 a` 90 % des cas, et les topoı¨some´rases I sont ge´ne´ralement absents. Les manifestations visce´rales sont plus rares, mais peuvent se compliquer d’une hypertension arte´rielle pulmonaire (en ge´ne´ral plus tardive que dans la SSc diffuse). De ce fait, la surveillance est moins rapproche´e si aucune atteinte visce´rale n’est de´tecte´e d’emble´e, mais prolonge´e en raison du risque tardif d’HTAP ou de complications digestives. Chez certains patients, la ScS s’associe a` une ou plusieurs autres connectivites dans le cadre d’un syndrome « de chevauchement » : lupus e´rythe´mateux syste´mique, syndrome de Sjo¨gren, myopathie inflammatoire, polyarthrite inflammatoire plus rarement [7]. La ScS est responsable d’une re´duction significative de la survie avec des taux de survie variant de 35 % a` 82 % a` 10 ans selon les e´tudes. La survie a` 10 ans est de 53,4 % dans les formes diffuses et

de 75 % dans les formes limite´es [8]. L’amyotrophie observe´e chez ces patients qui est secondaire aux atteintes articulaires, a` l’inflammation chronique et a` la malabsorption est fortement associe´e a` la mortalite´. Le pronostic vital de´pend essentiellement de la pre´sence d’une pneumopathie infiltrante diffuse (PID) se´ve`re (12 a` 14 % des cas) et d’une HTAP (8 a`12 % des cas) qui repre´sentent – a` elles deux – les premie`res causes de mortalite´ dans la ScS [8]. 2.4. Atteinte d’organes 2.4.1. Manifestations cutane´es 2.4.1.1. Le syndrome de Raynaud. Souvent inaugural, il est pre´sent dans plus de 95 % des cas de ScS et peut pre´ce´der l’ensemble des autres manifestations cliniques de plusieurs anne´es. Il s’agit d’un acrosyndrome paroxystique se manifestant au froid et atteignant principalement les mains, parfois les pieds. Le syndrome de Raynaud se reconnaıˆt cliniquement par ses trois phases : la phase dite « syncopale » caracte´rise´e par un vasospasme rendant les doigts blancs, insensibles et froids, la phase dite « asphyxique » avec des doigts cyanose´s et bleus, puis la phase « e´rythermalgique », rouge, correspondant a` une hyperhe´mie ˆ lante ou dysesthe´sique des doigts. bru 2.4.1.2. La scle´rose cutane´e et muqueuse. Cette dernie`re touche dans un premier temps les doigts qui deviennent boudine´s, effile´s, fixe´s en le´ge`re flexion. La peau est paˆle, e´paisse, lisse, adhe´rente et impossible a` pincer. Cette scle´rose s’entend progressivement avec la maladie posant le proble`me d’acce`s veineux pe´riphe´riques. Au-dela` des membres, la face est une localisation fre´quente de la scle´rose cutane´e au cours de la scle´rodermie syste´mique. Les principales manifestations stomatologiques comprennent la limitation de l’ouverture buccale, la xe´rostomie, l’atrophie cutane´e et la ne´vralgie du V3. Leur pre´valence est mal e´value´e [9]. Ces le´sions faciales sont domine´es par la fibrose, la peau devenant scle´reuse, dure et adhe´rente aux plans profonds, occasionnant un effacement des rides et des plis, une perte de la mimique, une limitation de l’ouverture buccale (LOB). Des le´sions oste´oarticulaires des os de la face sont aussi de´crites, le plus souvent a` type d’oste´olyse mandibulaire, de pathoge´nie et d’e´volutivite´s incertaines [10]. Si la scle´rose cutane´e est souvent au premier plan, la scle´rose muqueuse existe aussi avec re´traction gingivale, parodontopathie, e´paississement du frein lingual, apparition de brides vestibulaires, ou disparition des reliefs palatins. Vincent et al. [11] soulignent l’importance des manifestations buccofaciales de la ScS et leur retentissement au quotidien chez les patients. Il apparaıˆt que sur 30 patients, 93 % ont une atrophie cutane´e faciale et 66 % ont une LOB de´finie par une ouverture infe´rieure a` 5 cm. De plus, il existe une relation significative entre la LOB et l’existence d’une atteinte œsophagienne. Cela sugge`re qu’il existe un continuum entre ces deux localisations anatomiquement proches. 2.4.2. Atteinte pulmonaire Les atteintes respiratoires sont fre´quentes au cours de la ScS (20 a` 100 % des cas). L’atteinte interstitielle et l’hypertension arte´rielle pulmonaire sont conside´re´es parmi les toutes premie`res causes de de´ce`s au cours de cette maladie [12]. 2.4.2.1. L’hypertension arte´rielle pulmonaire (HTAP). La dyspne´e d’effort, bien que multifactorielle chez le patient atteint de scle´rodermie, peut eˆtre le mode de re´ve´lation de l’HTAP. Cette complication, dramatique par son e´volution, complique l’e´volution chez 10 a` 15 % des patients atteints de ScS [13,14]. Le taux de survie a` 1 an est proche de 55 % [15].

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Trois me´canismes contribuent a` l’augmentation des re´sistances vasculaires pulmonaires : la vasoconstriction, le remodelage de la paroi du lit vasculaire pulmonaire et des phe´nome`nes de thrombose in situ [16]. Il existe un de´faut de production par les cellules endothe´liales de substances vasodilatatrices comme le monoxyde d’azote (NO), la prostacycline (PGI2) avec un exce`s de libe´ration de me´diateurs vasoconstricteurs comme l’endothe´line 1. Les vaisseaux pulmonaires sont le sie`ge d’une hypertrophie de me´dia des arte`res de petit calibre avec prolife´ration des cellules musculaires lisses, fibrose intimale et le´sions plexiformes correspondant a` une prolife´ration des cellules endothe´liales. Une atteinte veinulaire est possible, donnant des œde`mes pulmonaires favorise´s par les vasodilatateurs. L’HTAP de la ScS est trois fois sur quatre isole´es, une fois sur quatre associe´es a` une fibrose pulmonaire. La dyspne´e est le maıˆtre symptoˆme de l’HTAP, mais malheureusement son diagnostic n’est souvent e´voque´ qu’a` un stade avance´ d’e´volution puisque 55 a` 75 % des patients sont en classe fonctionnelle NYHA III ou IV au moment du diagnostic [17]. Un e´clat de B2 au foyer pulmonaire doit attirer l’attention. Plus tardivement surviennent des douleurs thoraciques angineuses te´moin de l’ische´mie du ventricule droit, parfois des lipothymies voire des syncopes d’effort ou des he´moptysies qui sont des crite`res de gravite´. Un diagnostic pre´coce (en classe NYHA II) s’accompagne d’une meilleure survie [14]. Dans ce but, la pratique annuelle d’un e´cho-Doppler cardiaque a` la recherche de la vitesse d’insuffisance tricuspidienne chez tout patient atteint de ScS, meˆme en l’absence de symptoˆme e´vocateur d’HTAP [18] est recommande´e. L’e´chographie cardiaque de repos peut eˆtre mise en de´faut, raison pour laquelle il est propose´ de demander une e´chographie cardiaque d’effort quand les re´sultats sont discordants. 2.4.2.2. Pneumopathie interstitielle diffuse (PID). La pre´valence des PID au cours de la scle´rodermie est difficile a` e´valuer, on estime pourtant l’incidence entre 16 et 100 % en fonction du type d’examen utilise´ pour le diagnostic [19,20]. Les PID sont de´finies par un processus inflammatoire et diffus d’e´volution e´ventuellement fibrosante qui inte´resse l’interstitium pulmonaire et s’associe volontiers a` des le´sions des voies ae´riennes infe´rieures, des alve´oles et des vaisseaux. La PID survient plus fre´quemment au cours des formes diffuses, a fortiori en pre´sence d’anticorps anti-Scl-70 mais peut e´galement eˆtre observe´e chez les patients ayant une forme cutane´e limite´e. Bien que mal comprise, la pathoge´nie des manifestations respiratoires re´sulte de la combinaison de le´sions inflammatoires, destructives et fibrosantes. Initialement, on observe des le´sions e´pithe´liales et endothe´liales puis, au cours de la phase de re´paration, il existe une se´cre´tion de cytokines de type TH-2 dont le chef de file est l’IL-4 et une inhibition de l’INF-ı, ce qui favorise la prolife´ration des fibroblastes et la synthe`se de collage`ne. Enfin, comme dans tout processus fibrosant, il existe un roˆle important du stress oxydatif, en particulier une augmentation des marqueurs de peroxydation lipidique et que d’autres marqueurs du dommage oxydatif comme les produits avance´s d’oxydation prote´ique et les nitrosothiols et une baisse des de´fenses antioxydantes appre´cie´e par la mesure des groupements thiols totaux. Il est possible que le reflux gastro-oesophagien (RGO) joue un roˆle dans les le´sions pulmonaires de la ScS. L’association de le´sions inflammatoires, destructives et fibrosantes rend le poumon des patients atteints de ScS sensible aux modalite´s de ventilation [21]. On peut ainsi e´mettre l’hypothe`se que la ventilation protectrice chez ces malades pourrait diminuer l’incidence des complications respiratoires postope´ratoires. Cliniquement, les PID de la ScS sont souvent asymptomatiques au de´but. L’infiltration interstitielle se traduit par des symptoˆmes non spe´cifiques (cre´pitants, hippocratisme digital, toux se`che, dyspne´e) et souvent tardifs lorsque l’atteinte pulmonaire est

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avance´e. L’interrogatoire syste´matique devra rechercher une dyspne´e d’effort, quelquefois ne´glige´e par le patient. La dyspne´e d’effort est le seul signe clinique pertinent permettant d’e´valuer tant la tole´rance cardiaque a` l’effort que la fonction respiratoire. Elle est centre´e sur le test de marche a` 6 minutes et l’indice de Borg [22]. Bien entendu, ces tests peuvent eˆtre influence´s par l’atteinte du syste`me locomoteur. Le mauvais pronostic de la PID au cours de la scle´rodermie impose son de´pistage syste´matique. La rarete´ de cette affection et l’absence de facteurs pre´dictifs de survenue ou d’e´volutivite´ de la fibrose pulmonaire expliquent l’absence de recommandations consensuelles pre´cises sur les examens de de´pistage et la fre´quence a` laquelle renouveler ces examens. Cependant, il est maintenant admis que la re´alisation d’une tomodensitome´trie thoracique haute re´solution (avec protocole low-dose), d’e´preuves fonctionnelles respiratoires (EFR) avec mesure du coefficient de transfert du monoxyde de carbone, d’un test de marche de 6 min avec mesure de la saturation en oxyge`ne et l’estimation de la dyspne´e a` l’aide de l’indice de Borg est utile dans le bilan annuel des ScS. L’ensemble de ces examens permet de faire le diagnostic et d’e´valuer la se´ve´rite´ de la PID [23,24]. 2.4.3. Manifestations digestives L’atteinte du tube digestif a e´te´ l’une des premie`res localisations extracutane´es reconnue au cours de la ScS. Tous les e´tages du tube digestif peuvent eˆtre inte´resse´s. Elle est fre´quente au cours de la ScS, elle est observe´e chez 75 a` 90 % des patients porteurs de formes limite´es et diffuses de la maladie. 2.4.3.1. Atteinte œsophagienne. L’œsophage est le segment du tube digestif le plus souvent touche´ dans la scle´rodermie syste´mique : 50 a` 90 % des patients sont porteurs d’une atteinte œsophagienne [12]. Cette atteinte est associe´e a` un haut risque de pneumopathie infectieuse. Les signes d’appel clinique de l’atteinte œsophagienne sont ge´ne´re´s par les troubles du pe´ristaltisme œsophagien aboutissant a` l’hypotonie du sphincter infe´rieur de l’œsophage. Les symptoˆmes les plus fre´quemment rapporte´s sont le reflux gastro-œsophagien (RGO) et la dysphagie. Le RGO, signale´ chez 50 a` 80 % des patients, favorise la survenue d’œsophagite [25]. La dysphagie est retrouve´e dans 50 % des cas, et elle est secondaire a` une œsophagite (compliquant un RGO) ou aux troubles moteurs œsophagiens. La manome´trie œsophagienne constitue l’examen le plus sensible des troubles moteurs œsophagiens [26]. La pHme´trie documente facilement le reflux, mais parfois celui-ci a une composante biliaire plus difficile a` mettre en e´vidence (impe´danceme´trie). 2.4.3.2. Atteinte gastrique. L’atteinte gastrique demeure longtemps latente, son diagnostic e´tant habituellement porte´ au stade des troubles moteurs e´volue´s ou d’he´morragies digestives secondaires a` l’existence de te´langectasies gastriques mieux connues sous le nom « d’estomac paste`que ». Ainsi, chez les patients symptomatiques, les manifestations cliniques sont principalement lie´es a` un ralentissement de la vidange gastrique. Elles se traduisent par un syndrome dyspeptique, voire par une intole´rance alimentaire. La manome´trie antro-duode´nale est un examen utile pour de´pister les troubles moteurs gastriques (hypo-pe´ristaltisme en pe´riode inter- et postprandiale). 2.4.3.3. Atteinte intestinale. Fre´quente (50 % au moins), l’atteinte de l’intestin greˆle est longtemps asymptomatique. Ses signes d’appel cliniques ne sont pas spe´cifiques et peuvent rester isole´s pendant longtemps, correspondant a` une geˆne abdominale, des

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ballonnements, des nause´es et/ou vomissements ou encore des troubles du transit. De fait, dans la plupart des cas, c’est au stade des complications que va eˆtre diagnostique´e l’atteinte intestinale. Les manifestations digestives secondaires a` une ente´ropathie e´volue´e sont en particulier repre´sente´es par le syndrome de malabsorption et le syndrome de pseudo-obstruction intestinale. Le syndrome de malabsorption est re´ve´le´ chez 10 a` 25 % des patients [27]. Il est de´termine´ par une alte´ration de l’e´tat ge´ne´ral et une diarrhe´e associe´e a` un syndrome carentiel. La pullulation microbienne (ellemeˆme induite par l’hypope´ristaltisme intestinal et/ou par le traitement antise´cre´toire) est un facteur favorisant. Le syndrome de pseudo-obstruction intestinale est caracte´rise´ par une propulsion intestinale inefficace chez 2 a` 10 % des patients [28]. Il associe des douleurs abdominales diffuses, une constipation et un me´te´orisme d’intensite´ variable. 2.4.4. Atteinte cardiaque A` un stade e´volue´ de la ScS, le patient peut pre´senter une insuffisance cardiaque secondaire a` l’HTAP, a` la fibrose pulmonaire ou a` l’hypertension arte´rielle d’origine re´nale. Cependant, l’atteinte myocardique infraclinique est fre´quente et due a` une ische´mie chronique par anomalies de la microcirculation myocardique (« phe´nome`ne de Raynaud myocardique »), entraıˆnant des le´sions de fibrose irre´versibles. Des troubles du rythme ventriculaires ou auriculo-ventriculaires peuvent eˆtre fatals. Des pe´ricardites sont possibles, mais rarement symptomatiques. Ces diffe´rentes atteintes cardiaques sont principalement de´piste´es par l’e´lectrocardiogramme, l’e´chographie cardiaque bidimensionnelle et le Holter des 24 heures. En cas de traduction clinique, l’atteinte cardiaque a un pronostic pe´joratif et le taux de mortalite´ a` 2 ans est estime´ a` environ 60 % [29]. 2.5. Traitement Actuellement, aucun traitement ne gue´rit les patients de leur scle´rodermie (Tableau 1). Une approche essentiellement symptomatique a longtemps e´te´ utilise´e. Depuis 20 ans, l’utilisation d’immunosuppresseurs, de vasodilatateurs et notamment d’antagonistes de certaines cibles physiopathologiques (endothe´line-1), associe´e a` une prise en charge globale, a permis de modifier le pronostic local et ge´ne´ral des patients. Toutefois, les e´tudes the´rapeutiques randomise´es sont plutoˆt de´cevantes et ne permettent pas de de´finir de consensus pre´cis.

3. Gestion pe´riope´ratoire 3.1. E´valuation pre´ope´ratoire et prise en charge anesthe´sique La consultation pre´anesthe´sique s’attachera a` rechercher les diffe´rentes atteintes d’organes et leur se´ve´rite´. Les manifestations cutane´es sont souvent au premier plan. 3.1.1. Acce`s aux voies ae´riennes supe´rieures A` ce jour, aucune e´valuation de la pre´valence de la ventilation ou de l’intubation difficile n’est disponible au cours de la scle´rodermie. Cependant, ces patients doivent eˆtre conside´re´s comme a` risque d’intubation difficile du fait de la scle´rose cutane´omuqueuse et de la limitation de l’ouverture de bouche. 3.1.2. Atteinte pulmonaire 3.1.2.1. HTAP. Le diagnostic est e´tabli lorsque la pression arte´rielle pulmonaire moyenne, mesure´e au cours du cathe´te´risme cardiaque droit, est supe´rieure a` 25 mmHg au repos ou 30 mmHg a` l’effort avec une pression capillaire pulmonaire < 15 mmHg.

Tableau 1 Traitements des diffe´rentes manifestations de la scle´rodermie syste´mique. Pneumopathie infiltrante diffuse Cyclophosphamide Corticothe´rapie a` faible dose (10 mg/j) (non syste´matique) Oxyge´nothe´rapie Transplantation monopulmonaire ou bipulmonaire Mycophe´nolate mofe´til Hypertension arte´rielle pulmonaire Oxyge´nothe´rapie Anticoagulants Diure´tiques E´poproste´nol Antagonistes des re´cepteurs de l’endothe´line : bosentan, sitaxentan Inhibiteurs de la 5-phosphodieste´rase (silde´nafil) Atrioseptostomie Transplantation cardiopulmonaire Cœur Inhibiteurs calciques a` forte dose Inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine (max 150 mg/j, non syste´matique) Antiarythmiques Diure´tiques De´fibrillateur implantable Crise re´nale Inhibiteurs calciques par voie intraveineuse Furose´mide E´puration extrare´nale Transplantation re´nale Atteinte vasculaire pe´riphe´rique Inhibiteurs calciques Analogues de la prostacycline Antiagre´gants Antagonistes des re´cepteurs A et B de l’endothe´line : bosentan (pre´vention de la survenue de nouvelles ulce´rations digitales) Atteinte digestive Œsophage : inhibiteurs de la pompe a` protons, prokine´tiques (me´toclopramide, dompe´ridone) Estomac : e´rythromycine (1 mg/kg 3 a` 4 fois par jour) Greˆle : octre´otide (50 a` 100 mg/j), antibiotiques (norfloxacine, amoxicilline) Atteinte articulaire Anti-inflammatoires non ste´roı¨diens Corticoı¨des a` faible dose (10 mg/j) Me´thotrexate

L’e´chographie doppler cardiaque est l’examen de re´fe´rence pour le de´pistage de l’HTAP. Les explorations fonctionnelles respiratoires (EFR) peuvent e´galement fournir un e´le´ment diagnostique lorsque les valeurs de la DLCO sont infe´rieures a` 40 % sans modification des volumes pulmonaires. Les situations susceptibles d’induire une aggravation de l’HTAP au cours d’une anesthe´sie ge´ne´rale sont la ventilation me´canique, l’hypoxe´mie, l’hypercapnie et le remplissage vasculaire excessif. Lors de la ventilation me´canique, l’augmentation de la pression transpulmonaire (pression alve´olaire – pression pleurale) entraıˆne une augmentation de l’impe´dance a` l’e´jection du VD qui peut se traduire par une baisse majeure du de´bit cardiaque [30]. De plus l’hypoxe´mie [31] et l’hypercapnie [32] majorent les re´sistances vasculaires pulmonaires et donc la pression arte´rielle pulmonaire. Peu de donne´es publie´es permettent de de´finir le protocole anesthe´sique optimal. L’essentiel de la litte´rature e´tant constitue´ de cas cliniques ou de se´ries de cas, la mortalite´ associe´e doit eˆtre sans doute sous-estime´e. De ce fait, la prise en charge d’une pression arte´rielle pulmonaire e´leve´e reste mal codifie´e. Il est possible qu’il faille envisager une diminution du volume courant associe´e a` une PEP basse [33]. Il convient e´galement d’optimiser la fre´quence respiratoire afin d’e´viter une auto-PEP et de limiter l’acidose respiratoire susceptible de majorer les re´sistances vasculaires pulmonaires [32].

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En cas de signe de de´compensation cardiaque droite, les diure´tiques sont utilise´s. Le furose´mide peut eˆtre utilise´ a` des doses croissantes jusqu’a` 500 mg/24 h. Les inhibiteurs calciques ne sont indique´s que chez les patients re´pondant au test au NO. Les digitaliques ne sont indique´s que lorsqu’il existe une fibrillation atriale ; en effet, la re`gle est de les e´viter en raison des risques majore´s d’hypoxie. La dobutamine peut eˆtre utilise´e en cas d’insuffisance cardiaque droite grave. 3.1.2.2. Pneumopathie interstitielle diffuse. L’examen comple´mentaire de choix est le scanner thoracique en coupes fines sans injection qui peut mettre en e´vidence plusieurs types d’anomalies : des images soit re´ticulaires intralobulaires soit en « rayon de miel » soit en « verre de´poli ». Les EFR sont e´galement utiles au de´pistage et au suivi de l’atteinte pulmonaire scle´rodermique. La baisse de la capacite´ de diffusion de l’oxyde de carbone (DLCO) ainsi que la baisse des volumes respiratoires (capacite´ vitale force´e, volume courant) aux EFR peuvent traduire soit une fibrose pulmonaire de´butante soit une HTAP. Ces examens seront a` re´aliser en fonction du contexte chirurgical. 3.1.3. Atteinte digestive Les manifestations digestives font remettre en cause la notion ˆ ne pre´ope´ratoire et doivent faire conside´rer les patients de jeu scle´rodermiques comme des patients a` estomac plein. Il n’existe aujourd’hui pas d’argument permettant de contre-indiquer la succinylcholine lors de la prise en charge de ces malades. Ainsi, devant le risque d’intubation difficile et celui d’estomac plein, il paraıˆt licite de proposer soit une intubation vigile sous fibroscopie soit de pre´voir une induction de se´quence rapide. L’atteinte digestive, de par ce processus fibrotique, est source de malabsorption et de prolife´ration bacte´rienne. Ceci conduit a` une augmentation de la morbidite´ et mortalite´ pe´riope´ratoire d’origine infectieuse. Bien que le niveau de preuve soit faible, il est possible qu’il faille e´largir l’antibioprophylaxie en raison de l’hospitalisation fre´quente de ces patients, de l’atteinte immunitaire et du risque de pullulation microbienne. 3.1.4. Atteinte cardiaque Au vu des diffe´rentes expressions cliniques, l’e´valuation clinique seule n’est pas suffisante afin de de´finir le risque cardiovasculaire des patients atteints de scle´rodermie. Un ECG est le minimum requis a` la recherche de trouble de conduction ou du rythme. Une e´chographie cardiaque e´valuant la fonction ventriculaire tant gauche que droite paraıˆt ne´cessaire. Elle est d’ailleurs recommande´e par l’OMS comme faisant partie du bilan syste´matique de tout patient atteint de scle´rodermie et doit eˆtre

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re´alise´e une fois par an. Enfin, pour les chirurgies les plus lourdes une e´valuation pre´ope´ratoire de la re´serve myocardique a` l’effort nous paraıˆt indique´e et un cathe´te´risme droit peut eˆtre fait en cas de doute. 3.1.5. Acce`s aux voies veineuses pe´riphe´riques La scle´rodermie syste´mique se manifeste par un durcissement et un e´paississement de la peau par exce`s de la production de collage`ne et par une formation de tissu fibreux. Chez ces patients, l’acce`s aux voies veineuses pe´riphe´riques est donc rendu plus difficile. Il est donc possible de proposer la pose d’un cathe´ter veineux central. 3.1.6. Autre Des difficulte´s peuvent eˆtre rencontre´es avec la mise en place de l’oxyme`tre de pouls au niveau des doigts. Un saturome`tre d’oreille ou un capteur transcutane´ frontal pourrait eˆtre propose´. Lors d’une chirurgie des membres, la mise en place du garrot pneumatique doit eˆtre discute´e avec l’e´quipe chirurgicale. Par ailleurs, afin d’e´viter l’aggravation d’un syndrome de Raynaud, il est important de bien re´chauffer les patients de`s leur arrive´e au bloc ope´ratoire, et ce jusqu’a` leur re´veil. 3.1.7. Au total Les diffe´rentes atteintes d’organes de la scle´rodermie syste´mique rendent ces patients a` risque de complications pe´riope´ratoires telles qu’un acce`s aux voies ae´riennes supe´rieures difficiles, un risque d’insuffisance cardiaque droite, un acce`s aux voies veineuses pe´riphe´riques difficiles et des troubles du rythme et de la conduction cardiaque (Tableau 2). 3.2. Prise en charge et complications postope´ratoires 3.2.1. Complications respiratoires 3.2.1.1. Complications non infectieuses. Chez les patients scle´rodermiques, un remplissage excessif et l’aggravation de la fibrose pulmonaire sous-jacente peuvent entraıˆner des complications respiratoires aigue¨s. 3.2.1.2. Complications infectieuses. Les infections repre´sentent 2 a` 9 % des causes de de´ce`s au cours de cette maladie [34]. Si l’utilisation des corticoı¨des reste prudente du fait du risque de survenue d’une CRS [35], les formes se´ve`res de ScS – en particulier les PID – sont volontiers traite´es par cyclophosphamide (CYC) (Endoxan1) et ce malgre´ l’efficacite´ tre`s modeste de ce traitement. Ceci justifie de porter attention a` la majoration e´ventuelle du risque infectieux sous ce traitement.

Tableau 2 Re´capitulatif des difficulte´s pe´riope´ratoires pre´visibles et proposition de conduite a` tenir. Atteintes d’organes

Difficulte´s pre´visibles

Signes cliniques

Cutane´e

Acce`s aux voies veineuses Intubation difficile Difficulte´s avec oxyme`tre de pouls Inhalation de liquide gastrique

Scle´rose cutane´e Scle´rose cutane´o-muqueuse et limitation de l’ouverture de bouche Syndrome de Raynaud RGO Dysphagie Gastropare´sie HTAP : dyspne´e d’effort Pneumopathie interstitielle diffuse

Digestives

Pulmonaires

Insuffisance cardiaque droite aigue¨ Insuffisance respiratoire aigue¨

Cardiaque

Troubles du rythme et de la conduction HTAP

Examens comple´mentaires

Conduite a` tenir Envisager la pose de cathe´ter central Induction Se´quence rapide ou intubation vigile Re´chauffement externe pre´coce Envisager une induction se´quence rapide

E´cho-Doppler cardiaque (1/an) EFR (1/an) TDM thoracique (1/an) ECG ETT (1/an)

Lutte contre l’hypoxe´mie, l’hypercapnie E´viter remplissage excessif PEP basse Ventilation protectrice Poursuite des traitements antiarythmiques et des antagonistes de l’endothe´line en pe´riope´ratoire

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Au cours de la ScS, la pre´sence d’une PID est un facteur de pre´disposition a` la survenue d’infections pulmonaires. Ainsi les 6 patients de´ce´de´s d’une pneumopathie infectieuse dans la cohorte sue´doise de 249 patients scle´rodermiques (dont les traitements n’e´taient pas pre´cise´s) pre´sentaient tous une PID se´ve`re [36]. Chez ces patients ainsi que chez ceux ayant un traitement immunosuppresseur, le risque est e´galement la survenue d’une pneumopathie a` germe opportuniste (pneumocystose, aspergillose, tuberculose, etc.). La tomodensitome´trie thoracique haute re´solution permet alors d’orienter le diagnostic, l’aspect pouvant varier en fonction du type de germe en cause et de guider un e´ventuel lavage bronchoalve´olaire (LBA) visant a` documenter l’agent infectieux en cause. Les pneumopathies d’inhalation sont favorise´es par les troubles de la de´glutition, le plus souvent dans le cadre d’une myopathie associe´e [37] et par les atteintes œsophagiennes, par dysfonction du sphincter infe´rieur de l’œsophage et reflux gastro-œsophagien se´ve`re. Ce sont des pneumopathies re´cidivantes, survenant pre´fe´rentiellement dans le territoire lobaire infe´rieur droit et dont le pronostic peut eˆtre re´serve´. Les patients scle´rodermiques avec PID e´volue´e, au meˆme titre que tout insuffisant respiratoire, ont des risques de de´velopper une de´compensation respiratoire a` l’occasion d’une infection par le virus de la grippe et le pneumocoque, et doivent donc eˆtre vaccine´s. 3.2.2. Crise re´nale aigue¨ scle´rodermique (CRS) Elle survient plus volontiers chez les patients ayant une scle´rodermie syste´mique diffuse re´cente rapidement progressive. Cette complication grave, qui peut survenir en pe´riope´ratoire, concerne pre`s de 20 % des ScS diffuses [38]. Dans sa forme typique, la CRS se caracte´rise par la survenue d’une HTA maligne de survenue brutale et d’une insuffisance re´nale aigue¨ oligoanurique. Elle peut eˆtre accompagne´e d’une ane´mie he´molytique avec pre´sence de schizocytes et d’une thrombope´nie entrant dans le cadre d’une microangiopathie thrombotique. Les patients a` risque de survenue d’une crise re´nale scle´rodermiques sont ceux qui pre´sentent une atteinte cutane´e diffuse, une progression rapide de l’atteinte cutane´e, une dure´e d’e´volution infe´rieure a` 4 ans, une ane´mie de survenue re´cente, un e´ve`nement cardiaque re´cent (pe´ricardite ou insuffisance ventriculaire droite), la pre´sence d’autoanticorps anti-ARN polyme´rase III et un traitement par prednisone > 15 mg/kg dans les 3 mois pre´ce´dents [39]. Mais le seul facteur pre´dictif de survenue d’une CRS est la prise au long cours d’une corticothe´rapie supe´rieure a` 15 mg/j d’e´quivalent de prednisone [40]. Les formes normotensives repre´sentent environ 10 % des cas de CRS et se caracte´risent par une plus grande fre´quence de microangiopathies thrombotiques [41]. L’e´chographie re´nale permet d’e´liminer une insuffisance re´nale obstructive et de confirmer la taille normale des reins. Le Doppler des arte`res re´nales permet d’e´liminer une ste´nose, une dissection ou une dysplasie. La re´alisation d’une biopsie re´nale n’est pas ne´cessaire pour porter le diagnostic de CRS. La CRS est une complication rare et se´ve`re de la ScS qui met en jeu le pronostic vital, mais son pronostic a e´te´ transforme´ depuis la de´couverte du roˆle be´ne´fique des IEC. Cependant, la mortalite´ associe´e a` cette manifestation reste e´leve´e et est estime´e entre 15 et 50 % notamment par de´faillance multivisce´rale, complications infectieuses et dialyse [42]. La prescription pre´alable d’inhibiteurs de l’enzyme de conversion ne semble cependant pas pre´venir ce risque. L’enjeu principal est le controˆle pre´coce de la pression arte´rielle avec un objectif de pression arte´rielle systolique < 120 mmHg et une pression arte´rielle diastolique < 80 mmHg dans les 72 heures suivant l’instauration du traitement. Il n’y a aucune indication aux

immunosuppresseurs ni aux e´changes plasmatiques. Une corticothe´rapie est contre-indique´e. La seule classe the´rapeutique a` avoir de´montre´ une efficacite´ et a` avoir modifie´ le pronostic de la crise re´nale scle´rodermique est celle des inhibiteurs de l’enzyme de conversion [43]. Un IEC de demi-vie courte, par exemple le captopril, est ge´ne´ralement recommande´ en augmentant progressivement la dose par palier de 50 mg toutes les 12 heures jusqu’a` la dose maximale de 150 mg/j [44]. L’augmentation de la cre´atinine´mie sous IEC doit eˆtre tole´re´e et ne doit pas faire diminuer la dose et un traitement spe´cifique est ne´cessaire en cas d’hyperkalie´mie. Un inhibiteur calcique par voie parente´rale (nicardipine) doit eˆtre associe´ pre´cocement si la pression arte´rielle n’est pas controˆle´e par les IEC seuls. Il faut e´viter en premie`re intention les antagonistes de l’angiotensine II qui n’ont pas d’effet inhibiteur de la bradykinine et ne bloquent pas ainsi les deux voies de vasoconstriction [45]. Le traitement repose e´galement sur le controˆle des complications me´taboliques et vole´miques (hyperkalie´mie, œde`me pulmonaire) dans un contexte d’insuffisance re´nale aigue¨ par un traitement diure´tique de l’anse dans un premier temps puis la dialyse si ne´cessaire. Le recours a` l’e´puration extra-re´nale doit eˆtre envisage´ pre´cocement si l’HTA est mal controˆle´e ou si la fonction re´nale se de´grade rapidement. Les proble`mes de voie d’abord chez ces patients ne doivent pas retarder sa mise en place. L’e´volution se fait parfois malgre´ tout vers l’insuffisance re´nale terminale. Un sevrage de la dialyse peut cependant eˆtre observe´ dans les deux premie`res anne´es suivant la survenue d’une crise re´nale scle´rodermique chez les malades avec une pression arte´rielle normalise´e sous IEC. De`s lors, il est commune´ment admis de ne transplanter les patients scle´rodermiques que passe´ ce de´lai de deux ans. Pour certains auteurs, la ciclosporine doit eˆtre e´vite´e du fait de sa toxicite´ vasculaire et de son roˆle potentiellement de´clenchant dans la survenue des crises re´nales scle´rodermiques [46]. La survie d’un greffon re´nal est de l’ordre de 68 %% et 60 % a` respectivement 1 et 3 ans [47]. Le traitement des formes normotensives de CRS fait e´galement appel aux IEC qui seront prescrits a` doses plus faibles.

4. Scle´rodermie et grossesse Au de´but de la grossesse, la dure´e d’e´volution de la scle´rodermie et les atteintes visce´rales doivent eˆtre e´value´es. Une scle´rodermie diffuse, qui e´volue depuis moins de 4 ans et qui se caracte´rise par la pre´sence de topoı¨some´rase I est plus active et plus agressive qu’une scle´rodermie limite´e, ancienne, avec des anticorps anticentrome`res. En cas d’atteintes visce´rales se´ve`res (fraction d’e´jection systolique infe´rieure a` 30 %, capacite´ vitale infe´rieure a` 50 %, malabsorption ou insuffisance re´nale), la de´cision d’interruption de grossesse de´pend du risque encouru par la me`re et l’enfant. Ce risque est en rapport avec le degre´ de de´faillance visce´rale, inde´pendamment du fait que c’est la scle´rodermie qui est en cause. Cette de´cision difficile est ne´cessairement multidisciplinaire, impliquant le me´decin interniste, l’obste´tricien, les anesthe´sistes-re´animateurs et, bien entendu, la me`re et son conjoint. Il y a encore 20 ans, la grossesse e´tait de´conseille´e aux patientes scle´rodermiques du fait de la surpre´sentation dans la litte´rature de grossesses ayant une issue de´favorable [48,49]. Devant les publications plus re´centes qui mettent en e´vidence une ame´lioration du pronostic materno-fœtal par rapport aux se´ries historiques [50], la scle´rodermie n’est plus conside´re´e comme une contreindication a` la grossesse mais comme une grossesse a` haut risque. Dans une se´rie re´trospective, Steen et al. [51] rapportent une fre´quence identique de fausses couches et d’avortements spontane´s

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dans une population de patientes scle´rodermiques compare´e a` une population de femmes en bonne sante´. Cette meˆme e´quipe rapporte des re´sultats similaires en 2007 sur une e´tude prospective concernant la fertilite´, l’incidence de fausses couches spontane´es, de retard staturo-ponde´ral et de pre´maturite´ [52]. Ces re´sultats sont a` ponde´rer avec le fait que des anomalies placentaires comparables aux le´sions d’HTA gravidique ont e´te´ rapporte´es au cours de la scle´rodermie. On observe ainsi des infarctus placentaires d’aˆges diffe´rents, des vasculopathies de´ciduales, une rare´faction villositaire et des le´sions de chorangiose. Concernant le risque maternel, il est domine´ par les complications re´nales et cardiaques. 4.1. Crise re´nale aigue¨ scle´rodermique (CRS) en cours de grossesse La CRS doit eˆtre la crainte principale du clinicien prenant en charge une patiente enceinte atteinte de ScS. Elle se pre´sente comme l’apparition d’une HTA accompagne´e d’une thrombope´nie, d’une aggravation de la fonction re´nale et d’une prote´inurie. Elle se diffe´rentie de la pre´e´clampsie par l’absence d’alte´ration du bilan he´patique et une alte´ration de la fonction re´nale plus profonde [53]. Elle touche les patientes atteintes de ScS e´voluant depuis moins de 4 ans [53]. Bien que l’incidence ne semble pas augmente´e par la grossesse [51–53], elle survient en fin de grossesse ou en postpartum imme´diat. Elle engage le pronostic vital et pose un proble`me diagnostique et the´rapeutique. En effet, la diffe´rencier de la pre´e´clampsie n’est pas aise´ tant devant l’anamne`se que dans la symptomatologie. Il semblerait que le dosage de la re´nine plasmatique puisse aider [54]. Il est clairement de´montre´ que le traitement de la crise passe par l’introduction d’un inhibiteur de l’enzyme de conversion qui ame´liore le pronostic maternel tant vital que fonctionnel [53] et qui doit eˆtre maintenu dans le post-partum afin d’e´viter les rechutes [50]. Enfin il n’y a pas de preuve formelle que l’interruption de grossesse permet d’amender la crise re´nale aigue¨. 4.2. Complications cardiaques au cours de la grossesse Les donne´es sur les complications cardiovasculaires au cours de la grossesse chez des patientes atteintes de ScS sont pauvres. La mortalite´ maternelle associe´e a` l’HTAP varie selon les e´tudes de 30 a` plus de 60 % selon les e´tiologies [55,56]. La plupart des morts maternelles sont retrouve´es dans la pe´riode du post-partum. Au cours de la grossesse, on observe une augmentation du de´bit cardiaque de l’ordre de 30 a` 40 %. Cette augmentation est principalement due a` une hausse de 30 % du volume d’e´jection systolique plus qu’a` une augmentation de la fre´quence cardiaque de l’ordre de 20–30 b/min. Cette augmentation du VES entraıˆne initialement une hypertrophie concentrique myocardique suivie d’une dilatation te´le´diastolique ventriculaire. Les patientes pre´sentant une HTAP ont des difficulte´s d’adaptation myocardique aux modifications physiologiques de la grossesse ; elles ont un risque de de´compensation majeur du cœur droit secondaire a` :  un re´seau arte´riel pulmonaire peu compliant ;  une augmentation des re´sistances pulmonaires lie´e a` l’e´le´vation du de´bit  cardiaque et du volume sanguin total ;  une augmentation de la post-charge et du volume du ventricule droit. Durant la grossesse, trois pe´riodes sont particulie`rement critiques :  au cours du 2e trimestre de grossesse (20–24 SA), la plupart des modifications physiologiques de grossesse sont intervenues. Il

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est habituel de constater l’aggravation de l’HTAP pouvant entraıˆner la mort de la femme et de l’enfant. La poursuite de la grossesse est fonction de la se´ve´rite´ de la maladie ;  le travail, l’accouchement et la de´livrance entraıˆnent des modifications he´modynamiques et respiratoires brutales du fait des contractions ute´rines. En effet, on observe une hypervole´mie de redistribution, une augmentation de la fre´quence cardiaque par hyperactivite´ du sympathique et une augmentation progressive du travail respiratoire associant hyperventilation et hypocapnie ;  les 15 premiers jours du post-partum sont une pe´riode a` risque de de´compensation. Nous observons une augmentation du retour veineux et une des re´sistances vasculaires pulmonaires pouvant entraıˆner une dilatation aigue¨ du ventricule droit responsable d’une insuffisance cardiaque globale. L’ensemble de ces me´canismes favorise ische´mie et arythmie ventriculaire. Il n’est pas possible de proposer un sche´ma the´rapeutique standardise´ pour ces patientes. Cependant, l’accouchement devra eˆtre programme´ afin de faciliter la prise en charge par l’anesthe´siste permettant entre autres de de´cider du type d’anesthe´sie mais aussi de pre´voir les suites postope´ratoires. En l’absence d’HTAP, les proble`mes pose´s sont avant tout ceux de la voie d’abord, du re´chauffement des solute´s permettant de pre´venir les proble`mes lie´s au phe´nome`ne de Raynaud [57]. En cas d’HTAP, au-dela` des proble`mes suscite´s, l’anesthe´sie ge´ne´rale n’est pas syste´matique. En effet la rachianesthe´sie et/ou pe´ridurale ne sont pas contre-indique´e. Bien que difficile a` controˆler, la vasople´gie induite par l’anesthe´sie par voie pe´ridurale peut eˆtre inte´ressante pour diminuer l’HTAP. De plus, Eisele et al. ont sugge´re´ qu’une dose plus faible d’anesthe´sique e´tait ne´cessaire au cours de la scle´rodermie [58], nous laissant conclure a` la ne´cessite´ de titrer ces malades afin d’obtenir le be´ne´fice escompte´ tout en e´vitant les complications secondaires au surdosage. Concernant l’anesthe´sie ge´ne´rale, elle pose le proble`me de l’intubation difficile dans un contexte de risque d’inhalation accru. Nous proposons donc, si ce type d’anesthe´sie est envisage´, d’effectuer une fibroscopie vigile. Enfin, dans tous les cas, en pre´sence d’une HTAP, devant le risque de de´compensation cardiaque globale dans le post-partum, un suivi en unite´ de re´animation nous paraıˆt ne´cessaire. Rappelons que les inhibiteurs de l’endothe´line sont contre-indique´s au cours de la grossesse. On manque de donne´es quant aux inhibiteurs de la phosphodieste´rase 5 mais les agonistes de la prostacycline semblent utilisables. La modalite´ d’accouchement reste de´battue dans la litte´rature. Les modifications he´modynamiques durant le travail et en postpartum peuvent eˆtre a` l’origine d’une de´faillance cardiaque droite en cas d’HTAP. Chez ces patientes, la ce´sarienne programme´e est la voie la plus souvent utilise´e. Toutefois, des accouchements par voie basse ont e´te´ propose´s. 5. Conclusion La ScS pose un ensemble de proble`mes multisyste´miques complexe dont la prise en charge requiert la collaboration de l’anesthe´siste avec l’ensemble des professionnels de sante´ implique´s dans cette maladie : de l’interniste au kine´sithe´rapeute en passant par le stomatologiste, le rhumatologue, le ne´phrologue, le gastroente´rologue, le radiologue, le cardiologue, le dermatologue et les soignants spe´cialise´s dans les plaies et cicatrisation. Souvent pre´caires sur le plan vasculaire, pulmonaire et nutritionnel, ces patients justifient des techniques d’anesthe´sie prudentes et adapte´es.

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De´claration d’inte´reˆts Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article. Re´fe´rences [1] Subcommittee for scleroderma criteria of the American Rheumatism Association Diagnostic Therapeutic Criteria Committee. Preliminary criteria for the classification of systemic sclerosis (scleroderma). Arthitis Rheum 1980;23: 581–90. [2] Maıˆtre A, Hour M, Bonneterre V, Arnaud J, Tu¨min Arslan M, Carpentier P, et al. Systemic sclerosis and occupational risk factors: role of solvant and cleaning products. J Rheumatol 2004;31:2395–401. [3] Leask A, Abraham DJ, Finlay DR, Holmes A, Pennongton D, Shi-Wen X, et al. Dysregulation of transforming growth factor beta signalling in scleroderma: overexpression of endoglin in cutaneous scleroderma fibroblasts. Arthritis Rheum 2002;46(7):1857–65. [4] Svegliati S, Cancello R, Sambo P, Luchetti M, Paroncini P, Orlandini G, et al. 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[Perioperative management of patients with systemic scleroderma].

Systemic sclerosis (SSc) is an auto-immune disease characterized by vasculopathy and the combination of microangiopathy and tissue collagen deposit le...
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